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Aleteia : Père Bienvenu Kasongo, comment allez-vous, vous et vos paroissiens ?
Père Bienvenu Kasongo : De mon côté, ça va. Mais il n’y a toujours pas d’eau et d’électricité à Mayotte, donc la communication entre nous est très difficile. Nous avons prévu une messe ce dimanche à la paroisse [Notre-Dame de Fatima de Mamoudzou] avec les paroissiens, ce qui va nous permettre de “prendre la température” de chacun, et de savoir comment vont les gens. Cela va nous rassurer. En tout cas, nous devons nous relever, et continuer à vivre. Permettez-moi une petite réflexion personnelle à propos du cyclone qui a ravagé Mayotte. Chido veut dire “miroir” en mahorais. Ce cyclone Chido est venu transformer notre réalité, et je crois qu’il est une occasion, non pas que nous nous regardions nous-mêmes comme un miroir, mais que nous regardions les autres, et que le monde regarde Mayotte. Car il y a ici, à Mayotte, des réalités cachées et de la souffrance, que nous n’avions pas vues et dont il faut nous rendre compte.
Pourriez-vous nous décrire la situation sur place, six jours après le cyclone ?
C’est une “désolation”, ce terme est le bon. Le cyclone Chido a tout ravagé sur son passage, les toitures, les voitures, les arbres fruitiers, l’herbe, tout. Cela a été pour nous un grand moment de détresse et d’inquiétude. Il a notamment frappé des maisons en tôle très précaires, qui étaient cachées dans la forêt, et que nous ne connaissons même pas. À l’heure où je vous parle, nous n’avons pas le bilan exact de la situation, mais il doit y avoir encore des morts sous les décombres. Nous n’avons pas non plus d’eau courante ni d'électricité, et attendons que le gouvernement nous ravitaille. Ça, c’est le plus urgent, car il faut comprendre que sans cela, nous risquons de basculer rapidement dans des épidémies comme le choléra. Il y a, par ailleurs, un risque de banditisme et de vol, donc l’État a décrété un couvre-feu à 22 heures tous les soirs. Concernant l’électricité, nous chargeons pour le moment nos portables grâce aux batteries de nos voitures. Voilà un peu le contexte général, ces jours-ci.
Comment se mobilise l’Église ?
Je vois deux enjeux : la reconstruction de la cité et celle de chaque personne humaine à Mayotte. Concernant la reconstruction [matérielle], l’Église sur place ne peut subvenir à tous les besoins, nous devons collaborer avec l’État. C’est pourquoi nous sommes en contact avec trois associations, Caritas, les Apprentis d’Auteuil et la Société de Saint-Vincent-de-Paul. Nous pouvons servir de points de relais si le gouvernement nous sollicite pour des distributions d’eau et d’électricité. À titre d’exemple, on nous a demandé il y a quelques jours d’héberger des policiers à la paroisse, pour assurer la sécurité de l’archipel. L’église leur a ouvert ses portes. D’un point de vue humain, il y a des personnes ici qui sont traumatisées. Nous souhaitons accompagner tous ceux qui sont fragilisés, à travers un soutien moral, psychologique et spirituel.
Certes, le cyclone nous a frappés, nous sommes à terre, mais la naissance de Jésus symbolise pour nous une nouvelle vie qui va commencer.
Dans ce contexte particulièrement difficile, quel regard portez-vous sur la fête de Noël à venir et la naissance du Christ ?
Les habitants vont vivre ce temps sans maison, à l’image de Jésus qui est lui-même né à l’étable, comme un pauvre, et qui n’avait pas de toit à sa naissance. À Mayotte, Jésus naîtra cette année sous les décombres, avec ce cyclone qui a tout ravagé. Il est cet enfant de Bethléem dépouillé de sa divinité, qui est là pour partager notre condition et vient apprendre à partager. La naissance de Jésus signifie la rénovation. C’est pour nous un appel fort, savoir comment nous allons nous orienter pour nous remettre debout. Certes, le cyclone nous a frappés, nous sommes à terre, mais la naissance de Jésus symbolise pour nous une nouvelle vie qui va commencer.
Quel appel souhaiteriez-vous faire passer au monde ?
Un appel à la solidarité, qui est pour moi primordiale. Le cyclone Chido a frappé toute la population, sans distinction de rang, de personne, sans aucune exception. Je voudrais dire que le Christ vient pour tout le genre humain, tous les frères et sœurs. Donc je crois que lorsqu’un peuple souffre, c’est toute l’humanité qui souffre avec lui. De mon côté, je souhaite prier pour la paix à Mayotte, et la paix partout dans le monde.