La vertu de discrétion apporte d’emblée un correctif à la vertu de sincérité présentée hier. La discrétion consiste premièrement à ne pas vouloir tout connaître, deuxièmement à savoir ne pas tout dire. En vacances, on est amené à retrouver de la famille ou des amis que l’on voit rarement pendant l’année. S’intéresser à la vie des uns et des autres est une marque d’affection, mais il est nécessaire de modérer sa curiosité et d’éviter les questions trop intrusives. Certaines personnes sont parfois avides de tout connaître sur des sujets qui ne les concernent pas. Dans une conversation entre amis, on se laisse parfois entraîner sur des terrains trop personnels. Il convient d’être prudent et de ne pas divulguer l’intimité familiale de notre conjoint ou de nos enfants, d’autant plus si les confidents sont susceptibles de faire un mauvais usage de ces informations. Il est tout à fait légitime de ne pas répondre à certaines questions considérées comme trop indiscrètes, et il est nécessaire de mesurer notre curiosité et de détourner la conversation si on sent que l’interlocuteur devient mal à l’aise.
Le propre de la discrétion est de parler avec discernement et délicatesse, de ne pas répéter inconsidérément tout ce que l’on sait, les confidences qu’on a pu recevoir. Savoir garder le silence est le propre de la sagesse. Bien sûr, quand on se retrouve en famille, on est heureux de pouvoir bavarder librement et spontanément, mais cela n’empêche pas une certaine vigilance. Le bon mot d’esprit lancé le soir à l’apéritif ne doit pas se faire au détriment du prochain. La discrétion demande à discerner le vrai du faux dans l’histoire que l’on veut raconter. Dans l’incertitude, il vaut mieux ne pas la raconter, et renoncer à faire rire si ce doit être au détriment de la vérité.
Discrétion et charité
Enfin, la discrétion demande de ne pas dire aux autres ce qui leur causerait inutilement de la peine. Veillons à ne pas faire de peine à une personne qui nous aime, et que nous aimons certainement, même si parfois elle nous agace prodigieusement. Comme tous les ans, cousine Cléonie tient absolument à massacrer Chopin sur le piano familial complètement désaccordé… Faut-il lui dire que son jeu est superbe ? Certes non. Faut-il lui dire qu’elle joue comme un pied ? Pas davantage. Mais on peut glisser que Chopin était un merveilleux compositeur, et fermer discrètement (et rapidement !) le piano avant de passer à un autre sujet de conversation. S’il est nécessaire de rectifier immédiatement le comportement de l’un ou l’autre, commençons d’abord par reconnaître ses qualités, cela nous donnera le temps de faire retomber notre énervement et nous pourrons discuter plus sereinement. Doser la discrétion avec un égal respect de la vérité et de la charité est un art difficile à maîtriser mais qui s’apprend progressivement, surtout si nous nous intéressons sincèrement à notre prochain.
Pratique