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Au secours, Robert (Schuman), revenez-nous !

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Bruno Béthouart - publié le 25/06/21
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L’abstention massive des électeurs lors du premier tour des élections régionales et départementales dit aussi la mésestime des Français pour une politique réduite à la communication et à la défense d’intérêts particuliers. Le retour d’hommes politiques comme Robert Schuman serait bienvenu.

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Encore sous le choc, nous sortons d’un premier tour des élections régionales et départementales fantomatique : la France a-t-elle déjà connu un tel état de déliquescence démocratique depuis la Révolution française ? Au sens propre, le mot « déliquescence » signifie « propriété qu’ont certains corps de se liquéfier en absorbant l’humidité de l'air (du temps) » et au sens figuré : « décadence complète ; perte de la force, de la cohésion » avec comme exemple significatif : civilisation en déliquescence. Revenons d’un mot pour terminer cette définition sur l’intérêt du sens propre : un corps se liquéfie parce qu’il a perdu sa solidité, sa consistance ! 

Un seul grand vainqueur dans cette hécatombe : le parti de l’abstention, celui des « pécheurs à la ligne » qui bordure les 70% d’inscrits ! Un seul vrai vaincu dans ce désastre : la république médiatique, celle qui obéit dans les chaînes de télévision et dans les cercles du pouvoir politique au nouveau gadget à la mode : la déesse « communication » qui n’a d’autre but que de vendre son produit commercial ou idéologique. 

Les uns et les autres obéissent à des groupes d’intérêt, à des clientèles très restreintes qui veulent imposer une dictature des minorités dans une France qui se détache dans une indifférence silencieuse des leviers et des outils de la démocratie. Les Français n’aimeraient-ils plus leur nation pour s’en désintéresser à ce point ! Jadis, les politistes considéraient que les USA étaient, avec 50% de votants, un mauvais élève dans la classe démocratique. Désormais, la France fait beaucoup mieux ! À pratiquer des « coups » politiques légitimés par des sondages téléguidés au nom des valeurs républicaines devenues de plus en plus « liquides », le pays se fracture, se casse « façon puzzle ». 

La conjonction des actions médiatiques de groupes de pression ultra-minoritaires sur les questions sociétales et ultra-libéraux dans le domaine économique et social aboutit à ce sentiment partagé par une majorité de concitoyens d’une absence totale de sens du bien commun et de perspectives d’avenir. Chacun se bat pour sa catégorie, son pré carré, ce qu’il lui reste de ses avantages acquis ou petits privilèges. Comment expliquer autrement l’énormité de la désertion citoyenne, de l’émergence de forces extrémistes à droite comme à gauche si tant que ces mots aient encore un sens depuis l’avènement de la « macronie » ? 

L’homo politicus déjà bien écorné depuis quelques décennies par les frasques de la vie privée des concernés autant que par leur revirement de ligne de conduite, se réduit de plus en plus à n’être au mieux qu’un homo mediaticus balloté par les sondages et les retours d’ascenseur qu’il doit en permanence veiller à mettre en œuvre. Quel contraste avec des personnalités claires, bien charpentées, droites et sereines y compris dans l’adversité telles que celles de Charles de Gaulle ou Robert Schuman.

C’est de ce dernier, d’ailleurs, que vient la seule éclaircie de ce dimanche d’une grande tristesse démocratique : Robert Schuman vient d’être déclaré « vénérable » par l’Église catholique. Quel rapport avec ce qui précède ? C’est tout simple : la condition première d’un retour à une « estime », un respect de la part des compatriotes pour la politique réside dans la mise en avant de figures politiques exemplaires en contraste absolu avec les politiciens prisonniers de groupes de pression et incapables de rectitude personnelle. 

Quelle cohérence dans cet homme entre sa vie privée et ses engagements publics !

Pour avoir le goût du bien commun, il faut d’abord être équilibré, ennemi de l’excès, de toute forme d’ubris, faire sien à l’image de Rabelais dans son Pantagruel, le proverbe de Juvénal :  Mens sana in corpore sano. Or Robert Schuman, de ce point de vue, a donné un exemple d’une cohérence remarquable tant dans son mode de vie simple que dans son respect de la chose publique à tous les niveaux de son implication. Lorrain, il a défendu le caractère propre de la législation de ces « provinces perdues » revenues au bercail ; Français, il a su au temps des périls dramatiques de la Guerre froide prendre les mesures fermes et efficaces pour rétablir les finances et surtout éviter l’arrivée d’un régime communiste en France malgré la double opposition marxiste et gaulliste ; homme des frontières, il ose, avec son ami Jean Monnet, prendre des mesures de réconciliation pour mettre en œuvre la construction européenne. Il l’imagine non pas comme le fruit d’une idéologie, d’un système mais à partir de réalisations concrètes encadrées par une autorité politique dans le respect des identités nationales. Quelle cohérence dans cet homme entre sa vie privée et ses engagements publics ! Quel contraste avec les frasques privées et publiques de trop d’hommes et de femmes responsables politiques depuis quelques décennies ! 

Une société n’a donc que les responsables politiques qu’elle mérite. Il serait grand temps de prendre exemple sur ce modèle de cohérence, de probité, de justesse en politique qui, à l’exemple de Thomas More, n’aurait jamais sacrifié ses convictions personnelles tant religieuses que politiques pour un plat de lentilles ! Catholique convaincu, fervent et ouvert, il a tout simplement voulu mettre en correspondance ses paroles et ses actes au nom d’une conviction qu’il s’est forgée dans une solide formation humaine et chrétienne : la démocratie pour lui et pour encore de nombreux compatriotes ne peut grandir et perdurer qu’en suivant, qu’en respectant les valeurs évangéliques. En ce temps de relativisme, de scepticisme généralisé où ce qui compte est tout sauf le bien commun, que se lèvent de nouveaux Robert Schuman !   

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