separateurCreated with Sketch.

États-Unis : “Le rejet du logiciel d’idées démocrate redessine le vote religieux”

Donald-Trump-midterms-063_1244598915

L'ancien président Donald Trump lors d'un meeting dans l'Ohio, le 7 novembre 2022.

whatsappfacebooktwitter-xemailnative
Clémence Nava - publié le 07/11/24
whatsappfacebooktwitter-xemailnative
Élu 47e président des États-Unis, Donald Trump a capté une partie du suffrage catholique supérieure aux deux précédentes élections. Blandine Chélini-Pont, professeure d'histoire contemporaine et relations internationales à l'Université d'Aix-Marseille, décrypte les spécificités du vote catholique à l’issue de ce scrutin historique.

Pour qu'Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l'avenir d'Aleteia deviendra aussi le vôtre.

Je donne en 3 clics

*don déductible de l'impôt sur le revenu

56% des suffrages pour Donald Trump contre 41% pour Kamala Harris. Les premiers chiffres indiquent que l’électorat catholique américain a soutenu plus nettement le candidat républicain dans les urnes qu’en 2020 et en 2016. Plus qu’un simple vote d’adhésion à Donald Trump, c’est aussi l’expression notable du rejet d’un ensemble idéologique promu par le parti démocrate. Selon Blandine Chélini-Pont, professeur d’histoire contemporaine et spécialiste du vote religieux aux États-Unis, certaines des constantes jusqu’alors observées au sein de l’électorat religieux américain se sont trouvées bouleversées par l’élection de novembre 2024. 

Aleteia : Comment interprétez-vous les premiers résultats du vote catholique à l’issue de l'élection présidentielle américaine ?
Blandine Chélini-Pont : Les analystes s'y attendaient, mais l’écart est plus important que ce qui avait été pronostiqué dans les sondages. Les catholiques américains, toutes communautés confondues, ont voté pour le candidat vainqueur entre 2004 et 2016. En 2020, Donald Trump et Joe Biden, pourtant ouvertement catholique, étaient dans un mouchoir de poche auprès des électeurs catholiques. En amont des Midterms de 2022, plusieurs enquêtes ont montré la poursuite du recul démocrate chez les catholiques notamment dans les États charnières de l’Arizona, la Géorgie, le Nevada et la Pennsylvanie, remportés de justesse par Joe Biden en 2020 et à ce jour, perdus ou estimés comme tels par Kamala Harris. À la veille de l’élection de 2024, les intentions de vote pour la candidate démocrate au sein de l’électorat catholique avaient encore diminué, se situant à 47% en septembre, d’après un sondage du Pew Research Center, contre 52% pour Trump. 

La division "raciale" de l'électorat religieux [...] s'estompe face à un même rejet des préférences démocrates pas tant pour le droit à l'avortement que pour la promotion des droits LGBTQ.

L’idée dominante était que les catholiques conservateurs blancs, pratiquants, issus des classes supérieures, feraient grimper les chiffres en faveur du parti républicain car on sait que ce segment vote majoritairement républicain (à hauteur de 60%) depuis les années 1980. Par conséquent, soit ce segment a encore plus voté pour Donald Trump à l’élection de novembre 2024, soit d'autres segments catholiques, les milieux ouvriers de la Rust Belt mais également les catholiques d'origine non-européenne, ont aussi voté pour le Républicain. Ce qui serait une révolution. La division "raciale" de l'électorat religieux est une constante sociologique depuis au moins les années 1980. Elle est en train de s'estomper face à un même rejet des préférences démocrates pas tant pour le droit à l'avortement que pour la promotion des droits LGBTQ. Cette question est en train de redessiner les paramètres du vote religieux entre ceux qui l'acceptent et ceux qui la rejettent.

Peut-on parler de vote d’adhésion à Donald Trump de la part de l'électorat catholique ?
Une partie de cet électorat se retrouve dans le discours décliniste de Donald Trump, d'un pays envahi par une immigration incontrôlée, aux racines chrétiennes méprisées et qui doit retrouver son identité. Mais cette fraction, que l’on pourrait qualifier de national-identitaire, n'est pas majoritaire. Le vote Trump symbolise surtout le fait que les catholiques sont en recul : ils sont très atteints par la sécularisation, la fin de la pratique régulière et d'autres phénomènes qui ont concouru à la baisse de leur poids démographique (- 4 points en 15 ans). Ceux qui restent et qui se considèrent comme catholiques sont moins ouverts, dirait-on, que les générations précédentes. Il y a un phénomène de re-catholicisation intégrale qui profite aussi de l'influence à la fois nouvelle et très forte des "ultras" sur les réseaux numériques. 

Cette préférence plus marquée que lors des deux précédentes élections pour le candidat républicain pourrait-elle s’inscrire dans le temps ?
Oui, si les démocrates ne changent pas de logiciel quant aux idées prétendument rassembleuses qu'ils mettent en avant. D'un côté, ils semblent favoriser toutes les exagérations de la culture woke et de l'autre, ils ne semblent pas se battre pour ce qui a fait et continuerait de faire leur force auprès de l'électorat catholique : la protection sociale, la justice sociale, l'économie décarbonée, l'éducation de qualité, l'intégration des immigrés (très souvent de culture catholique), la pacification internationale, le multilatéralisme, le désarmement... 

Vous avez aimé cet article et souhaitez en savoir plus ?

Recevez Aleteia chaque jour dans votre boite e−mail, c’est gratuit !

Aleteia vit grâce à vos dons

Permettez-nous de poursuivre notre mission de partage chrétien de l'information et de belles histoires en nous soutenant.