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Méditation pour la Semaine sainte : le chemin pascal, de l’isolement à la communion en Dieu

EMOTIONAL
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Ysabel de Andia - publié le 10/04/20
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Célébrer Pâques, c’est suivre le Christ jusque dans la solitude et l’abandon pour que soient abolies les limites de l’isolement.  

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L’isolement quel qu’il soit (confinement, quarantaine, ou dans une chambre d’hôpital) est une rupture des relations humaines. On est privé du réconfort d’une personne, du visage de l’autre et de sa parole. Le silence devient pesant. Mais l’isolement est aussi nécessaire à la prière. Jésus va “à l’écart” pour prier (Lc 5, 16 ; 9, 18 ; 22, 41). Cette distance vis-à-vis du monde et des siens (les disciples) est un “pas en retrait” du monde vers la transcendance divine. C’est aussi une entrée dans l’intériorité, le voyage dans ces espaces intérieurs où nous nous découvrons à nu devant Dieu. Cela peut-être une chance, une grâce, une joie : “Ô solitude bénie, seule bénédiction”, disait saint Bernard.

L’angoisse de l’abandon

Mais dans la solitude, la mort est là, elle rôde, elle joue avec nous une partie d’échecs comme dans le film d’Ingmar Bergman Le septième sceau, où l’action est située au XIVe siècle, alors que la peste noire (autre pandémie) ravage la Suède : “Échec et mat”, dit la mort au chevalier. Elle gagne toujours à la fin. La mort entraîne aussi les vivants dans sa danse, comme dans la fresque de la “danse macabre” de l’abbaye de la Chaise-Dieu. L’homme se découvre, selon Heidegger, un “être-pour-la-mort”. La peur est là : peur de souffrir, peur de mourir, peur de ma mort et peur pour ceux que j’aime.


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Cependant, cette “pensée de la mort” est salutaire : “Vivre aujourd’hui comme si je devais mourir ce soir”, disait le père de Foucauld. Elle fait partie des exercices spirituels de la vie monastique, comme des dialogues philosophiques. À ses amis qui se demandent ce qu’ils pourront partager avec lui dans les derniers instants qui lui sont accordés, Socrate répond : “Un autre regard sur ce qui nous tient et à quoi nous tenons”. Face à la mort, nous apprenons ce qui est essentiel et ce qui est provisoire.

L’abolition des limites

Jésus a vécu cette peur à Gethsémani au point que son corps s’est couvert d’une “sueur de sang” (Lc 22, 44), mais il a vaincu son angoisse par son abandon entre les mains du Père : “Père non pas ce que je veux, mais ce tu veux” (Mt 26, 39). C’est dans l’abandon de Jésus que nous pouvons aujourd’hui nous abandonner au Père. Et cet abandon est notre repos. “Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien. Sur des prés d’herbe fraîche, il me fait reposer… Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi. Ton bâton me guide et me rassure” (Ps 22, 1-2.4).

Mais le temps du Carême ne s’arrête pas au Vendredi saint : il nous conduit au matin de Pâques, à la Résurrection qui fait éclater le temps et l’espace de la vie limitée ici-bas. La Résurrection ne peut être vécue que dans la foi, l’espérance et la charité. La foi témoigne du triomphe de la vie – et d’une vie éternelle : le temps n’est plus confiné. L’espérance de l’ouverture des tombeaux et de l’appel au large de l’immensité de la mission rend l’espace illimité. Enfin la charité est l’amour n’a pas de limites. “La mesure de l’amour, c’est d’aimer sans mesure” (saint Augustin).

Les portes s’ouvrent

La Résurrection est l’ouverture des tombeaux, mais aussi de la porte des enfers et de la porte du paradis, la sortie de tous les confinements, et cette sortie n’est possible que parce que l’homme est un “homme nouveau” qui est “envoyé” jusqu’aux “confins” de la terre. L’icône de la Résurrection est celle de la descente aux enfers du Christ qui saisit Adam et Ève pour les faire “sortir” de cet espace clos de la mort et remonter à la vie.



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Le chemin pascal du Carême va de Gethsémani à Pâques, autrement dit du désert — et c’est l’évangile du premier dimanche de Carême — à la résurrection de Lazare, signe de la résurrection du Christ et de notre propre résurrection — et c’est l’évangile du cinquième dimanche de Carême, sur lequel il vaut la peine de revenir pour frayer le chemin vers Pâques.

Du désert à la résurrection : Lazare

Jésus se révèle comme “la résurrection et la vie” et demande à Marthe de le croire : “Je suis la résurrection et la vie. Si quelqu’un croit en moi, il vivra” (Jean 11, 25). Face à la mort, le seul salut est la foi dans le Christ. En voyant Marie et les Juifs qui l’accompagnaient pleurer, “Jésus pleura. Les Juifs dirent alors : “Voyez comme il l’aimait”” (Jn 11, 35). Ces larmes sont des larmes de compassion. Devant la mort de ceux que l’on aime, nous sommes “bouleversés”. Cet ébranlement de tout l’être est la prise de conscience que l’homme est mortel, que tout a une fin, que tout passe. Une part de nous-mêmes se détache de nous : celle des êtres que nous ne reverrons plus et d’un passé qui ne reviendra plus.

Marthe oppose à Jésus le réalisme sensoriel de la mort, sa froideur et même son odeur : “Il sent déjà” (Jn 11, 39). Et de nouveau, Jésus lui demande de le croire : “Ne t’ai-je pas dit que, si tu crois, tu verras la gloire de Dieu ?” (Jean 11, 40). On ne voit pas la gloire de Dieu sans mourir, mais dans la foi en la résurrection, le passage de la mort à la vie, on voit la gloire de Dieu. Ce que Moïse a demandé (Exode 33, 20), Marthe l’a obtenu. Alors Jésus prie : “Père, je te rends grâce de ce que tu m’as exaucé” (Jean 11, 41-42).

La communion dans la louange

Cette prière d’action de grâces manifeste que les paroles et les actes de Jésus obéissent à la volonté du Père et sont exaucées par le Père. En ce sens, la Résurrection est un “sacrifice de louange”. Enfin, Jésus ordonne à Lazare de sortir du tombeau : “Lazare, sors !” (Jn 11, 43) et sa forte voix portant la parole du Verbe — “Il parla, et ce qu’il dit exista ; il commanda, et ce qu’il dit survint” (Ps 32, 9) — fait surgir Lazare de l’enferment de son tombeau à la lumière, c’est-à-dire de la mort à la vie, ou de l’isolement mortel à la participation à la communion dans l’Esprit entre le Père invisible, le Fils éternel et tous les membres de son Corps.


PAPIEŻ FRANCISZEK
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