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"On ne sait pas ce qui se passe." Sur les groupes de discussion Whatsapp, les messages de stupeur se succèdent. Voilà quatre jours que les quelque 25.000 chrétiens de la ville d’Alep, au nord-ouest de la Syrie, craignent de se retrouver au cœur d’un nouveau champ de bataille. Pour la première fois depuis le début de la guerre civile en 2011, le régime syrien a perdu, dimanche 1er décembre, le contrôle de la deuxième ville du pays. L’offensive surprise, arrivée d’Idlib près de la frontière turque, a été menée par une coalition de groupes rebelles islamistes, avec à sa tête Hayat Tahrir al-Cham (HTC). Les Aleppins redoutent aujourd’hui une reprise des hostilités.
Face à l’attente, le silence
Depuis le 1er décembre, les quartiers chrétiens de la ville, tels qu’Azizieh, sont désormais contrôlés par des groupes islamistes. L’absence d’autorité civile identifiable, ainsi que le souvenir d’exactions commises envers les communautés chrétiennes durant la guerre, réveillent une vive appréhension. "Il y a une grande incertitude sur ce qui se passe ; les gens ont peur car ils ne savent pas qui sera à la tête de leur quartier demain", affirme ainsi une source de la Custodie de Terre sainte, la représentation officielle de l’Église catholique dans la région. "Des gens partent, d’autres restent, ils ne savent pas trop où aller. Les consignes sont : 'Restez chez vous' ", poursuit-elle. Si la paroisse catholique latine d’Alep informe régulièrement sur l’évolution de la situation, les familles sont invitées à rester silencieuses, et à ne pas s’exprimer sur les réseaux par mesure de sécurité.
Dans des déclarations publiées le 2 décembre par Vatican News, le cardinal Zenari, nonce apostolique en Syrie, a indiqué que la population est fatiguée après quatorze ans de guerre civile et qu'avec la prise surprise d'Alep "on ne sait pas ce que l'avenir réserve à cette région et à la Syrie en général". "Le Moyen-Orient tout entier est en feu et les cartes géopolitiques sont en désordre", a-t-il noté. Mais "les évêques ont assuré à leurs fidèles qu'ils resteraient à Alep, ainsi que les prêtres et les religieux", a-t-il assuré.
Un établissement franciscain bombardé
Les craintes sont d’autant plus fortes que des avions syriens et russes ont bombardé, le 1er décembre, des zones tenues par ces groupes rebelles, tuant 15 civils dont des enfants, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Ce dimanche, une bombe est tombée sur le Collège Terra Santa, établissement catholique tenu par les frères franciscains de la ville. Une attaque incompréhensible, d’autant que le lieu sert de centre de soutien psychologique, humanitaire et spirituel aux habitants depuis le début de la guerre civile. "Nous ne nous expliquons pas les raisons de cet acte, et demandons à la communauté internationale d’intervenir et de faire tout son possible pour empêcher ces violences sur une structure religieuse", indiquent par téléphone à Aleteia les frères franciscains de la Custodie de Terre sainte. "Il y a un désir de retour à la normale, mais nous sommes conscients qu'il faut du temps, qui, nous l'espérons, ne sera pas long", poursuivent-ils. Les Franciscains continuent de célébrer quotidiennement la messe, à laquelle participent "en grand nombre" les fidèles catholiques. Ils assurent également une aide matérielle d’ampleur, notamment à travers la distribution de 1.000 repas quotidiens pour personnes âgées et nécessiteuses.
Mobilisation de prière pour l’Église
Le Custode de Terre sainte, frère Francesco Patton, a de son côté exprimé son vif soutien aux chrétiens de la région, dans un communiqué en date du 2 décembre. Il invite les communautés de Terre sainte et de toutes les églises à prier pour la paix en Syrie, "martyrisée par de longues années de guerre et de violence." Mentionnant l’entrée de l'Église dans l’Avent, il demande que "la parole de Dieu (...) nous invite à garder l'espérance d'une perspective de paix." Et ajoute : "Prenons cette exhortation et prions pour qu'elle se réalise pour nos frères et sœurs syriens."
La Syrie est aujourd’hui morcelée par la guerre civile en plusieurs zones d'influence, où chaque belligérant est soutenu par différentes puissances régionales et internationales. C'est grâce à l'appui militaire de la Russie, de l'Iran et du Hezbollah libanais que le régime syrien avait réussi à inverser le cours de la guerre en 2015, en reprenant une grande partie du territoire. L’année suivante, le régime de Bachar Al-Assad avait repris la totalité d'Alep, dont la partie était occupée depuis 2012 par les rebelles.