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Êtes-vous menacé par le syndrome de l’imposteur ?

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Pierre d’Elbée - publié le 16/10/24
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Le syndrome de l’imposteur, c’est ce sentiment tenace d’illégitimité que l’on éprouve quand on ne se croit jamais digne d’être à sa place, notamment au travail. Contre cette crainte tenace, le consultant en entreprise Pierre d’Elbée évoque le premier remède : mieux se connaître.

En 1978, les psychologues Pauline Clance et Suzanne Imes observent que de nombreuses femmes se sentent illégitimes dans leurs fonctions et doutent de leurs compétences malgré des réussites académiques ou professionnelles indiscutables. Elles attribuent volontiers leurs succès à la chance ou à des facteurs externes, plutôt qu’à leurs propres efforts et aptitudes. Depuis, l’expression est reconnue dans tous les secteurs professionnels et concerne autant les femmes que les hommes : la personne atteinte de ce syndrome craint constamment d’être "démasquée". Sa santé mentale (un sujet brûlant aujourd’hui) et sa performance au travail peuvent en être affectées.

Dans un monde du travail formaté par la performance et la compétitivité, le syndrome de l’imposteur est largement amplifié, notamment dans les environnements de travail où les attentes élevées mettent le salarié sous pression pour éprouver sa valeur. Plus l’évaluation de ses compétences s’éloigne de critères objectifs, plus il peut douter de sa légitimité. Et le management en fait partie. Le perfectionnisme est une attitude qui alimente ce syndrome : les personnes compensent leur sentiment d’illégitimité par un travail acharné. Leur insatisfaction persistante devant des résultats pourtant valables, les pousse à refuser toute reconnaissance ou promotion dont elles ne se sentent pas dignes… Le burn-out n’est pas loin !

Mieux se connaître

Dans son Éthique à Nicomaque, Aristote a conscience de ce syndrome qu’il décrit de la façon suivante : "L’homme craintif en effet, bien qu’il soit digne de certains avantages, se prive lui-même de ce qu’il mérite et il a l’air d’avoir à se reprocher quelque chose de mal, dès lors qu’il ne se juge pas digne de ces biens-là. Par ailleurs, il donne aussi l’impression de ne pas se connaître lui-même. Car il aspirerait, sinon, à ce qu’il mérite, puisque ce sont des biens qu’il mérite !" Bien des salariés gagneraient à méditer ces remarques d’Aristote pour dépasser le sentiment tenace d’illégitimité dont ils n’arrivent pas à se débarrasser. Savoir ce que l’on vaut, être confirmé par des tiers, faire un travail sur soi-même pour détruire l’autodénigrement, tels sont en effet les premiers pas d’une juste connaissance de soi.

Apprendre à accueillir des retours positifs sans les dénigrer est une étape essentielle pour surmonter le syndrome de l’imposteur.

Mais ce n’est pas suffisant : devant les témoignages de leurs pairs qui reconnaissent leurs compétences et leurs capacités, les personnes atteintes de ce syndrome considèrent tout simplement qu’on les surestime. Réfractaires à un discours objectif, elles refusent de tirer profit d’un jugement qui leur serait favorable. On le voit, le problème est celui de la confiance en soi, qui consiste d’abord à savoir ce dont on est capable, et ensuite à l’accepter. 

Travailler sa confiance en soi

Pourquoi donc s’interdire de reconnaître sa propre compétence ? Quelque chose, en effet, empêche d’accéder à la vérité sur soi-même, de la reconnaître, et d’en tirer de la fierté, du plaisir. On peut en situer l’origine dans l’éducation, la culture de la performance, la compétition, le stress, la volonté de bien faire, etc. Si une attitude libératrice consiste à sortir du repli craintif lié au jugement négatif sur soi, la difficulté est d’accepter sincèrement un jugement à la fois positif et réaliste, de le rendre prépondérant dans le champ de sa conscience. Il y a là un véritable travail à faire, généralement avec un tiers. 

Accepter les compliments

Apprendre à accueillir des retours positifs sans les dénigrer est une étape essentielle pour surmonter le syndrome de l’imposteur. Bien distinguer les témoignages véridiques des retours polis et aimables adressés par "gentillesse" : les premiers renvoient une image de soi plus fidèle et nuancée que le jugement négatif que l’on s’impose durement. Accepter la justesse d’un compliment sans y rechercher de certitude est une voie difficile, mais libératrice. 

On évoque rarement la dimension éthique du syndrome de l’imposteur, et encore moins la magnanimité : pourtant, c’est elle qui fortifie l’esprit contre le découragement, et le pousse à poursuivre ce qui est grand d’une manière appropriée. Savoir que l’on sert quelque chose de plus grand que soi, avec générosité et conviction, est une façon élégante de sortir de soi, de sa peur viscérale de ne pas être à la hauteur. Qu’importe son propre jugement sur ses capacités : il y a une chose dont on est sûr, c’est que ce que l’on fait en vaut la peine. 

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