Écouter le père Xavier Bizard, c’est comprendre que la vie de prêtre n’est pas un long fleuve tranquille et que, comme toute vocation, celle-ci évolue avec le temps, et grâce aux rencontres de la vie, sous le regard de Dieu. Des rencontres, le père Xavier, aujourd'hui âgé de 56 ans, en a fait de nombreuses depuis son ordination pour le diocèse de Tours à l’âge de 33 ans, et après vingt ans passés à l’étranger, en Belgique et en Italie, puis au Brésil et en Colombie. De retour en France, à Lyon cette fois, il raconte dans un livre intitulé Quand l’Amour m’a saisi, sa rencontre foudroyante et décisive avec le Christ à Paray-le-Monial à l’âge de 26 ans et la phrase qu’il reçoit et qui va changer le cours de sa vie : "Voici ce Coeur qui a tant aimé les hommes." Il revient aussi sur sa vocation de prêtre et l’évolution de celle-ci, grâce à ses expériences à l’étranger. Pour lui, sa vie de prêtre a connu différents âges, ce qui lui a permis de grandir et de poser à présent un autre regard sur l’Église et le monde. Avec une certitude, laissez toujours Dieu au centre.
De "bébé prêtre" à "père"
"J’ai commencé comme “bébé prêtre” à l'île Bouchard (Indre-et-Loire), sous le doux regard de Marie, ma mère, qui m’a permis de vivre comme un enfant du ciel", raconte-t-il ainsi à Aleteia. Puis la communauté de l’Emmanuel l'envoie au séminaire de Namur en Belgique, où il va être chargé de la formation des séminaristes. "Ce furent alors des années denses, avec énormément d'activités en tout genre, une sorte d’adolescence dans ma vie de prêtre, où j’étais comme un grand frère." Après un passage de cinq ans à Rome, le père Xavier Bizard est envoyé au Brésil, dans un quartier de favelas, à Salvador de Bahia, où il vit pauvre parmi les pauvres, sans autre mission spécifique que celle du sacerdoce.
"C’est là-bas que j’ai découvert ma mission de “père”, et où j’ai compris pourquoi on appelait ainsi les prêtres", confie encore l’homme quadrilingue (anglais, italien, portugais, espagnol), qui est rentré en France en janvier 2022 après neuf ans au Brésil et un an en Colombie. "Apprendre une langue, vivre dans un climat exotique qui entraîne de la fatigue, découvrir une autre culture et une autre façon de vivre, ce fut aussi un appauvrissement pour moi et pourtant une étape majeure dans la maturation de ma vocation sacerdotale", analyse-t-il à présent.
"Ma vie d’homme et ma vie de foi ont évolué avec toutes ces années, et c’est aujourd’hui que je comprends mieux la force de notre sacerdoce, la nécessité de notre célibat, et l’amour que nous devons partager à ceux qui nous entourent pour faire connaître et faire rayonner l’amour du Christ, celui qui nous guide au quotidien."
Mettre Dieu toujours au centre
De ses années en Amérique du Sud, le père Xavier a également intégré une autre façon de mettre Dieu au centre de sa vie. "Là bas, toute la journée, on se confie à Dieu, on parle de Dieu, dans toutes les phrases du quotidien du matin au soir, “je rends grâce à Dieu pour cette journée”, “à demain si Dieu le veut”, chaque dimanche à la messe on fête les anniversaires pour remercier Dieu de nous accorder une année de plus …" Le prêtre confie ainsi sa frustration, depuis son retour en France, de ne plus entendre parler de Dieu à chaque coin de rue.
Heureusement pour lui, confie-t-il en souriant, il est de retour dans une paroisse populaire à Lyon, dans le 8e arrondissement, où de nombreuses nationalités se côtoient, et avec lesquelles il peut reprendre cette façon de parler. Il a même commencé à instaurer une bénédiction des anniversaires en fin de messe, mais “une fois par mois pour le moment”.
"J’avais un peu oublié en France la façon dont Dieu est tenu éloigné du quotidien, notamment par la sécularisation de la société. Là bas, c’était plus facile à vivre, j’avais l’impression d’être unifié, et je dois encore me retenir pour ne pas dire “Gloire à Dieu” dans les rues de Lyon !" De cette sécularisation, analyse encore le prêtre, Dieu n’est plus au centre, "s’il n’est pas l’auteur de nos vies, alors les vies sont moins sacrées", ce que démontrent les évolutions législatives sur le début ou la fin de vie. "Cela m’attriste beaucoup, tout comme les scandales de pédophilie dans l'Église qui ont provoqué en moi une grande colère." Mais malgré ces blessures et déceptions, le père Xavier l’affirme haut et fort : "Je laisse la main à Dieu, c’est lui qui me comble." Et il souhaite donner un conseil aux jeunes, notamment ceux qui se cherchent ou qui se perdent : "Laissez-vous aimer par le Christ, laissez-vous transformer par lui , c’est ainsi que l’on changera le monde !"
Pratique :