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Les derniers jours d’août, le premiers jours de septembre sont un de ces rares moments de l’année où le temps qu’il fait rejoint le temps qui passe : chronos et kairos se rencontrent. Les premières brumes du matin, le ciel un peu plus pâle, le soleil qui tarde à se lever, l’odeur de terre mouillée, la mélancolie des horizons montrent que si l’été n’est pas encore fini, les vacances, elles, vivent leur temps additionnel. L’été est un culte du présent quand la rentrée est le temps des promesses. Qui allons-nous rencontrer cette année ? Et quel livre ? Et quel imprévu ? Et quelle catastrophe ? Et quelle grâce ?
Septembre et la vieillesse
Espérer, c’est se risquer. La rentrée est le temps du risque. L’éternité joyeuse des étés de nos enfances luit faiblement dans nos mémoires. Le bonheur d’une enfance trop heureuse est pour l’adulte une écharde dans la chair, quand approchent à la fois septembre et la vieillesse. La vieillesse… Comme le dit quelque part C.S. Lewis, le bien et le mal, quand ils sont accomplis, deviennent rétroactifs. Pour l’homme sauvé qui entre dans la joie de son Sauveur, tout son passé terrestre, même le plus douloureux, devient une introduction du ciel, un morceau du Paradis. Mais pour le méchant qui refuse le ciel, toute la vie terrestre, même les moments du plus grand plaisir, même les profondes joies, deviennent une préparation à l’enfer.
Quelle prétention que de vouloir expliquer l’intolérable ! La Chute, la Liberté, cette rhétorique n’a jamais consolé personne. Le mal est un mystère que rien n’explique.
Le premier dira à son Seigneur : je n’ai jamais vécu ailleurs qu’au ciel. Et le second : toute ma vie fut un enfer. La Christ dira au premier : pourtant sur la terre, tu auras connu comme moi la souffrance, l’injustice, le mensonge, la trahison, tu n’auras cessé de m’appeler au secours. Le racheté répondra : cette souffrance, ces mensonges, cette injustice et ces trahisons étaient déjà le ciel puisqu’ils m’y préparaient. Au second, le Christ ne dira rien et le second se taira aussi, car l’enfer est un lieu où l’on ne se parle pas.
Nos songes tourmentés
Au moment où les premières brumes de septembre nous plongent dans une périlleuse mélancolie, le règne du mal vient tourmenter nos songes. Les Jeux olympiques sont finis, Alain Delon est mort, la politique se rappelle à nous, elle est triste, et partout la haine reprend du service, partout le mal roule des mécaniques. Le scandale du mal, il y a belle lurette que j’ai renoncé à le comprendre. Quelle prétention que de vouloir expliquer l’intolérable ! La Chute, la Liberté, cette rhétorique n’a jamais consolé personne. Le mal est un mystère que rien n’explique. Je ne cherche plus à comprendre : je pose ma tête sur la poitrine de mon Seigneur. Il murmure à mon oreille : "Je suis là." C’est déjà le ciel.