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Ses personnages sont joyeux, colorés, ils dansent, chantent et sautent dans tous les sens. Claire S2C, c’est la joie vibrante qui contraste avec un monde où parfois, tout semble gris, c’est l’espérance dans ce qu’elle a de plus lumineux. Claire, c’est un sourire vissé au visage sous un rouge-à-lèvres qu’elle choisit toujours rouge, c’est une voix grave qui esquisse souvent un éclat de rire prêt à déborder, c’est un peu l’amie que toutes les femmes rêveraient d’avoir.
Aleteia : Qui est Claire S2C ? Comment en êtes-vous arrivée là ?
Claire Sallé de Chou : Je suis illustratrice depuis onze ans, j’ai 41 ans, je suis mariée et mère d’une fille merveilleuse, Bertille. Au tout début de ma carrière, j’ai travaillé dans le marché de l’art, avant de bifurquer dans le dessin. J’ai étudié à l’école Estienne, avant de tenter l'illustration. On m’a alors dit que je ne serai jamais illustratrice de ma vie (rires), donc j’ai basculé vers le design d’espace dans une école d’arts appliqués, puis dans une école de négoce de l’art. J’ai travaillé un an à Londres, puis trois ans chez Artprice, une plateforme en ligne dédiée au marché de l’art. J’ai rejoint pendant un an le milieu de la mode, avant de faire un burn-out. Nous étions mariés depuis un an et je me suis posé la question : “qu’est-ce qui, dans un monde merveilleux où les factures n’existent pas, me ferait vibrer ?”. Et le dessin s’est imposé à moi. J’ai quitté mon travail et je me suis lancée. J’ai eu beaucoup de chance car j’ai commencé à en vivre assez rapidement.
Dans quelle famille avez-vous grandi ?
Très classique : je suis la dernière d’une fratrie de quatre, j’ai trois grands-frères. Je viens d’une famille catho-pratiquante, un peu clichée. Je n’ai pas vécu de conversion incroyable, j’ai été élevée dans la foi, même si je m’en suis éloignée un peu avant d’y revenir. Je rêve toujours de vivre de grands moments avec le bon Dieu à chaque fois que je vais à Paray-le-Monial, genre tomber dans le repos de l’Esprit dans une église (rire). Ce n’est jamais arrivé, mais je pense que le Seigneur sait qu’il n’a pas besoin de ça avec moi ! Ma foi est devenue personnelle à l’adolescence, comme beaucoup.
Un peu comme dans La Mélodie du Bonheur, je me suis dit que quand Dieu ferme une porte, Il ouvre une fenêtre !
Et votre mari ?
Nous nous sommes rencontrés dans un bar, avec des potes, j’avais 26 ans et lui, un an de moins. Ça a tout de suite bien marché et ça a été une affaire rondement menée : on s’est très vite mis ensemble, au bout d’un an, nous nous sommes fiancés puis un an plus tard, nous étions mariés. Aujourd’hui, il est directeur adjoint commercial d’une société qui s’occupe de l’étude des sols.
Cela a-t-il été difficile de quitter votre métier pour vous lancer dans l’illustration ?
Non, pas tellement, je n’en pouvais plus et j’ai réalisé que changer de métier était devenu une nécessité quasi-vitale, puisqu’il n’y a aucun travail au monde qui mérite qu’on lui sacrifie sa santé mentale et physique. Un peu comme dans La Mélodie du Bonheur, je me suis dit que quand Dieu ferme une porte, Il ouvre une fenêtre ! Quand on est à son compte, il y a nécessairement une part d’abandon. À l’époque, pourtant, je n’étais pas aussi sûre de ma foi parce que je gardais un souvenir assez traumatisant d’un échange avec une religieuse que j’avais rencontrée, plus jeune, et qui m’avait pas mal éloignée de Dieu.
Racontez-nous.
J’avais 19 ans, j’étais à un CEP (une formation destinée aux chefs dans le scoutisme, équivalent BAFA ndlr) chez des religieuses. Sortie de nulle part, l’une d’entre elles m’a dit, alors que je ne la connaissais ni d’Ève, ni d’Adam et que je ne lui avais jamais parlé : “Toi, tu seras religieuse plus tard”. Je m’étais déjà un peu posé la question, un peu comme quand, face à une amitié très forte avec un garçon, une jeune fille se demande s’il n’y avait pas plus derrière. Quand j’ai répondu à cette religieuse que je n’en avais pas envie, elle a rétorqué que c’étaient souvent celles qui n’en avaient pas envie qui le devenaient. J’ai trouvé cette intrusion hyper violente. C’est mal tombé, à un moment où j’étais un peu fragile, et cela a tout faussé, comme si un messager divin était venu me dicter ce que je devais faire. À cause de ça, et pour ne pas entendre parler de vocation ou me sentir obligée de faire quelque chose que je ne voulais pas faire, je me suis éloignée de l’Église.
Quel est votre rapport à la foi aujourd’hui ?
Elle fait partie de ma vie au même titre que mon mari et ma fille. Je parle de Jésus dans mes dessins comme je parle de mon mari, en disant qu’il est beau et merveilleux !
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Vous avez beaucoup parlé de l’infertilité et de l’infertilité secondaire : a-t-elle changé quelque chose dans votre rapport à la maternité ?
Je me voyais avec plusieurs enfants, bien sûr, mais j’ai reçu cette grâce d’apprécier ce que j’ai au lieu de pleurer ce que je n’ai pas. Bertille est née cinq ans après notre mariage, et l’infertilité m’a permis de me rendre compte de la chance infinie que nous avons d’avoir notre fille. Les épreuves, souvent, donnent une saveur particulière à la joie et je ne suis pas dans le regret permanent de ne pas avoir eu d’autres enfants, même si ça m’arrive parfois d’avoir de la peine. L’espérance sera comblée à un moment donné, si ce n’est pas dans cette vie, ce sera dans l’autre ! La grâce c’est de vivre un carpe diem, un “je n’ai rien qu’aujourd’hui”, comme dans cette très belle prière de soeur Odette Prévost : “Vis le jour d’aujourd’hui, Dieu te le donne, il est à toi. Vis le en Lui. Le jour de demain est à Dieu, Il ne t’appartient pas. Ne porte pas sur demain le souci d’aujourd’hui. Demain est à Dieu, remets-le Lui. Le moment présent est une frêle passerelle. Si tu le charges des regrets d’hier, de l’inquiétude de demain, la passerelle cède et tu perds pied. Le passé ? Dieu le pardonne. L’avenir ? Dieu le donne. Vis le jour d’aujourd’hui en communion avec Lui. Et s’il y a lieu de t’inquiéter pour un être aimé, regarde-le dans la Lumière du Christ ressuscité.”
L’espérance sera comblée à un moment donné, si ce n’est pas dans cette vie, ce sera dans l’autre !
Pour vos dessins, où puisez-vous votre inspiration ?
Dans tout ce que je trouve beau ! Dans ma vie personnelle, dans la nature, dans l’art… Je regarde beaucoup ce que font les autres artistes, pas pour copier, mais pour m’en inspirer, car regarder forge le regard, on puise un style, une couleur, une ambiance, pour se l’approprier et le faire sien.
Quelle est votre plus grande fierté ?
Ma fille et mon mari. Quand mon mari me dit : “ah, le boulot, c’est usant”, je lui réponds toujours : “imagine-toi le jour de ta mort, qu’est-ce qui comptera à ce moment-là ?”. On ne pensera pas à sa carrière, ni à son compte en banque, mais à ceux qu’on a aimés et par qui on aura été aimé. Finalement, la seule chose qui compte, c’est l’amour.
Quel est l’artiste qui vous inspire le plus ?
Dans la peinture, William Turner, qui parvenait à faire passer des émotions juste par la couleur. Dans son œuvre, tout est vaporeux, suggéré : son talent est tel qu’il passe outre la figuration. Dans les modernes, j’aime beaucoup le travail de Margaux Motin, qui est toujours restée à sa place d’artiste dans un monde où l’art est très politisé.
Quelle est la figure spirituelle qui vous inspire le plus ?
Ah ! Vaste question ! Il y en a plein ! J’ai mes chouchous du ciel, donc si je devais choisir, je dirais le saint curé d’Ars et Don Bosco, pour leur abandon total en Dieu. Quand Saint Jean Bosco construisait des établissements pour accueillir les jeunes de la rue, il n’avait jamais les fonds nécessaires pour poursuivre les travaux : au jour le jour, il s’en remettait à Dieu et chaque soir, ce dont il avait besoin le lendemain lui était donné providentiellement. Le saint curé d’Ars, lui, était très pauvre mais avait à cœur d’avoir les plus beaux ornements pour son église, en répétant toujours que rien n’est trop beau pour le bon Dieu ! Ça tranche avec les églises modernes où tout est assez moche… Le beau m’aide vraiment à prier. Et puis, il était tellement saint que le diable lui-même venait l’embêter. J’ai encore du chemin : moi, il suffit qu’il ait un carré de chocolat et ce n’est pas très compliqué de me faire tomber !
Quelle est la personne vivante qui vous inspire le plus ?
Il y a tant de personnes tellement inspirantes… Spontanément, je dirais les personnes que j’aime, comme ma maman. Quand je me suis éloignée de la foi, elle ne m’a jamais embêtée, mais je suis persuadée que j’y suis revenue parce qu’elle a prié pour moi tous les jours. Je suis convaincue de la force de la prière des parents et surtout des mamans. Elle m’a aimée et guidée, avec ses défauts et ses qualités et maintenant que je suis moi aussi devenue mère, je ne peux que me rendre compte de cette chance incroyable que j’ai et que j’ai eue d’être aimée à ce point-là.