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Fin de vie : un débat est-il envisageable à l’Assemblée nationale?

PALAIS BOURBON
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Agnès Pinard Legry - publié le 18/04/24
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L’Assemblée nationale a constitué une commission spéciale chargée d’examiner la loi sur l'aide à mourir avant son arrivée en séance publique le 27 mai. Sa composition laisse perplexe sur la possibilité d'un débat équilibré.

Le gouvernement ne souhaite décidément pas perdre de temps sur la fin de vie. À peine le projet de loi présenté en conseil des ministres mercredi 10 avril matin que, quelques heures après, une commission spéciale chargée d’examiner le texte était constituée à l’Assemblée. Les postes de rapporteur général, de président de la commission et ceux des quatre rapporteurs thématiques ont été répartis par le biais d’un vote. Et le résultat a de quoi inquiéter les opposants au texte. "Un député m'a dit : "n'attendez rien de la commission spéciale fin de vie". De fait, le déséquilibre de sa composition déteint sur son programme d'auditions, qui pousse jusqu'à mettre en avant de vraies impostures. Ainsi va la vie parlementaire dans ses pires illustrations", a ainsi réagi sur X l’avocat et bénévole en soins palliatifs Erwan Le Morhedec.

Députée Horizons de Seine-Maritime, ancienne ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de la santé, puis ancienne ministre de la Santé, Agnès Firmin Le Bodo en est la présidente. C’est elle qui était en charge du sujet de la fin de vie jusqu’au 11 janvier et avait ainsi rédigé la glaçante première version du projet de loi qui avait suscité une véritable levée de boucliers. "Ce qui importe, c’est que la possibilité encadrée de bénéficier d’une aide active à mourir devienne effective", avait-elle déclaré en mai 2023 dans une interview au JDD. Cette pharmacienne de profession va devoir veiller au bon déroulement des travaux de la commission.

Un pro-euthanasie comme rapporteur

C’est un militant de longue date d’une aide active à mourir qui a été choisi au poste-clé de rapporteur général. Olivier Falorni, député MoDem de Charente-Maritime, était déjà présent dans tous les groupes de l’Assemblée nationale sur la fin de vie, présidant la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti de 2016 mais aussi le groupe d’études sur la fin de vie. Il est également l’auteur de deux propositions de loi pour "une fin de vie libre et choisie". À ce poste, il aura la charge de rapprocher les points de vue au sein, notamment, de son camp. "Je sais par expérience l’importance de cette fonction et l’exigence qu’elle requiert", a-t-il réagi sur X après le vote. "Je l’exercerai avec gravité, responsabilité et détermination afin d’œuvrer à la construction d’une grande loi républicaine de progrès et d’humanité, que tant de Français attendent." Une utilisation du mot "humanité" qui, comme pour Emmanuel Macron déclarant que ce projet de loi est "une révolution d’humanité et de fraternité", fait bondir les évêques de France.

Le rapporteur général sera assisté par trois rapporteurs thématiques issus du groupe Renaissance. Députée de l’Hérault et médecin gériatre à l’Institut du cancer de Montpellier, Laurence Cristol supervisera la partie sur la procédure d’ "aide à mourir". Elle s’est d’ores et déjà prononcée sur le texte affirmant être « totalement en phase". "Il est équilibré, et a du sens", a-t-elle déclarée. Députée de la 2e circonscription d’Ille-et-Vilaine, Laurence Maillart-Méhaignerie s’occupera de la partie sur la définition et les conditions de "l’aide à mourir". "A l’instar de nos pays voisins et frontaliers comme la Belgique, l’Autriche ou le Portugal, nous avons la volonté de faire évoluer le cadre législatif avec une loi de libre choix, encadrée et respectueuse de tous, soignants et patients", s’était-elle réjouie lors de sa nomination. Enfin, Didier Martin sera en charge des soins palliatifs.

Un quatrième rapporteur appartenant à l’opposition, la députée LFI Caroline Fiat, sera chargée de la clause de conscience et des outils de contrôle et d’évaluation. La députée avait déjà déposé un texte visant à légaliser l’euthanasie. En février 2024, elle avait ainsi interpellé le gouvernement en le pressant de légiférer rapidement sur l’aide à mourir : "Nos concitoyens n’ont pas le temps, leurs souffrances n’ont pas le temps, leur peur de ne pas pouvoir choisir leur mort n’a pas le temps. Pendant que vous reportez indéfiniment, il y a des histoires de vie douloureuses que vos errements ne pourront jamais réparer. Il y a urgence."

Des membres pour contrebalancer les débats ?

Parmi les autres élus de la commission se trouvent les quatre vice-présidents : la socialiste Marie-Noëlle Battistel, le député LR Patrick Hetzel, le député Renaissance Jean-François Rousset, et Laurent Panifous du groupe indépendant LIOT. Certaines personnalités comme Patrick Hetzel, le député LR de Meurthe-et-Moselle Thibault Bazin ou encore Philippe Juvin, médecin et député LR des Hauts-de-Seine, pourraient bien néanmoins contrebalancer les débats. La présence dans cette commission de Pierre Dharréville, député PCF-NUPES des Bouches-du-Rhône, promet également d’intéressants échanges. Il avait cosigné en mars 2023 une tribune avec Claire Fourcade, médecin et présidente de la société française d'accompagnement des soins palliatifs (SFAP), exprimant leur attachement à la loi Claeys-Leonetti, qui légifère sur la fin de la vie en France.

La Commission a désormais une semaine, du 22 au 30 avril, pour mener à bien ses auditions. La première est prévue lundi 22 avec Catherine Vautrin, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités. Elle sera suivie de celle du président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) Jean-François Delfraissy, ainsi que de Régis Aubry et Alain Claeys, co-rapporteurs de l’avis n° 139 "Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité" (2022). Le débat s'ouvrira ensuite en séance à l'Assemblée le 27 mai.

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