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Avec l’Église, nous entrons avec ce premier dimanche de l’Avent, dans une nouvelle année liturgique. Année qui commence plus tôt que l’année civile. Au-delà d’un apanage de calendrier, peut-être y verrons-nous le signe que l’Église se révèle souvent comme un témoin avant-coureur de ce qui survient dans la société des hommes.
Devant ces situations terrifiantes
Comment recevons-nous l’Évangile de ce dimanche ? Y voyons-nous une description cataclysmique de phénomènes lointains, passés ou futurs, qui ne nous concerneront pas directement ? À l’inverse, éprouvons-nous, comme certains, une frayeur maladive à l’annonce des signes extraordinaires dont parle Jésus : troubles cosmiques, confusion des nations, incontrôlable fracassement des mers et des océans ? Reconnaissons-le, bien de ces situations terrifiantes dont parle l’Évangile évoquent ce qu’affronte notre monde aujourd’hui : catastrophes naturelles de grande ampleur, profonds dérèglements climatiques présents et à venir, conflits fratricides et meurtriers, prolifération d’actions terroristes, cela dans un monde qui semble avoir perdu ses repères spirituels et vivrait sans but. Comme si nous connaissions un Black Friday existentiel où ce qui avait encore du prix autrefois, n’en aurait plus aujourd’hui, ne vaudrait presque plus rien.
On comprend qu’un tel monde soit à l’origine de comportements de fuite, d’une culture de l’évasion et de morbides replis sur soi. Ainsi le cœur de beaucoup s’alourdit-il, certains s’abandonnant sans frein aux beuveries, à l’ivresse et à l’oubli que favorise l’usage de toutes sortes de drogues, anciennes et nouvelles, comme la fixation convulsive à des écrans d’ordinateurs ou de téléphones. À trop fixer l’écran, on tombe dans un filet, à l’improviste.
Prononcer le nom de Jésus
Face à ces dérèglements, Jésus nous parle de sa venue à nous aussi, disciples de ce temps. L’espérance qu’il promet surpasse les chaos programmés : le Fils de l’homme viendra dans une nuée, lieu où se révèle la présence divine en même temps qu’elle s’y cache. Les puissances des cieux seront ébranlées mais, plus fortes encore, se révèleront la gloire et la puissance du Fils de l’homme. Jésus invite les disciples, et nous-mêmes avec eux, à ce que le relèvement ne se produise pas sans nous : "Redressez-vous et relevez la tête, dit-il, relevez la tête de vos écrans, car votre rédemption approche" (cf. Lc 21, 28). "Restez éveillés et priez en tout temps pour vous tenir debout devant le Fils de l’homme" (v. 36).
C’est ainsi que dans cet univers bouleversé, Jésus nous invite à secrètement prononcer son nom. Nous, disciples d’aujourd’hui, ne craignons pas de prononcer le nom de Jésus sur ce qui nous entoure ; la nature d’abord : les pierres et les arbres, les fleurs et les fruits, la montagne et la mer, les animaux… Jésus n’a-t-il pas déclaré qu’aucun passereau ne sera oublié du Père (Mt 10, 29) ? Bien plus encore, sur nos frères et sœurs, les hommes et les femmes, ne craignons pas d’appeler le Seigneur. En invoquant le nom de Jésus, nous participons au salut du monde et à la transfiguration des hommes. Nous contribuons à restaurer la part divine qui demeure en chacun. Tous ces gens ordinaires que nous croisons dans la rue, le métro et à notre travail, jusqu’à ceux qui suscitent en nous irritation ou antipathie. Allons à leur rencontre, portant le nom de Jésus dans le cœur et, quand on le peut, sur les lèvres.
La force d’échapper à ce qui doit arriver
En prononçant silencieusement ce nom sur eux, nous appelons Jésus emprisonné au cœur de tout homme et de toute femme pour le libérer, fussent-ils prostituées, bandits ou fauteurs de crimes. En libérant Jésus en eux, nous recevrons avec eux la force d’échapper à ce qui doit arriver pour nous tenir debout, nous aussi, devant le Fils de l’homme. Nous sortirons d’un mode de vie résigné et routinier, en alimentant au long de ce temps de l’Avent des espérances et des rêves pour un avenir nouveau.
Écoutons le pape François. Il dit : "Prier, attendre Jésus, s’ouvrir aux autres, être vigilants, ne pas rester fermés sur nous-mêmes. Car si nous pensons à Noël dans un climat de consommation, à voir ce que je peux acheter pour faire ceci ou cela, de fête mondaine, alors Jésus passera et nous ne le trouverons pas" (Angelus du 2 décembre 2018). Prions, que l’Esprit Saint nous donne "la force d’échapper à ce qui doit arriver, et de se tenir debout devant le Fils de l’homme" (Lc 21, 36).
Lectures du 1er dimanche de l’Avent