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Les dernières heures édifiantes de la vie d’Ayrton Senna

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Toru YAMANAKA / AFP

Le pilote brésilien de Formule 1 Ayrton Senna, le 17 avril 1994.

Cécile Thévenin - publié le 02/05/24

Le 1er mai 1994, sur le circuit d’Imola (San Marin), Ayrton Seyna se tuait au volant de sa Williams-Renault dans la courbe de Tamburello. Une mort tragique qui, trente après, prend une dimension spirituelle pour certains quand on s'intéresse aux derniers gestes qu'il a posé.

La mort bouleversante le 1er mai 1994 du triple champion du monde de Formule 1, Ayrton Senna, aimé de son peuple et des amateurs de sport automobile du monde entier, a créé un mythe. Mais au-delà de cette fin tragique, sa mort fut digne de l’homme de foi qu’il était. Aujourd’hui, on peut mieux contempler la main de la Providence dans la justesse des derniers gestes qu’il a posés.

L’écrivain Frédéric Lecomte-Dieu narre ainsi la pieuse et ultime journée du pilote : “Dans son stand Senna est seul. Il se concentre. Comme à son habitude, il médite. Voit, revoit chaque virage. Puis, il prie, ‘je crois en Jésus, fils de Dieu…’ Les mains jointes. Personne n’ose le déranger. Il laisse sa bible au paddock, saisit un petit drapeau aux couleurs de l’Autriche, ‘je vais le montrer au monde à la fin de la course’”. Il prévoit ainsi de rendre hommage à Roland Ratzenberger, le pilote autrichien décédé la veille sur ce même circuit, par une victoire. Il ne sait pas encore que ce sont ses ultimes gestes. Ayrton Senna partira en pole-position de ce grand prix fatal.

Une foi communicative

Depuis plusieurs années, il est réputé dans le milieu de la Formule 1 que la foi habite intensément Ayrton Senna, jusque dans sa façon de vivre son sport. Sans que cela plaise forcément d’ailleurs. “Quand vous parlez de religion, c’est un point sensible, confiait le champion. Il est très facile d’être mal compris… Mais je m’efforce – autant que je le peux – de comprendre la vie à travers Dieu. Et cela signifie tous les jours de ma vie – pas seulement quand je suis à la maison, mais aussi quand je fais mon travail”. Le journaliste sportif Lionel Froissart estime qu’Ayrton senna “a eu le courage de parler de sa croyance en Dieu et expliquer qu’il lisait la Bible”. 

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Ayrton Senna, le 1er mai 1994, avant le départ du Grand prix de San Marin, à Immola.

Pour montrer à quel point cette expression publique de religion fut critiquée, le journaliste fait dire à Ayrton Senna dans son roman L’Icône immolée (En Exergue Éditions) raconté à la première personne : “J’eus la faiblesse d’évoquer ma foi qui m’aidait à distinguer le bien du mal. Je compris vite que ce n’est pas le genre de pensées que les habitués des paddocks de la Formule 1 étaient prêts à entendre et à comprendre. Je fus raillé pour ça aussi. Senna le mystique ! Senna l’habité ! Senna qui se croit immortel et protégé de Dieu ! Combien de fois ai-je entendu ça ?” “Ils’’ n’avaient rien compris.” Si Dieu existait, la foi d’Ayrton Senna aurait-elle dû le protéger en ce jour funeste ? Ayrton Senna avait de manière prémonitoire répondu à ses détracteurs, qui déformaient son approche spirituelle : “Le fait que je croie en Dieu, que j’ai foi en Dieu, ne me rend pas immortel, ne m’immunise pas, comme cela a pu être dit. J’ai autant peur que n’importe qui de me blesser”. 

Les fruits altruistes de sa mort

Alors, pourquoi Dieu ne protège-t-Il pas ses fidèles ? Quelle ironie pour celui qui priait à côté des secouristes s’occupant de son camarade Martin Donnelly très gravement blessé ou se précipitait pour sauver le pilote Erik Comas accidenté sur la piste ! Et si ce n’était plutôt la fécondité du grain du blé qui tombe en terre ? Car ce qui est sûr, c’est que sa mort sauva d’autres vies, en renforçant les règles de sécurité pour limiter de nouveaux accidents. 

C’est ce qui frappe le journaliste Basile Davoine en ce 30e anniversaire de sa mort : “Le 1er mai 1994 est aussi l’acte de naissance de la sécurité telle qu’on la définit encore en sport automobile aujourd’hui, celle du ‘Plus jamais ça’. Celle qui a sauvé tant de vies, jusqu’à ce que la fatalité frappe de nouveau, à Suzuka vingt ans plus tard [et le décès du Français Jules Bianchi]”. C’est d’ailleurs en adéquation avec l’engagement pour la sécurité des pilotes qui préoccupait Ayrton Senna de son vivant, de la même manière que le souhait qu’il a exprimé à sa sœur deux mois avant sa mort de créer une fondation pour aider les enfants du Brésil s’est concrétisé avec l’Instituto Ayrton Senna, actif depuis novembre 1994.

Une réconciliation publique comme acte final

Surtout, les Français sont émus par des mots d’affection qui furent inopinément enregistrés, scellant sa paix avec Alain Prost, eux dont l’opposition fut l’une des plus légendaires de l’histoire du sport : lors d’un tour d’entraînement la veille, Ayrton Senna s’adresse à celui qui fut son coéquipier et son grand ennemi : “Avant de commencer, un bonjour spécial à mon… à notre ami Alain. Tu nous manques à tous, Alain !”. Le journaliste belge Pierre Van Vliet se souvient de la réaction d’Alain Prost, jeune retraité devenu consultant télé : “On lui a fait entendre le fameux message et il en fut bouleversé. ‘Il faut que j’aille lui parler…’ Prost partit chez Williams et discuta longuement avec Senna dans le motorhome. Avant le départ, dans le garage, ils échangèrent encore quelques mots, les derniers.”

L’ancien rival se déplacera au Brésil pour porter le cercueil d’Ayrton Senna quatre jours plus tard. Il dévoile 30 ans après à Jacques Vendroux sur Europe1 : “Il ne se passe pas une journée sans qu’on me parle d’Ayrton. Au quotidien, j’ai des messages de Brésiliens absolument tous les jours. C’est ma plus grosse communauté sur les réseaux sociaux et là, je vois à quel point il a marqué les gens. Les fans qui soutenaient Senna m’ont soutenu aussi indirectement.”

Préparé à rencontrer Dieu

Dans ces circonstances, la mort d’Ayrton Senna sera celle d’un champion, et elle sera le témoignage d’un chrétien, en montrant que le pardon dépasse les murs de haine. En ce week-end terrible marqué par les accidents graves, il a les larmes aux yeux quand il vient voir son compatriote Rubens Barrichello, transporté inconscient à l’hôpital, il a pleuré sur l’épaule de son ami médecin Sid Watkins à l’annonce de la mort de Ratzenberger ; il n’est donc pas impossible que le Ciel ne lui ait fait goûter l’intuition de l’imminence de sa propre mort.

Sa sœur Viviane révéla plus tard le cadeau qu’il reçut après ces journées où il fut si tourmenté : “Ce matin-là, quand il s’est réveillé, il a demandé à Dieu de lui parler. Il a ouvert la Bible et a lu un texte qui disait que Dieu allait lui donner le plus grand de tous les dons : Dieu Lui-même.” A celui qu’il est allé retrouver quelques heures plus tard, si jeune, le Brésilien dédie son épitaphe : sur sa tombe à Sao Paulo, autour de laquelle la ferveur populaire ne s’est pas éteinte, une phrase : “Rien ne peut me séparer de l’amour de Dieu”.

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BrésilFoiSport
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