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Que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? Comme il nous ressemble, cet homme qui accourt vers Jésus et tombe à ses genoux. Un jeune homme, précisera Matthieu dans son Évangile. Le jeune homme riche. Il est riche à bien des égards et il a organisé sa vie selon ses richesses. Il est riche de grands biens au point que ces biens lui feront renoncer même à Jésus, car il ne souhaitera pas se séparer de ses possessions. Il en deviendra sombre et tout triste.
Jésus lui rappelle les commandements et le jeune homme répond, non sans aplomb, qu’il les a tous observés. Il a coché toutes les cases.
Plus encore, il est riche de ses vertus : il n’a commis ni meurtre ni adultère ni vol ; ni non plus porté de faux témoignages, ni fait tort à quiconque ; il a honoré père et mère. Riche de biens, riche de vertus, on dirait aujourd’hui que c’est le gendre parfait. Cependant, il vient trouver Jésus car il éprouve un ineffable sentiment que malgré toutes ses richesses matérielles et morales, quelque chose de fondamental lui manque encore : en plus de tous ces biens, il cherche à avoir davantage, plus encore, autre chose : avoir, posséder la vie éternelle comme on possède un héritage. Voilà pourquoi il vient trouver Jésus. Alors Jésus lui rappelle les commandements et le jeune homme répond, non sans aplomb, qu’il les a tous observés. Il a coché toutes les cases et il serait donc en droit d’entendre Jésus lui dire : Bravo ! Tu auras la vie éternelle. Et ce n’est pas ce qui se passe.
Remarquons-le, dans l’énumération des commandements, Jésus n’a pas cité celui qu’il présentera pourtant comme le premier d’entre eux : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute tes forces ; tu aimeras ton prochain comme toi-même. Aimer, Jésus n’a pas cité ce commandement qui récapitule pourtant tous les autres. Jésus n’en a pas parlé parce que Jésus l’a accompli : Jésus porta son regard sur cet homme, et il l’aima.
La vie éternelle ne se possède pas
Ainsi, ni les biens matériels ni les vertus morales n’obtiennent d’avoir la vie éternelle en héritage. La vie éternelle ne s’obtient pas, elle ne se possède pas. Il nous est impossible de l’avoir ; Jésus nous demande d’y entrer. Il en indique le chemin à ce jeune homme, ce qui lui manque encore, l’unique nécessaire : Va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres ; puis viens, suis-moi. Ce qui lui manque encore, c’est de manquer.
L’homme riche était seul avec ses richesses, seul avec ses vertus, seul à vouloir gagner la vie éternelle. Mais Jésus l’invite à le suivre. Le jeune homme riche était accouru et tombé aux genoux de Jésus, il lui avait demandé : Que dois-je faire ? Le lépreux lui aussi était venu auprès de Jésus et avait supplié en tombant à ses genoux : Si tu le veux, tu peux me purifier (Mc 1,40). Le riche dit : Je. Le lépreux, Tu. Le riche s’en va tout triste ; le lépreux purifié, lui, proclame la Bonne Nouvelle. Le pharisien monté au Temple disait : Je te rends grâce, je ne suis pas comme les autres hommes. Le publicain demandait : Toi, montre-toi favorable. Le second est devenu juste ; pas le premier.
Jésus en échec ?
Écoutons encore ce que dit le Seigneur : Une seule chose te manque. Une seule chose ? Pourtant, Jésus en demande plus d’une, et même beaucoup : aller, vendre, donner, venir et le suivre. Jusque-là, le jeune homme n’avait fait qu’acquérir, Jésus maintenant lui demande d’accueillir. Il comprend qu’il lui manque encore beaucoup et qu’il n’en est qu’au début d’un chemin de renoncement à tout ce qui n’est pas l’amour de Jésus. L’amour nous manquera toujours pour entrer dans le Royaume.
Le jeune homme riche s’est éloigné tout triste, une tristesse probablement bien moindre que celle de Jésus le voyant s’éloigner.
Manquerons-nous, nous aussi, l’appel de Jésus qui pose sur chacun son regard en aimant ? Entendrons-nous son appel ? Tiendrons-nous Jésus en échec ? Dieu s’est fait si fragile en nous aimant qu’il nous a rendus capables de le faire trébucher. Jésus connaîtra cet échec cinglant qui le conduira jusqu’au calvaire. Le jeune homme riche s’est éloigné tout triste, une tristesse probablement bien moindre que celle de Jésus le voyant s’éloigner. Jésus lui a donné son amour. L’homme n’a vu que ses richesses. N’attendons pas, mettons-nous à la suite de Jésus : allons, vendons ce que nous avons, donnons-le aux pauvres, venons à Jésus et suivons-le. Avec lui, nous passerons du difficile à l’impossible. Déjà en ce temps, nous recevrons au centuple ; et bientôt, la vie éternelle.
Lectures du 28e dimanche du temps ordinaire :