Quatre mètres sur trois ! Cette Adoration des Mages commandée en 1737 au peintre français Charles André Van Loo affiche des dimensions imposantes. Elle était destinée à orner le maître-autel de la chapelle haute du séminaire des Missions étrangères, à Paris. C’est là qu’étaient formés, ils le sont toujours, les futurs prêtres envoyés pour évangéliser des pays lointains, en particulier l’Asie. Le tableau a immédiatement du succès, si bien qu’il est exposé au Salon de 1739, avant de rejoindre la place qui lui est réservée, offert à la contemplation des séminaristes.
Mis à part l’identité de son auteur, il n’y rien de notable à retenir à propos de cette œuvre avant… la Révolution française. En 1793, elle est déplacée, comme tant d’autres œuvres à la même époque. Elle quitte la chapelle des Missions Étrangères pour être entreposée dans l’ancien couvent des Petits-Augustins, l’actuelle École des Beaux-Arts de Paris. Avant d’être affectée à l’église Saint-Eustache en 1802.
Son dernier voyage sera organisé pour aller rejoindre l’église Notre-Dame de l’Assomption, située dans le centre de Paris, dans le premier arrondissement de la capitale. Pendant la Révolution, cette église avait été transformée en entrepôt pour décors d'opéras et de théâtres. Rendue au culte à la suite du Concordat, elle s’appelait encore l’église de la Madeleine, appellation qu’elle a conservée jusqu’à ce que l’actuelle Madeleine soit achevée, en 1845. Et il se trouve que depuis 1844, l’église de l’Assomption est confiée à la communauté catholique polonaise. Ce sont donc, depuis des décennies, les compatriotes du saint pape Jean Paul II qui admirent cette Adoration des mages lors des offices.
Le sens des ruines
Van Loo inscrit son Adoration des Mages dans un décor architectural antique. Le Christ vient remplacer l’Ancienne Alliance et détruire les idoles, matérialisées par une statue brisée. Marie présente l’Enfant-Jésus aux trois mages. Ils sont reconnaissables à leurs riches vêtements ornés de fourrure et de plumes et à leurs cadeaux, contenus dans des coffrets précieux, comme le rapporte Saint Matthieu dans son évangile : "Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe." (Mt 2, 11) En retrait, saint Joseph, désigne la scène à la foule, invitant chacun, comme les mages, à venir adorer l’Enfant-Dieu.