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Qui sait, aujourd’hui, ce que furent les zouaves ? Peut-être certains utilisent-ils de temps à autre l’expression "faire le zouave", et encore. Les pitres et les crâneurs ne sont guère désignés de cette manière de nos jours comme ils l’étaient au tournant du XXe siècle. Depuis la conquête de l’Algérie par la France, dans les années 1830, les zouaves font effectivement partie de l’univers culturel hexagonal. Formé à partir d’un mot kabyle désignant une tribu autochtone, le mot désigne originellement des soldats d’infanterie et des régiments français algériens, à côté des tirailleurs. Immortalisé par Van Gogh en 1888, le zouave est aussi, à Paris, le repère officieux du niveau de la Seine puisqu’une statue en a été faite en mémoire de la guerre de Crimée sur une pile du pont de l’Alma. En 1910, pour la fameuse crue centennale, l’eau est ainsi montée jusqu’à ses épaules ! Une telle popularité, outre des hauts faits au combat, doit aussi beaucoup à un uniforme orientalisant : sarouel rouge assorti aux galons de la veste bleu-marine et tarbouche ou chechia, ce chapeau conique, rouge également.
La tenue s’exporte même au-delà des Alpes, et servira d’uniforme à des unités de l’armée pontificale durant les dernières années de son existence. En 1860, Pie IX fait effectivement appel à plusieurs officiers français pour défendre les États pontificaux, notamment le général de Lamoricière et le lieutenant-colonel de Becdelièvre. Tous deux ont servi chez les zouaves au Maghreb, et le second choisit leur habit – avec quelques modifications et la prévalence du bleu – pour que ses hommes supportent la chaleur romaine : les zouaves pontificaux sont nés !
Mais qui sont, au juste, ces soldats ? Au milieu du XIXe siècle, pape est encore à la tête de territoires constitués en 754 grâce à Pépin le Bref. Cependant, l’unité italienne est en cours, et rien ne semble pouvoir l’arrêter. Pour renforcer la petite armée pontificale, des jeunes gens sont recrutés dans les États catholiques. Néerlandais, Belges et Français sont majoritaires, parmi vingt-cinq nationalités. En vain, ils vont tenter de contrer les troupes piémontaises qui veulent faire de la Botte tout entière un seul État.
Dès la bataille de Castelfidardo, les choses commencent mal. Le 18 septembre 1860, les troupes romaines sont décimées dans cette ville des Marches. Le Saint-Siège doit se résoudre à ne conserver que le Latium, autour de Rome. Les combats ont été très meurtriers. Parmi les morts, un certain Joseph-Louis Guérin, séminariste de Nantes de 22 ans, à qui seront par la suite attribués de nombreux miracles. Le reste des zouaves se replie dans la Ville éternelle, alors que l’unité italienne est proclamée le 17 mars 1861. Les volontaires ne seront, jamais plus de 12.000, jusqu’à la dissolution du corps des zouaves en 1870.
Après la contre-offensive valeureuse de Mentana, en 1867, Rome est en effet prise le 20 septembre de cette année. Les Piémontais profitent de la chute de Napoléon III, quelques jours plus tôt, pour pénétrer dans la ville papale. Ils le font grâce à une brèche dans le mur, aujourd’hui dans le jardin de la villa Bonaparte, ambassade de France près le Saint-Siège, proche de la Porta Pia. Pie IX a donné l’ordre de ne pas opposer de résistance pour préserver la vie des Romains et des soldats. Jusqu’à 1929, le pape et ses successeurs se considéreront comme des "prisonniers du Vatican." Les zouaves français, pour leur part, retournent dans leur pays, et, sous la bannière du Sacré-Cœur, défendent la France contre les Prussiens. Ce sera leur dernière guerre.
L’histoire de ces hommes partis défendre les États pontificaux et affublés de l’uniforme et du nom des zouaves n’est pas très actuelle. Elle pourrait même paraître décalée. Elle a pourtant été ressuscitée par les éditions Plein Vent, qui publient une bande-dessinée dont le scénario est de Jean-François Vivier et les illustrations d’Emmanuel Cerisier. À sa lecture, comment ne pas admirer le courage de jeunes gens partis pour une aventure incertaine et parfois fatale ? Surtout, ces pages rappellent que la liberté de l’Église n’est jamais définitive. Si Pie IX voulait garder un pouvoir temporel, c’était bien pour sauvegarder cette liberté, acquise grâce aux Accords du Latran de 1929 et à la création de l’État de la Cité du Vatican, le plus petit du monde. Mais le plus grand par le message qu’il veut annoncer au monde. Et qui ne souffre ni violence ni compromission avec les pouvoirs politiques.
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