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Un bac scientifique en poche, Grégoire de Tarlé s’est lancé, sans trop réfléchir, dans des études prisées qui devaient lui assurer un avenir stable. Une licence de droit, puis un master en ressources humaines en poche, jeune diplômé, il rejoint une grande entreprise française, où il ne reste qu’à peine une année. Avide de trouver un métier incarné, qui ait du sens, il quitte ce poste confortable pour se lancer dans un CAP d’ébénisterie qui le mène à une formation en marqueterie. Fondateur de l’Atelier Bosco, il se confie auprès d'Aleteia sur son étonnante reconversion.
Aleteia : Licence de droit, master de RH, travail en entreprise… Votre CV ne vous destinait pas à l’artisanat. Quand et comment vous êtes-vous lancé dans cette reconversion ?
Grégoire de Tarlé : L’idée d’une reconversion a germé quand j’étais en troisième année de droit en Erasmus, à Rome. J’ai finalement poursuivi mes études, qui me plaisaient, et après l’obtention de mon master de RH, j’ai travaillé à peine un an dans une grande entreprise française. C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que mon métier ne me plaisait pas. J’ai quitté mon poste et j’ai fait des petits stages à droite à gauche dans l’artisanat pour trouver ma voie. C’était en 2017, j’avais 26 ans, j’étais déjà marié et à l’époque, nous avions deux enfants : aujourd’hui nous avons six enfants et l’aîné à sept ans et demi. J’ai rejoint un CAP en ébénisterie en alternance et j’ai enchaîné sur un an de CAP marqueterie en atelier, en Mayenne. J’en ensuite travaillé cinq ans dans ce même atelier, avant un licenciement économique.
Comment est né l’Atelier Bosco ?
Avec ma femme, nous cherchions une icone de la sainte famille qui soit originale et grande. Mes études de marqueterie étant à Paris, j’ai fait le tour des librairies religieuses pour trouver ce que nous cherchions… Et je n’ai rien trouvé ! Je me suis alors mis en tête de la fabriquer moi-même. J’ai posté le résultat sur Instagram et les gens ont tout de suite été très enthousiastes. L’Atelier Bosco, lui, rassemble deux activités : la marqueterie de paille et la restauration de meubles. Aujourd’hui et depuis quelques mois, c’est devenu mon travail à temps plein.
D’où vient ce nom ?
Mon fils aîné s’appelle Bosco. Cette idée de devenir ébéniste m’est venue à Rome : là, j’ai rencontré pour la première fois de ma vie un Bosco qui avait mon âge. J’ai eu un coup de cœur pour ce prénom et j’ai su que mon premier fils s'appellerait ainsi. C’est ma femme qui a pensé à ce nom pour l’atelier. Pour l’anecdote, en plus, bosco signifie bosquet en italien et j’y ai trouvé du sens, puisque je travaille le bois.
L’iconographie religieuse s’est-elle imposée à vous ou avez-vous exploré d’autres champs ?
J’ai commencé avec l’iconographie religieuse mais j’ai aussi essayé le domaine profane avec des cadres floraux, des oiseaux, des poissons tropicaux et des boucles d’oreilles, pour développer mon activité. Le champ religieux me permet d’allier ma foi et mon travail et d’y trouver un sens.
Je ne savais pas si cette voie-là était la bonne, mais je me suis abandonné en laissant Dieu aux commandes pour qu'Il m'envoie là où je serai à ma place.
Comment transmettre le sens de la beauté à vos enfants ?
C’est vrai que quand ils sont très jeunes, c’est assez difficile, mais en général ils passent après l’école dans mon atelier, bien que tous n’y restent pas. Voir les couleurs, les dessins et les motifs leur donne le sens artistique et les aide à développer leur imagination, si ce n’est déjà le goût du beau. En vacances, nous visitons en famille les églises et les cathédrales pour leur montrer les vitraux, les tableaux et les sculptures, mais tout se fait petit à petit.
Avez-vous le sentiment qu’il vous a fallu du courage pour abandonner un métier stable et bien rémunéré pour vous lancer dans l’artisanat ?
C’est ce qu’on me dit souvent, mais je n’ai pas particulièrement eu cette impression. Je me suis surtout laissé guider par cette citation de saint Charles de Foucauld : “Mon Dieu, je m’abandonne à Toi”. Je ne savais pas si cette voie-là était la bonne, mais je me suis abandonné en laissant Dieu aux commandes pour qu'Il m'envoie là où je serai à ma place. Ma femme m’a énormément soutenu, c’est d’ailleurs elle qui m’a convaincu et sans elle, je n’en serais pas là. Financièrement j’avais le filet de sécurité de mon diplôme et du chômage et finalement, comme nous habitons à la campagne, il ne nous faut pas grand chose pour vivre, alors je me suis lancé. Je n’ai pas eu le sentiment de prendre de gros risques. Comme toujours, à la grâce de Dieu !
Quelle est votre plus grande fierté ?
Ma famille, évidemment. Nous avons la grande chance d’avoir des enfants alors qu’autour de nous, beaucoup de couples sont touchés par l’infertilité. Ce n’est pas simple tous les jours et dans la rue, les gens nous regardent avec des yeux écarquillés, mais je suis très fier d’eux et de réussir à les éduquer dans la foi en priant tous les jours pour qu’elle grandisse en eux. La prière quotidienne est un véritable soutien et un rempart. Jésus est une personne vivante au sein de notre foyer, un ami et on peut lui demander ce qu’on veut, même si on n’est pas toujours exaucés comme on le voudrait.
Quelle est la personne vivante que vous admirez le plus ?
Ma femme, bien sûr. Elle était ma meilleure amie et c’était réciproque. Nous habitions tous les deux à Tours et je me suis finalement rendu compte que je ne pouvais pas imaginer ma vie sans la voir tous les jours. Je me suis rendu compte à ce moment-là que l’amitié s’était transformée en amour et cet amour a grandi avec le temps. Elle s’occupe admirablement de nos enfants et de notre foyer, tout en ayant l’énergie de vouloir monter sa propre structure professionnelle. C’est une boule d’énergie très ordonnée, contrairement à moi. Elle est un vrai modèle !
Quelle est la figure spirituelle qui vous inspire le plus ?
Saint Charles de Foucauld, probablement. Son abandon à Dieu est une ligne de conduite !