Campagne de Carême 2025
Ce contenu est gratuit, comme le sont tous nos articles.
Soutenez-nous par un don déductible de l'impôt sur le revenu et permettez-nous de continuer à toucher des millions de lecteurs.
Depuis le temps que Grégoire, 14 ans, voit ses frères et sœurs partir en week-end scout, il priait chaque soir “Seigneur, faites que je puisse moi aussi devenir scout un jour ?” Le jeune porteur de trisomie 21 lyonnais en rêvait, et depuis septembre dernier, c’est devenu une réalité grâce à l’ouverture de la patrouille des Archanges ! Cette patrouille singulière accueille cinq jeunes porteurs de handicap, âgés de 12 à 20 ans, encadrés par cinq chefs. Ils se retrouvent six dimanches par an, près de Fourvière, pour une sortie scoute somme toute relativement classique : messe, service du bois, préparation du feu, épluchage des légumes, déjeuner puis jeux et activités scoutes comme le fameux parcours Hébert ou les jeux de kim, “sans oublier bien sûr les chants et les mimes !”.
“Nous nous sommes calés sur le même modèle que la patrouille sainte Clothilde, qui accueille aussi à Lyon des guides depuis septembre 2023, à l'initiative de Marguerite, cheftaine de 23 ans, qui s’était elle-même inspirée de la première patrouille Sainte Clotilde lancée à Toulouse en 2022”, explique à Aleteia Yves-Emmanuel Tiengou, le Chef de groupe de la Patrouille des Archanges, père de famille de 49 ans. “La feuille de route était relativement blanche, en termes d’activités et d’initiation au scoutisme, alors nous affinons le modèle avec nos rencontres et nos partages d’expériences”, explique-t-il
Vivre les cinq piliers du scoutisme
Pour ces chefs très investis et ultra-motivés, connaissant souvent de longue date le scoutisme, mais pas toujours le monde du handicap, le constat a été le même, dans leurs différentes expériences scoutes : autant il est tout à fait envisageable d’accueillir un jeune porteur de handicap mental aux louveteaux ou aux louvettes dans la mesure où l’unité de vie est en meute ou clairière animée par des chefs ou des cheftaines, autant il est vraiment difficile de pouvoir l’intégrer à la troupe. En effet, aux scouts, à partir de 12 ans, l’unité de vie est la patrouille dont la responsabilité est confiée à un jeune 16 ans généralement ; ce qui rend l’accueil d’un enfant porteur de handicap vraiment délicat. Cela mettrait à mal tout le fonctionnement de la patrouille, soit en focalisant toute l’attention sur ce jeune, soit en ne l’intégrant pas assez ou en n’adaptant pas assez les activités à ses aptitudes.
De ce constat sont donc nées ces patrouilles dédiées, encore toutes récentes, mais qui ne demandent qu’à inspirer et à essaimer ailleurs ! L’idée est d’accueillir ces scouts et guides avec un p’tit truc en plus, et ayant plus de 12 ans, pour leur faire vivre l’aventure scoute qui tourne autour des cinq piliers du scoutisme : la santé, le sens du service, le sens de Dieu, le sens du concret et la formation du caractère. Avec chacun son foulard : rose et bleu pour les guides, bleu et vert pour les scouts, tout le monde en uniforme impeccable ! “Je n’avais pas de compétence spécifique pour l’encadrement de jeunes porteurs de handicap mais j’avais juste envie de leur faire vivre une belle expérience de scoutisme en cherchant à l’adapter tout simplement à qui ils sont”, raconte encore Yves-Emmanuel.

Mise à jour du carnet de progression
Résultat, six sorties programmées dans l’année, où les jeunes se retrouvent en parité avec les chefs, même si “l’idée est bel et bien de les laisser faire par eux-mêmes ce qu’ils peuvent pour progresser, dans l’esprit de la loi scoute”, précise le chef de groupe. “La plupart de nos guides avaient été louvettes, et elles et leurs familles étaient frustrées de ne pouvoir continuer dans le mouvement”, confie pour sa part Marguerite qui s’est lancée dans l’aventure en 2023 avec la patrouille sainte Clotilde. Elle et ses cheftaines accueillent huit jeunes filles, porteuses de handicap (trisomie 21, autisme ou retard mental) de 14 à 30 ans ! “Nous nous adaptons à chacune et dans le cas de Marie qui a 30 ans, elle a tout à fait sa place, et sa joie de venir aux sorties est communicative”. “Nous nous laissons guider par notre envie d’accompagner ces jeunes dans le cadre scout, et nous avançons avec elles, en fonction, tout est encore en construction”, reprend la jeune étudiante qui confie notamment travailler sur l’adaptation du carnet de progression des guides, pour qu’il soit utilisable par sa patrouille. “Avant chaque sortie, je donne à chacune une mission à préparer : trouver la prière du matin, proposer un jeu, apprendre quelque chose à la patrouille, et toutes le font avec sérieux et tant de joie, on est toujours remplie de gratitude”.
Tout comme les parents d’ailleurs, heureux de voir leurs enfants s’épanouir dans le cadre du mouvement scout, qu’ils connaissaient, ou pas, en inscrivant leurs enfants. “C’est le triptyque vertueux. Nos chefs grandissent avec cette expérience humaine incroyable, nos scouts savourent de goûter enfin à l’aventure scoute et nos familles sont fières de voir leurs enfants s’épanouir avec nous et sont, de fait, déchargées six jours par an pour se ressourcer ou se reposer”. “Étonnamment, on a mis plus de temps à trouver des jeunes pour nos patrouilles, que des chefs et cheftaines”, partagent néanmoins Marguerite et Yves-Emmanuel. Si ces chefs connaissent parfois le handicap, la plupart sont surtout très engagés dans le mouvement scout. Engagement qu’ils doivent parfois combiner avec leurs études : “Proposer six dimanches par an, et pas de camp d’été, leur permet de s'organiser en amont, d’avoir une visibilité sur l’année pour leurs cours et stages, et de garder un engagement pour les autres”, confirme Marguerite.

Promesse et badges
Mais que ce soit du côté des chefs, des parents, des scouts et des guides, tous l’affirment sans hésitation, il s’agit surtout réellement d’une expérience de joie, de rencontres et d’enrichissement extraordinaires, avec aussi le sentiment de lancer quelque chose de nouveau mais tellement espéré. “Ce qui m’attire dans ce projet c’est le contact avec la personne handicapée. Je me sais en confiance avec les scouts et leur joie de vivre à toute épreuve est souvent extrêmement porteuse ! », confie ainsi Martin, chef scout à la patrouille des Archanges.
De son côté, la joie de Marguerite est de pouvoir cette année participer fin mai avec sa patrouille au grand jeu national des Guides d’Europe qui se tiendra sur un week-end complet à Rambuteau (Saône-et-Loire). “Nous dormirons même sous la tente, les guides sont si impatientes !”, confie-t-elle encore, heureuse de constater qu’il y a déjà une liste d’attente pour l’année prochaine, “pourvu que nous donnions des idées à d’autres !”
L’âme n’a pas de handicap
Pour ces scouts et guides se posent aussi la question du cheminement scout qui passe par la promesse et les badges. Faut-il les adapter, proposer d’autres critères d’obtention ? “Je reste marqué par la phrase de la maman de Grégoire que nous accueillons dans la patrouille : si le corps de nos enfants est marqué par le handicap ce qui les limite, leur âme elle n’est pas handicapée et ne connaît pas de limite”, confie Yves-Emmanuel qui a eu le déclic, et travaille à l’adaptation du cérémonial de la promesse. Car la grande joie du chef de groupe lyonnais, c’est qu’à la prochaine sortie planifiée, en mai, Grégoire fera sa promesse ! Un autre de ses rêves pour lequel il prie chaque soir et se prépare de façon très profonde. “Les enfants qui nous sont confiés ont une connexion avec Dieu qui nous dépasse et nous avons la chance d’en être les témoins ; nous grandissons aussi dans la foi grâce à eux”, conclut le chef de groupe lyonnais.
Pratique :
Patrouille des Archanges : Yves-Emmanuel Tiengou [email protected]
Patrouille sainte Clothilde : Marguerite Dalle [email protected]
