Grand penseur et théologien de l'Église, saint Thomas d’Aquin (1225-1274), surnommé le docteur angélique, est mondialement connu. Depuis trois ans, on célèbre les 700 ans de sa canonisation (1323), les 750 ans de sa mort (1274) et les 800 ans de sa naissance (1225). Pourtant, un élément central de sa vie reste encore mystérieux, celui de sa mort. Une étude américaine, publiée dans la revue médicale World Neurosurgey et parue en février 2024 pourrait bien lever le voile sur ce mystère et suggère que sa mort mystérieuse survenue en 1274 serait liée à un hématome sous-dural (accumulation de sang entre le cerveau et sa couche protectrice externe) qui en serait probablement la cause.
Thomas d'Aquin, surtout connu pour sa Somme théologique, s’est rendu au concile de Lyon en France et a eu un accident sur la route. Plusieurs écrits racontent qu’il s’est cogné la tête contre un arbre penché. Bien qu'apparemment indemne au départ, Thomas d'Aquin a commencé à se sentir mal et son état s’est aggravé les jours suivants. Il est finalement décédé quelques semaines plus tard à l’abbaye de Fossanova située dans la région du Latium, en Italie.
Des symptômes qui ne trompent pas
L’étude montre que les symptômes ressentis par Thomas d’Aquin – faiblesse, nausées, confusion et dysphasie éventuelle – correspondent à la progression progressive d’un hématome sous-dural. Cette pathologie résulte généralement d’un traumatisme crânien mineur qui provoque la déchirure des vaisseaux sanguins, ce qui permet au sang de s’accumuler lentement et d’exercer une pression sur le cerveau. Les symptômes courants comprennent des maux de tête, des changements cognitifs, des troubles de l’élocution et une faiblesse physique.
Les récits historiques décrivent Thomas d'Aquin comme un homme intellectuellement puissant, même dans ses derniers jours au cours desquels il a réussi à développer un commentaire pointu aujourd'hui perdu du cantique des cantiques. Mais son déclin physique s’est aggravé progressivement : la veille de sa mort, il avait du mal à marcher et ne pouvait plus monter les escaliers de l'abbaye. Les chercheurs émettent l’hypothèse que si Thomas d’Aquin avait eu accès aux techniques médicales modernes, telles que le drainage ou un trou de trépan pour soulager la pression sur le cerveau, il aurait pu survivre et étendre ses contributions monumentales à la théologie et à la philosophie.
D'autres théories
Au fil des siècles, diverses théories ont été avancées concernant la mort de Thomas d'Aquin, notamment l'empoisonnement ou un arrêt du cœur à la suite d'une vision mystique. Bien que convaincantes à leur manière, ces hypothèses manquent de fondements médico-légaux et historiques offerts par la nouvelle étude. Les chercheurs à l’origine de l’étude, intitulée A Plausible Historical and Forensic Account of the Death of Thomas Aquinas (Un récit historique et médico-légal plausible de la mort de Thomas d’Aquin), préconisent désormais une enquête plus approfondie. Ils espèrent étudier deux crânes attribués à Thomas d’Aquin, conservés en Italie et en France, à la recherche de preuves de traumatisme qui pourraient étayer leurs conclusions. Jusqu’à présent, leur analyse s’est limitée à des photographies des reliques, ce qui empêche de tirer des conclusions définitives. Alors que l’Église a fêté les 700 ans de sa canonisation en 2023, l’un des plus grands saints de l’Église n’a pas fini de passionner les foules.
