Après la chute, Adam et Eve se trouvent « nus », à traduire par « dans la honte ». Cette émotion les isole l’un de l’autre, comme de Dieu. La honte est un mélange de peur et de dégoût, venant d’un déficit personnel, le péché, d’un défaut du corps ou de l’esprit, « peine et trouble devant des vices, entraînant une perte de réputation », dit Aristote. L’effet de cette émotion est la mésestime de soi, le sentiment d’indignité. Ils se sont jugés par eux-mêmes à la place de Dieu, qui a été attiré par cette honte pour les en délivrer. Dorénavant, ils auront la pudeur pour les protéger et le Seigneur leur fera des pagnes avec beaucoup de compassion.
Dans notre société très voyeuriste, impudique dans la publicité, très démonstrative et exubérante sur l’internet, que la honte nous prenne parfois devant le manque de respect pour l’intimité due à chacun !
La pudeur est protectrice, bénéfique pour soi-même et pour les autres. En effet, elle permet de se respecter soi-même et de respecter l'espace de l'autre. Elle est une question de respect à la fois individuel et mutuel. Cherchons le juste milieu, propre à toute vertu, entre la pudibonderie, pudeur exagérée jusqu’au ridicule et jugeant parfois la sexualité comme impure, et l’indécence ou l’exhibitionnisme qui abîme l’œil. Justement, la pudeur n’est pas la honte du corps - là où il y a de la gêne il n’y pas de plaisir - mais au contraire participe aux joies du désir. En tuant la pudeur et en magnifiant l’impudicité, l’érotisme actuel finit par lasser. Adam et Eve ont retrouvé un rapport digne dans une distance respectueuse de leurs faiblesses réciproques.