Le Vatican menace d’exclusion la branche belge de cette congrégation si elle ne revient pas sur sa décision d’autoriser les médecins de ses centres psychiatriques à pratiquer l’euthanasie.
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Pour avoir donné son feu vert à la pratique de l’euthanasie dans ses centres hospitaliers en mars dernier, la branche belge de la congrégation des Frères de la charité pourrait se voir retirer son identité catholique par le Vatican. La Congrégation pour les instituts de vie consacrée a en effet demandé au supérieur général des frères, René Stockman – qui avait déposé une plainte contre cette attitude et suscité une enquête auprès des autorités ecclésiastiques sur cette affaire – de prendre les mesures nécessaires, indique le magazine catholique Tertio. Le préfet, le cardinal Joao Braz de Aviz, propose entre autres que les frères signent, d’ici le 5 septembre, une déclaration écrite confirmant qu’ils sont d’accord avec la doctrine catholique, très claire à ce sujet : “L’euthanasie est une grave violation de la loi de Dieu, en tant que meurtre délibéré moralement inacceptable d’une personne humaine” (Evangelium vitae 1995).
La section belge des frères belges dirige quinze centres pour les patients psychiatriques en Belgique, institutions dans lesquelles les médecins ont reçu l’autorisation d’effectuer une euthanasie des malades mentaux en situation non terminale. En mai dernier, le supérieur général avait vivement réagi à cette décision, informant ses confrères que l’épiscopat belge et le Vatican avaient été mis au courant de la situation, et que le cardinal secrétaire d’État Pietro Parolin, examinait personnellement la situation. “J’attends la réponse claire de l’Église et cette réponse sera présentée à notre organisation, dans l’espoir qu’elle adaptera sa vision… J’espère que nous n’allons pas devoir dégager notre responsabilité dans le domaine de la santé mentale à l’endroit où, il y a plus de 200 ans, nous avons commencé en tant que congrégation délivrant ces soins”, avait déclaré, à cette occasion, frère Stockman au Catholic News Service.
Les Frères de la charité ont été fondés en 1807 à Gand, en Belgique, par le père Peter Joseph Triest, dont la cause de la béatification a été ouverte en 2001. Inspiré par la spiritualité de saint Vincent de Paul et engagés auprès des personnes âgées et des malades mentaux, l’ordre était connu sous le nom des Frères hospitaliers de Saint-Vincent et s’est répandu dans 30 pays (infoCatho). En Flandre, le groupe des Frères est considéré comme le “fournisseur” le plus important de services de santé mentale, desservant 5 000 patients par an.
Face à une euthanasie en forte progression
Selon une récente étude du groupe de recherche End-of-life Care, constitué de médecins et experts, rapportée dans BMC Psychiatry, en Belgique l’euthanasie pour maladies psychiques sont en nette augmentation : on y apprend qu’entre 2002 et 2013, 179 euthanasies pour troubles psychiatriques et de démence ont été pratiquées. Avec une hausse considérable de 3% en 2013 contre les 0,5% en 2002, lorsque la loi est entrée en vigueur. Il est également souligné que la grande majorité des patients euthanasiés n’étaient pas en toute fin de vie et pour 20% en moyenne de ces patients il n’a pas été fait appel à un psychiatre comme l’exige la loi. Ces chiffres inquiètent les experts dans la mesure où, selon eux, “les personnes démentes et les malades psychiatriques sont justement celles qui ont le plus besoin d’accompagnement et pour lesquelles les médecins doivent être vigilants dans le diagnostic de leur maladie”.
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C’est dans ce contexte que la province de Gand, en mars dernier, a fait brusquement volte-face, adoptant une “note” — ou “texte de vision”, selon ses propres termes — rendant possible l’euthanasie sur des patients dans ses centres psychiatriques, y compris ceux qui ne seraient pas en phase terminale. Ce document de neuf pages est sorti environ un an après la condamnation à une amende de 6 600 dollars d’une maison de repos catholique privée à Diest pour avoir refusé l’euthanasie d’une dame âgée de 74 ans souffrant d’un cancer du poumon.
Du “jamais vu” dans l’Église
La réaction de l’administration générale de la congrégation à ce document a été immédiate : “Nous condamnons tout à fait ce texte de vision, car il s’oppose aux principes de base propres au charisme de la Congrégation (…) nous espérons toujours de parvenir à un compromis, dans lequel l’inviolabilité du prochain pourra être respectée de façon absolue (…)”. L’administration générale relève, dans ce « texte de vision », un manque total de référence de nature biblique et toute référence au Christ qui, selon elle, a évidemment des conséquences importantes face aux trois valeurs fondamentales pourtant invoquées en tant que point de départ de la nouvelle vision : l’inviolabilité de la vie, l’autonomie du patient et les soins relationnels. “Tout ceci n’est pas digne des Frères de la charité (…) Cela est déloyal, du jamais vu et inacceptable”, souligne frère Stockman au nom de toute la congrégation. Pour le supérieur général, le texte de vision est non seulement moralement condamnable, mais plein de sérieuses contradictions juridiques internes. De plus, il nuit aux positions juridiques correctes que l’Église et ses composantes ont toujours défendues dans le débat de l’euthanasie et de son interprétation.
Le supérieur général rappelle pour conclure que les Frères de la charité, sont appelés à “être prophétique dans le monde” et à “ne pas avoir peur de se faire entendre quand ils constatent que la protection de la dignité humaine n’est pas respectée”. Un principe intégré lorsque la congrégation a vu le jour, et quand, en 2015, a-t-il ajouté, “nous avons commémoré avec gratitude les 200 ans après lesquels nous avons brisé les chaînes des malades mentaux emprisonnés dans les caves du château de Gérard le Diable à Gand, nous pouvons humblement dire que nous avons spécialement fait la différence pour ces personnes dans la société” [lire l’intégralité du texte sur le site Brothers of Charity].
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