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Les Papes peuvent-ils changer la liturgie ?

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Henry Vargas Holguín - publié le 09/02/16
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Une explication s'impose après la polémique suscitée par la décision du pape François de modifier le rite du lavement des pieds.

Un nouveau décret a été publié et annoncé par le pape François, le 21 janvier 2016, concernant le nouveau rite du lavement des pieds lors du Jeudi Saint. Au vu des réactions que cette annonce a suscitées, rappelons tout d'abord qu'il existe un document officiel sur le "gouvernement de la sainte Liturgie", l'Instruction Redemptionis Sacramentum de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements (2004), et que ce document se fonde entre autres sur la Constitution sur la Sainte Liturgie du Concile Vatican II (Sacrosanctum Concilium).

Ce sont donc les pères conciliaires qui ont enseigné que, "le droit de régler l’organisation de la liturgie dépend uniquement de l’autorité de l’Église ; il appartient au Siège apostolique et, selon les règles du droit, à l’évêque" (SC 22, 1)….

Seul le Pape peut modifier les rites liturgiques

Ici une question se pose : Qu'est-ce donc que le Siège apostolique ? Selon le canon 361 de l’actuel Code de droit canonique, le Siège apostolique ou Saint-Siège désigne tout d’abord et principalement le Pontife romain, Autrement dit, l'existence du Siège apostolique est liée à la personne du Pape, chef suprême de l'Église catholique.

Le Pape ou l'Évêque de Rome "(…) possède dans l'Église, en vertu de sa charge, le pouvoir ordinaire, suprême, plénier, immédiat et universel (...)"(Canon 331). Pouvoir qui dans le domaine de la liturgie, inclue notamment d' "organiser la sainte Liturgie (Canon 838, 2). En vertu de quoi (…) seul le Pape peut déterminer les rites liturgiques utilisés dans l'Église".

La décision papale ne doit pas scandaliser

Ces jours-ci, le Pape François a décidé de modifier le rite du lavement des pieds lors de la messe du Jeudi Saint. La volonté du Pape est d'ouvrir ce rite aux femmes dans toute l'Église.

Le lavement des pieds est un rite et pas un sacrement, a rappelé la Vatican. Et même si, dans la pratique pastorale, on a coutume de laver les pieds de 12 hommes, il est licite de prendre en considération la situation concrète de la communauté présente. Par exemple, si la messe du soir du Jeudi Saint est célébrée dans une prison de femmes, cela signifie-t-il que l'on ne pourrait pas accomplir le rite puisqu'il n'y aurait pas d'hommes ?

Si un Pape décide d'un changement liturgique, c'est qu'il a des motifs sérieux de le faire. Il ne s'agit pas d'un caprice d'ordre esthétique et encore moins idéologique, de même que ces modifications ne sont pas imposées arbitrairement, mais répondent à des motifs sérieux et ont un arrière-plan théologique, pastoral, voire historique.

En outre, les modifications liturgiques ne touchent pas à l'essence de la messe et de l'administration des sacrements, ou à la structure des rites liturgiques. Ce que veulent les Papes, c'est que les célébrations pontificales soient exemplaires en tous points…

Les catholiques sont donc appelés à se conformer aux décisions papales et il est bon de se référer aux actions liturgiques du Pape. Selon le cardinal Antonio Cañizares, les "liturgies pontificales sont exemplaires pour l'ensemble du monde catholique".

On ne peut pas se fermer aux changements

L'Évangile doit être le livre de prédilection du chrétien. Or voici ce que dit précisément l'Évangile: "Le sabbat a été fait pour l’homme, et non pas l’homme pour le sabbat" (Mc 2, 27). Ni Lui ni ses disciples ne sont obsédés de respecter à tout prix le samedi…

Des phrases et des attitudes comme celles-ci créèrent des conflits avec les docteurs de la loi ; mais Jésus savait ce qu'Il disait et faisait. Cependant, justement pour cela, les pharisiens reprochèrent à Jésus de blasphémer, de ne pas respecter les normes prescrites par la loi de Moïse et les traditions.

Jésus, le fils de Dieu, ne pouvait-Il pas changer les choses qu'Il estimait contraires – bien que légales – à la volonté de Dieu ? Bien sûr qu'Il le pouvait ! "Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux" (Mt 16,18-19).

Ce pouvoir de Pierre est ce que nous appelons "la primauté de Pierre". Par conséquent, le Pape doit être sur la même ligne que Jésus et changer les choses comme il le juge bon.

La Sainte Tradition

La Tradition, tout comme l'Écriture Sainte, fait partie de la Révélation et donc du dépôt de la foi. "Cette transmission vivante, accomplie dans l’Esprit Saint, est appelée la Tradition en tant que distincte de la Sainte Écriture, quoique étroitement liée à elle. Par elle, "l’Église perpétue dans sa doctrine, sa vie et son culte et elle transmet à chaque génération tout ce qu’elle est elle-même, tout ce qu’elle croit" (Constitution Dei Verbum8).

Au plan théologique, la Tradition est un ensemble d'éléments qui créent un tout inséparable et font partie de l'essence même de l'Église fondée par le Christ. De quels éléments parlons-nous ? Il y en a cinq, divisés en deux groupes : les éléments immuables et les éléments modifiables. Les premiers sont ceux qui demeurent identiques au fil des siècles et qui ne changent jamais – le dogme et la morale –, ce que le catholique doit croire et faire ou ne pas faire. Les seconds sont la liturgie, la discipline et la pastorale.

De sorte que la liturgie représente l'un des éléments modifiables de la Tradition qui changent au fil des siècles, mais seulement ce que l'on peut changer.

La liturgie est dynamique, vivante ; elle n'est pas un bloc de marbre : froid, lourd et dur. la liturgie change selon des circonstances variables (lieux, temps) ; de la même façon la discipline de l'Église change quand l'Église le juge bon.

Les pièges du modernisme et de l'intégrisme 

Comme dit le Catéchisme de l'Église catholique, la Tradition de l'Église est appelée aussi "Tradition vivante" parce que, bien que composée d'éléments qui ne peuvent jamais changer (le dogme et la morale), elle comporte aussi des éléments qui changent et s'adaptent selon l'époque et les circonstances (liturgie, discipline et pastorale). Ne pas bien comprendre cette différence peut conduire à tomber dans les erreurs du modernisme et de l'intégrisme.

Tombent dans le modernisme ceux qui veulent changer ce qui ne peut être changé de la Tradition. À l'opposé, les intégristes admettent que la Tradition se compose d'autres éléments que le dogme et la morale, mais ne reconnaissent pas que ceux-ci peuvent changer ou être modifiés au gré de l'époque et des circonstances.

L'unique manière de demeurer fermes dans la foi et de défendre la Tradition contre les erreurs du modernisme et de l'intégrisme est d'adhérer au magistère de l'Église. Seul le magistère a reçu du Christ la promesse de ne jamais dévier du dépôt de la foi. Et c'est seulement à ce magistère que le Christ a permis de prêcher la Vérité.

Donc demeurons unis au Pape, nous catholiques, avec une fermeté absolue, dans l'humilité et l'obéissance. Prenons en compte la promesse divine du Christ de l'indéfectibilité de l'unique et véritable Église.

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