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Pierre Amar : “On sera jugé sur notre compassion”

Père Pierre Amar, prêtre du diocèse de Versailles.

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Mathilde de Robien - publié le 27/03/25
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Le père Pierre Amar évoque dans son nouveau livre la compassion, une vertu chrétienne dont lui-même a bénéficié lorsqu’il était malade. Il livre à Aleteia la genèse de sa réflexion : ces six mots qui l’ont apaisé durant sa longue convalescence.

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Une phrase. De six mots. Et c’est cette simple parole, prononcée plusieurs fois par son entourage, qui a réussi à insuffler un sentiment de paix au père Pierre Amar. Prêtre du diocèse de Versailles, connu pour avoir fondé Padreblog avec d’autres prêtres, le père Pierre Amar a été hospitalisé de longs mois, en 2018. Il avait témoigné dans son livre Hors service et auprès d’Aleteia de ce "voyage inattendu au pays de l’abandon et de la fragilité". Dans la continuité de cette expérience, il vient de publier Si tu veux je suis là (Artège), une invitation à mettre un peu plus de compassion dans nos vies.

Aleteia : Comment est né ce désir d’écrire sur la compassion ?
Père Pierre Amar : J’ai mis deux ans pour guérir, grâce à la médecine, et encore deux années supplémentaires pour m’apaiser. Je me suis donc demandé ce qui avait contribué à m’apaiser et j’ai remarqué que c’était cette phrase, récurrente, que mon entourage me répétait souvent : "si tu veux, je suis là". Ce n’étaient pas toujours des personnes très proches, mais elles m’ont manifesté beaucoup de compassion en prononçant cette phrase et en proposant de faire des courses, d’aller au cinéma, de rendre un service, de me reposer chez elles… Et ça m’a fait un bien fou ! Elle m’a profondément apaisé. Je me suis aperçu du pouvoir de cette phrase que tout le monde peut dire ! Pas besoin d’être sœur Emmanuelle ou Mère Teresa !

Pourquoi cette phrase touche-t-elle autant ?
Elle apporte beaucoup dans sa simplicité. On ne s’attend pas, quand on est fragile, à de grandes choses. Et les petits gestes reçus chaque jour marquent beaucoup. Un soir, j’étais dans mon fauteuil de convalescent, fatigué, découragé, un prêtre m’a appelé en me proposant d’aller au cinéma. Cela m’a énormément touché. Je ne me rappelle même pas du film mais le fait que ce confrère me tende la main, cela m’a fait un bien fou. Cela ne demande pas beaucoup de moyens, on peut offrir du temps, de l’attention, du silence… Tout cela signifie : "je suis là, je sais que ce que tu vis n’est pas neutre, je ne peux pas vivre cela à ta place mais je peux et je veux être là, à côté de toi". Dites cela à n’importe quelle personne malade, ou qui souffre de solitude, ou qui est dans la peine, et vous serez surpris de sa réponse.

Certaines personnes paraissent particulièrement douées pour la compassion, d’autres moins, évoquant le fait qu’on ne peut pas prendre sur soi toutes les misères du monde. Pourquoi la compassion est-elle si difficile à mettre en pratique ?
Parce qu’elle nous renvoie à notre propre fragilité, à nos propres peurs, elle nous rend vulnérables. Oui, on entend souvent : "Je ne suis pas Mère Teresa !". Et c’est vrai qu’on n’est pas tous appelé à créer une œuvre de charité mondiale. Mais dans mon immeuble, dans ma rue, au travail, là où je vis, je peux manifester ma compassion, ma présence à ceux qui sont autour de moi. Accueillir toute la misère du monde, je ne saurai pas faire ! Mais dire à mon voisin, à mon conjoint, à mon prochain, "si tu veux je suis là", c’est vraiment à la portée de tout le monde. Jésus n’a pas demandé d’aimer son lointain mais son prochain, celui qui est proche, juste à côté de moi. Ceux qui sont loin, concrètement, je ne peux pas faire grand-chose, mis à part prier bien sûr ou faire un don. En revanche, je peux faire un sourire, ou demander le prénom du sans-abri qui tend la main à la sortie de la messe. Pour les croyants, une image très forte, c’est la Vierge Marie : elle a mérité le titre de la femme la plus compatissante.

Quel est l’enjeu ? Comment la compassion peut-elle "sauver le monde" comme l’affirme le sous-titre de votre livre ?
La compassion permet de nous supporter les uns les autres, au sens anglo-saxon du terme, comme les supporters d’une équipe de foot. On a tous besoin de supporters. Ils donnent une force incroyable. Dans le mariage, cela peut être son conjoint, au travail, des collègues. Personnellement, en tant que prêtre, c’est ma paroisse. Je suis étonné d’être aidé par des gens que je devrais aider ! Les malades que je visite et qui sont au fond de leur lit me donnent de la force. Nous sommes interdépendants les uns des autres. Et la bonne nouvelle, c’est que nous avons chacun un pouvoir sur le bonheur de l’autre. C’est cela l’enjeu.

La compassion est-elle une vertu que le chrétien est appelé à mettre en pratique ?
Oui et Jésus donne l’exemple : le Christ va à la rencontre de toutes les détresses, de toutes les maladies, de toutes les solitudes. Si nous voulons suivre le Christ, nous avons un Évangile très exigeant, celui du jugement dernier, lorsque le Roi place les brebis à sa droite : "J’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire (…). Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait." (Mt 25, 35-40). On sera jugé là-dessus, sur notre compassion les uns envers les autres.

Pratique

Si tu veux je suis là, Pierre Amar, Artège, mars 2025, 14 euros.

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