"Rappelez-vous la parole que je vous ai dite : un serviteur n’est pas plus grand que son maître. Si l’on m’a persécuté, on vous persécutera, vous aussi. Si l’on a gardé ma parole, on gardera aussi la vôtre". C’est avec ces paroles rapportées par l’Évangile de Jean (Jn 15, 20) que Jésus annonce à ses disciples l’importance du martyr des premiers chrétiens. Parmi les douze présents, seuls deux ne le connaîtront pas : Judas Iscariote (Mt 27, 5), et Jean, « le disciple bien-aimé », à qui Dieu permet de vivre longtemps et de mourir sur l’île de Patmos, après la rédaction de l’Apocalypse. Parmi ces morts, l’une devait rendre particulièrement gloire à Dieu, celle de Pierre (Jn 21, 19). Les Évangiles ne précisent néanmoins pas que l’une des raisons à cela est que l’apôtre a partagé son destin avec Paul, à Rome.
Deux piliers de l’Église
Pour rappel, simple pêcheur, Simon rebaptisé « Kephas » ou Pierre par Jésus, est appelé avec son frère André à suivre le Seigneur sur le bord du lac de Tibériade. Un événement qui provoque un complet bouleversement en lui. Jésus ira jusqu’à lui dire : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle » (Mt 16, 18). Persécuteur des premiers chrétiens et citoyen romain, Saul, devenu Paul, se convertit sur la route de Damas, grâce à une apparition de Jésus (Ac 9, 3-18). Il se consacre alors à l’évangélisation et se fait connaître comme « apôtre des gentils » (des non-juifs) ou « des Nations ». Tous les deux jouent un rôle décisif dans la fondation de l’Église.
En l’an 50 se tient le fameux « concile de Jérusalem ». Rapporté par le quinzième chapitre des Actes des Apôtres, il porte sur l’ouverture des juifs chrétiens aux païens. La discussion a lieu en réalité entre trois hommes : Jacques le juste, surnommé « le frère du Seigneur » (Ga 1, 19), qui dirige l’assemblée, Pierre et Paul. Cet événement, qui fixe le rôle de la loi et celui du Christ dans le salut, est essentiel dans la fondation de l’Église universelle, qui dépasse les simples juifs. Leurs destins vont alors se séparer pour se recroiser une dizaine d’années plus tard.
En 64, Rome est incendié. L’empereur Néron, souvent soupçonné d’en être l’auteur, profite de la tragédie pour persécuter les chrétiens, déclarés coupables. « On livra aux supplices les chrétiens, sorte de gens adonnés à une superstition nouvelle et dangereuse », explique-t-il. L’évêque de Rome, Pierre, et Paul, qui se trouvent alors à Éphèse, sont arrêtés. Si la tradition chrétienne relie cet épisode à celui du Grand incendie, d’autres sources, comme la lettre de Clément de Rome, s’y opposent. Qu’importe, les deux apôtres comparaissent devant Néron, qui les condamne. Les deux hommes sont enfermés au Carcer Tullianum, légendaire prison qui a déjà neuf siècles, et qui a vu passer de célèbres prisonniers, comme Vercingétorix, après la prise des Gaules. Pierre et Paul périssent tous deux vers l’an 67. Selon un apocryphe, les Actes de Pierre, l’évêque de Rome refuse par humilité de mourir comme le Christ ; il est alors crucifié la tête à l’envers. Paul, lui, est décapité. Deux morts différentes, pour une même finalité : l’avènement de l’Église.