Le gouvernement britannique a annonçé le 18 septembre l’entrée en vigueur, ce 31 octobre, de la loi instituant des "zones tampons" autour des établissements d’avortement en Angleterre et au Pays de Galles. Cette nouvelle législation crée une infraction pour une série d’activités dans un périmètre de 150 mètres autour d’un centre d’avortements : prière, présence pacifique de militants pro-vie, distribution de tracts pour aider au discernement… Le but est d’éviter ce qui est compris comme une "influence" ou une "interférence". Heidi Stewart, directrice du British Pregnancy Advisory Service, un organisme de "bienfaisance" britannique qui accompagne les femmes souhaitant avorter, explique ainsi : "Pendant des années, notre personnel et les femmes dont nous nous occupons ont dû supporter des fanatiques anti-avortement debout devant les cliniques pendant des heures […], en les arrêtant à l'extérieur et en leur disant que l'avortement est un meurtre." Pour elle, le texte est "conçu pour remédier aux dommages causés par la soi-disant prière silencieuse" et interdire "toutes les formes de harcèlement".
La réponse de la Conférence des évêques catholiques d’Angleterre et du Pays de Galles a été vigoureuse. Par la voix de son porte-parole, Mgr Sherrington, elle a rappelé que "la liberté religieuse comprend le droit de manifester ses convictions privées en public par le témoignage, la prière et la sensibilisation caritative, y compris les installations d'avortement extérieures", qualifiant la nouvelle loi d’"inutile et disproportionnée" tout en assurant condamner "tout harcèlement et intimidation à l’égard des femmes". L’épiscopat s’inquiète en particulier du "manque de clarté en ce qui concerne la pratique de la prière privée et des offres d’aides" et insiste sur l’aspect discriminatoire pour les croyants d’une telle mesure en citant les mots du pape François : "Un pluralisme religieux sain, qui respecte véritablement les différences et les apprécie en tant que tels, n’implique pas la privatisation des religions dans le but de les réduire à l’obscurité tranquille de la conscience de l’individu ou de les reléguer aux enceintes fermées des églises, des synagogues ou des mosquées."
Du temps passé en présence du Seigneur
Prier silencieusement, est-ce donc un acte de militantisme, une manière de harceler ou d’influencer ? Pour celui qui a l’habitude de l’oraison, une telle question paraît vaine, puisque la prière n’est rien d’autre que du temps passé en présence du Seigneur pour approfondir la relation entre la créature et son Créateur, "comme un ami parle à un ami", dirait saint Ignace de Loyola. Certes, une part de la prière peut consister à confier à Dieu des personnes et des événements, mais de quoi s’agit-il alors ? Le chrétien sait que Dieu agit dans les cœurs et demande au Sauveur d’éclairer la conscience d’un frère ou d’une sœur, croyant ou non. Mais la grâce, si elle précède la nature, ne fait rien sans elle : si une personne a décidé quelque chose et n’écoute pas, volontairement, le fond de son âme, la prière n’aura pas sur elle l’effet attendu. Dans la foi, et mystérieusement, elle en aura cependant un: "demandez, vous obtiendrez", a assuré le Christ.