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Nous sommes encore loin d’avoir épuisé la nouveauté chrétienne. La Bonne Nouvelle révélée en Jésus Christ n’en est qu’à ses commencements et elle a tant à offrir à l’époque que nous vivons ! Particulièrement à notre société post-moderne dont les dernières évolutions semblent aller toutes dans le même sens : l’individu se pense de plus en plus comme un électron libre, revendiquant des droits sans considération de ce qui le lie aux autres. L’idée même de bien commun devient inaudible tant l’individu se pense comme une monade, sans lien, pouvant se construire lui-même au gré de ses options. C’est à ce monde que la foi chrétienne a quelque chose à dire, elle qui proclame que Dieu a créé l’homme comme un être de relation, un être fait pour la rencontre. Le propre de l’homme dans la perspective chrétienne, c’est de ne pas se construire lui-même, de ne pas exister par lui-même mais toujours par l’autre, par les autres.
La prière est toujours une rencontre
Le retour en force du spirituel depuis quelques années, semble suivre la même pente. De la méditation en pleine conscience au développement personnel, en passant par la pratique du yoga qui n’a jamais eu autant de succès en France : ceux qui s’exercent à ces techniques spirituelles recherchent un état de bien-être et de paix intérieure par la détente du corps et de l’esprit, à développer des émotions positives, etc. Tout cela est très appréciable mais encore très loin de ce qu’est la prière chrétienne. Car la prière n’a rien d’un exercice sur soi-même, d’une connexion avec soi-même ou avec une énergie vitale. Ce qu’il manque à toutes ces pratiques, c’est la rencontre. La prière est toujours une rencontre. Il est vrai que le mot "prière" n’est pas à la mode, et le retour en vogue du spirituel se dit à travers d’autres mots : on parle pudiquement de méditation, de temps spirituel ou de reconnexion. Comme si le mot "prière" touchait trop à notre intime, à ce qui se joue réellement en nous ; comme si évoquer cette rencontre avec l’Autre en nous, nous entraînait trop loin dans ce qui nous échappe et nous dépasse.
Par les autres
Or la révélation chrétienne proclame un Dieu qui vient à notre rencontre. Dieu n’est pas une force anonyme, une énergie aveugle et froide, ni un grand Tout fusionnel mais Il est un être relationnel, un être qui aime, le Dieu de la rencontre. Dans le récit de la Genèse, après la violation de l’interdit fondateur, les premiers mots que Dieu adresse à Adam sont une question : "Où es-tu ?" Ces trois mots sont d’une importance décisive et ils éclairent toute l’Histoire sainte : Dieu se met en quête de l’homme et, inlassablement, il part à sa recherche, à sa rencontre. Et si Dieu part ainsi à la rencontre de l’homme, ce n’est pas dans un geste second et accessoire ; c’est l’être même de Dieu qui se révèle dans cette quête. Pour le dire autrement, il n’est pas contre-nature pour Dieu de partir à la rencontre de l’homme, précisément parce que Dieu est Rencontre. Il n’est même que cela !
En réalité, nous le savons, c’est par les autres que nous advenons à nous-mêmes, ce sont les relations qui nous font.
Nous sommes encore très loin de percevoir tout ce que le mystère de la Trinité nous révèle de Dieu et de l’homme. Père, Fils et Saint-Esprit : Dieu est en lui-même Rencontre et Il l’est de toute éternité. L’illusion de l’homme, c’est de penser que l’individu existerait par lui-même et qu’il pourrait, dans un second temps et de manière accessoire, entrer en relation avec les autres. Comme si la rencontre était accessoire à ce que nous sommes. Mais en Dieu Trinité, nous découvrons que la relation n’est pas secondaire mais première, fondamentale, ontologique. Et puisque sommes créés à Son image, il doit en être de même pour nous. En réalité, nous le savons, c’est par les autres que nous advenons à nous-mêmes, ce sont les relations qui nous font.
Ainsi, dans le plus humain et le plus ordinaire de nos rencontres, nous pouvons reconnaître l’œuvre de Dieu. Car c’est bien Lui qui vient à nous à travers celles et ceux qu’Il met sur notre route. Avons-nous vraiment le poids de ces mots : "Ce que vous avez fait aux plus petits d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait" (Mt 25, 37). Jésus nous appelle à regarder nos frères et sœurs comme autant d’occasions de rencontre avec Lui. À travers chaque visage rencontré, c’est Dieu qui se donne à rencontrer, dans toutes nos quêtes, c’est Dieu qui se laisse trouver, dans tous nos amours, c’est Dieu qui se laisse aimer.
Cette part de nous qui est de Dieu
Car c’est bien Lui que nous cherchons ultimement. Sans le savoir, dans nos relations les plus belles, les plus abouties, c’est toujours plus que l’autre que nous tentons de saisir, que nous visons, que nous désirons rejoindre. C’est toujours cette part divine en l’autre, la fine pointe de l’âme que nous cherchons. Ce que nous évoquons à travers des expressions comme le "cœur à cœur" ou le fait "d’être en communion", disent que la relation que nous recherchons avec l’être aimé se joue dans cette part de nous qui est de Dieu. Et lorsque la rencontre se vit à ce niveau-là, c’est bien Dieu en l’autre que nous rencontrons. Et ainsi, de rencontre en rencontre, Dieu nous prépare peu à peu à La Rencontre, l’ultime Rencontre…
Voilà la Bonne Nouvelle qu’il nous faut continuer d’annoncer lorsque l’individu se mure dans l’illusion de n’exister que par lui-même. Voilà le trésor que l’Évangile porte au monde pour le sauver de cet enfermement. Parce qu’Il est le Dieu de la Rencontre, Il nous libère de nous-mêmes et c’est ainsi qu’il nous sauve !
Pratique