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Noël au travail : le merveilleux a-t-il sa place ?

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Illuminations de Noël à Colmar (Alsace).

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Pierre d’Elbée - publié le 19/12/24
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À force d’épurer le monde de l’entreprise de tout émerveillement, n’a-t-on pas vidé le travail de son sens ? s’interroge le consultant en entreprise Pierre d’Elbée. Loin d’être une fuite, le merveilleux peut s’avérer un levier puissant pour éveiller notre créativité et réenchanter nos tâches quotidiennes.

Noël est une période où le merveilleux reprend ses droits. Les églises se préparent à célébrer une Bonne Nouvelle, les rues scintillent, les histoires magiques peuplent les écrans et l’idée d’un monde où tout devient possible — même l’improbable ! — ressurgit sous nos yeux. Mais qu’en est-il du travail, ce domaine souvent perçu comme sérieux, rationnel et exempt de toute fantaisie ? Faut-il reléguer le merveilleux à l’enfance et à la poésie ou, au contraire, en intégrer des fragments dans nos vies professionnelles ? En ce temps de Noël, la question mérite d’être explorée.

Le travail, royaume du rationnel ?

Historiquement, le travail a surtout été pensé comme une activité rationnelle et utilitaire. Depuis la Révolution industrielle, il est mesuré en heures, en rendement, en résultats. Dans ce contexte et avec ses accents de rêve inattendu, le merveilleux semble hors de propos, surtout quand il s’agit de boucler un budget ou de gérer une équipe ! Cette exclusion trouve son fondement dans la Modernité : selon Max Weber, la société s’est désenchantée avec la montée de la rationalisation. Le travail est devenu une sphère où tout doit être logique, prévisible, quantifiable. Or, à force de l’épurer de tout émerveillement, n’a-t-on pas vidé le travail d’une partie de son sens ?

Le merveilleux, source d’inspiration

Le même Weber avait situé le travail capitaliste dans son lien avec ses origines protestantes : le travail est vécu chez les calvinistes non seulement comme un métier, mais comme une vocation (Beruf). Le succès devient dès lors une bénédiction divine, en montrant que le travail peut produire quelque chose de plus grand que l’homme lui-même, un "miracle" collectif qui donne du sens. Il reflète une sorte de magie intérieure, où le travail devient un levier de créativité, d’innovation.

Il existe des lieux où le merveilleux prospère au cœur même du travail. On pense tout de suite à Walt Disney, souvent surnommé "l’usine à rêves". Là-bas, le merveilleux n’est pas un supplément d’âme, il est la matière première des équipes : animateurs, dessinateurs, ingénieurs ou techniciens, sont tous encouragés à voir au-delà du rationnel, à imaginer puis transformer des idées folles en scénarios. Et cela fonctionne ! Mais le merveilleux au travail ne se résume pas à des univers féeriques. Il peut se traduire par notre étonnement face à un projet qui fait rêver, devant sa beauté quand il est achevé, ou par le supplément d’âme qui naît d’une équipe en pleine harmonie. Alors le travail dépasse sa fonction productive pour devenir une expérience humaine exceptionnelle.

Trois pistes pour émerveiller le travail

En période de Noël, certaines entreprises redonnent vie à cette magie, souvent de manière symbolique. Les bureaux s’ornent de décorations, des événements festifs sont organisés et des gestes de générosité envers les salariés ou les clients rappellent que l’entreprise, le bureau, l’atelier peuvent aussi être des espaces de partage et de chaleur humaine. Mais pourquoi ne pas aller plus loin et intégrer cette dimension du merveilleux tout au long de l’année ?

Par exemple, créer un environnement inspirant : laisser place à la créativité et à l’inattendu. Certaines entreprises comme Google par exemple, offrent des temps et des moyens à leurs salariés pour qu’ils s’investissent dans des projets personnels, stimulant ainsi leur capacité à rêver et à innover. Deuxième idée : oser des gestes gratuits : un merci sincère, un encouragement bien placé ou une reconnaissance inattendue peuvent transformer l’expérience du travail en quelque chose de plus humain et mémorable. Troisième piste : raconter des histoires. Bien utilisé, le storytelling peut rendre les objectifs d’une entreprise inspirants et mobilisateurs. Chaque collaborateur devient alors le personnage d’un récit plus grand que lui.

Le merveilleux comme antidote au cynisme

On rétorquera que le merveilleux n’a pas sa place quand il s’agit d’être compétitif. Pourtant, c’est précisément dans ces contextes exigeants que le merveilleux peut jouer un rôle essentiel. Face au burn-out, à la monotonie et à la perte de sens, il offre une bouffée d’air frais. Il rappelle que derrière les chiffres et les procédures, se cachent des rêves, des aspirations et une quête de beauté. Le mot performance n’exprime-t-il pas aussi, au-delà de l’efficacité, une dimension spectaculaire ?

Réenchanter le travail

Comment dès lors exclure de son travail toute référence au merveilleux ? Ne mérite-t-il pas plutôt d’être défendu, non comme un ornement futile, mais comme une force créative ? Loin d’être une fuite, le merveilleux peut s’avérer un levier puissant pour éveiller notre créativité et réenchanter nos tâches quotidiennes en leur donnant une saveur inattendue. Et si, en cette période de Noël, nous nous autorisions à ouvrir cette fenêtre, à ne pas limiter le travail à une sphère de nécessité, mais à déceler en lui l’opportunité de créer, d’innover, de se réjouir et de le partager ? Noël, avec ses lumières et ses enchantements, est peut-être le moment idéal pour commencer ce chemin.

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