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Comment faire aimer Dieu à son enfant ? L’exemple d’Anne-Gabrielle Caron

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Famille Caron

Morgane Afif - publié le 15/02/24

Alors que la phase diocésaine de la procédure de béatification d'Anne-Gabrielle Caron est en cours, Aleteia a interrogé Marie-Dauphine Caron, sa mère, pour lui poser cette question qui habite de nombreux parents : "Comment faire aimer Dieu à son enfant ?"

Devant la mer, au large, une petite fille sourit. Elle est belle, avec son cardigan fuchsia et son col Claudine. Son regard est clair, lumineux, et son sourire rayonne pour dévoiler ses jolies dents d’enfant. Sur sa tête, un fichu rayé cache la chevelure qu’elle a perdue. Devant les flots, sur le rivage, le soleil qui l’inonde ne l’éblouit pas, comme cette lumière du Ciel qu’elle contemple dans son cœur et qui l’éclaire et l’anime. La petite fille s’appelle Anne-Gabrielle. Elle a 8 ans et, au moment de cette photo, elle va bientôt mourir.

Placer le bon Dieu au centre de sa vie

Marie-Dauphine Caron décroche le téléphone. Sa voix, douce et assurée, est celle d’une maman qui a élevé cinq enfants. Avec franchise et délicatesse, elle se confie : “Vous savez, je n’étais pas très à l’aise avec l’idée de cette interview quand on m’a dit que vous vouliez intituler l’article ‘Comment faire aimer Dieu à son enfant ? Les conseils des parents d’Anne-Gabrielle Caron’. Je ne voudrais surtout pas qu’on m’attribue un rôle que je n’ai pas eu, et je suis la première à être dépassée par tout ce qu’il s’est passé”. C’est le postulateur de la cause en béatification d’Anne-Gabrielle qui l’a convaincue. “Je ne veux surtout pas qu’on puisse penser que je présume des conclusions du procès. Si je dis que j’ai souhaité avoir des enfants qui seraient des saints, c’est parce que je suis convaincue que nous avons été créés pour Dieu, pour être auprès de Lui. C’est cela, être saint, cela ne relève pas d’un orgueil mal placé”.

Comment ne pas penser à Anne-Gabrielle sans songer à Anne de Guigné, une autre petite fille, morte cent ans plus tôt ? “Bien sûr, Anne de Guigné était un modèle pour Anne-Gabrielle, qui a été très marquée par sa vie”, souligne Marie-Dauphine Caron. Quand elle était enceinte d’Anne, Antoinette de Guigné a eu à cœur de vivre l’exemplarité qu’elle souhaitait pour sa fille. “Pour moi, les grossesses n’ont jamais été de grands moments, j’ai toujours été assez malade, explique Marie-Dauphine Caron. Je me souviens en revanche, lorsque je suis tombée enceinte d’Anne-Gabrielle, avoir eu en tête une idée qui m’a suivie tout au long de ma grossesse. La mère d’Anne de Guigné s’est dit qu’elle devait être très proche du bon Dieu ; moi, j’ai eu très peur que le monde n’abîme mon enfant si pure et si innocente. Cette inquiétude, je l’ai ressentie lors des grossesses suivantes, bien sûr, mais de manière atténuée”. 

Si je dis que j’ai souhaité avoir des enfants qui seraient des saints, c’est parce que je suis convaincue que nous avons été créés pour Dieu, pour être auprès de Lui. C’est cela, être saint, cela ne relève pas d’un orgueil mal placé.

Dans la famille Caron, “le bon Dieu est une personne. Ni mon mari, ni moi n’avons grandi dans la peur de l’enfer, mais dans la peur de faire de la peine au bon Dieu. C’est ce que nous avons enseigné à Anne-Gabrielle : le Seigneur est quelqu’un qui nous aime, en qui on peut avoir confiance et à qui il faut faire plaisir”. Comment ? “On offre tout, on donne tout. L’offrande, ainsi, a transcendé la maladie d’Anne-Gabrielle car elle lui a donné du sens. Déjà petite, Anne-Gabrielle avait pris l’habitude comme sainte Thérèse de Lisieux d’offrir des sacrifices par amour, pour, disait-elle, ‘enlever des épines de la couronne de Jésus’.”

Toujours dire la vérité à ses enfants

Très jeune, dès trois ans, Anne-Gabrielle se pose des questions existentielles sur l’éternité, le sens de la souffrance ou la mort des petits enfants. “Nous étions démunis face à ces questions qui nous dépassaient, alors même que nous avions nous-mêmes été très catéchisés”, estime Marie-Dauphine Caron, qui a suivi sa scolarité chez les Dominicaines du Saint-Esprit, connues pour la formation très solide qu’elles dispensent à leurs étudiantes. “Il est important de catéchiser ses enfants pour les nourrir intellectuellement en plaçant Dieu au cœur de nos conversations”. Pour répondre aux inquiétudes de sa fille, Marie-Dauphine puise dans deux livres : Maman parle-moi du bon Dieu etMaman ne me quitte pas

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Au fil de la conversation, Marie-Dauphine Caron se souvient avec émotion de ces longs échanges avec sa fille et des questions qu’Anne-Gabrielle lui posait. “Il faut toujours dire la vérité aux enfants, même sur le petit Jésus qui apporte les jouets à Noël. Je me souviens d’un livre qui parlait d’un petit enfant à qui l’on avait raconté cette histoire et qui avait demandé à un prêtre si on n’allait pas lui dire aussi, plus tard, que le fait que Jésus soit dans l’hostie n’était pas aussi juste une belle histoire, comme celle des cadeaux à Noël. Quand Anne-Gabrielle nous posait des questions, si elles n’étaient pas de son âge, je lui répondais ‘Tu es trop petite pour le savoir, je te dirais plus tard’, car j’ai toujours refusé de lui dire quelque chose de faux”. C’est au prix de la douleur, parfois, que se révèle la vérité de laquelle naît la confiance absolue qu’Anne-Gabrielle porte à son père et à sa mère. Quand une petite fille de huit ans qui aime la vie demande à ses parents, la voix déchirée par la peur et le chagrin, si elle va mourir, l’angoisse est à son faîte, insupportable, sans la grâce qui permet de l’assumer. “Un moment effroyable, se souvient Marie-Dauphine Caron, mais il fallait le faire. Le soir de ce jour où je lui ai dit qu’elle allait mourir, Anne-Gabrielle m’a expliqué : ‘c’est que j’ai eu très peur. Maintenant j’ai un peu moins peur, parce que je me dis que si je meurs, je serai avec le bon Dieu’.”

Quand Anne-Gabrielle nous posait des questions, si elles n’étaient pas de son âge, je lui répondais “Tu es trop petite pour le savoir, je te dirais plus tard”, car j’ai toujours refusé de lui dire quelque chose de faux.

Entretenir l’esprit d’enfance chez l’enfant

Professeur de l’Éducation nationale dans l’enseignement public, Marie-Dauphine Caron connaît bien cette jeunesse désœuvrée qui a perdu l’espérance. “On veut faire croire aux enfants que ce qui est bien est mal et réciproquement. Bien sûr, en tant que parents, nous avons fait des erreurs, avec Anne-Gabrielle comme avec chacun de nos enfants et je crois qu’il faut le reconnaître et demander pardon à ses enfants”. De cet amour naît la confiance. “C’est l’esprit d’enfance : si l’enfant comprend que Dieu est un père, il aura alors absolument confiance en lui. Anne-Gabrielle avait cette simplicité dans sa prière lorsqu’elle disait : ‘mon Dieu, j’accepte tout ce que vous me demandez, mais n’en faites pas trop quand même’. Comme un enfant, elle demandait et elle obéissait toujours”. 

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“Nous avons toujours voulu faire comprendre aux enfants que le bon Dieu est une personne et que l’amour de Dieu doit se vivre concrètement à la maison. Cela passait, pour nous, par la formation catéchétique et la prière. Je le vivais concrètement avec Anne-Gabrielle puisqu’au début de mon mariage, j’allais à la messe tous les jours”, reprend Marie-Dauphine Caron. “J’en avais le temps puisque j’avais pris un congé parental et nous habitions à côté d’une église. J’y allais avec elle, puis je restais au chapelet et j’étais ainsi certaine d’avoir consacré au moins une demi heure de mon temps au bon Dieu”. Passer devant une église, depuis, impose d’aller saluer Jésus, ne serait-ce que par une génuflexion. C’est avec la certitude que Jésus repose dans le tabernacle que grandit Anne-Gabrielle, en qui ne cesse de croître un amour de Dieu très incarné. 

Savourer les joies simples de la vie de famille

“Anne-Gabrielle avait un tempérament très fort derrière sa timidité, comme le feu qui couve sous la cendre”, sourit Marie-Dauphine Caron. “Elle aimait beaucoup ce que nous faisions en famille, comme jouer aux cartes, faire de la bicyclette, se déguiser, cuisiner, faire des gâteaux, regarder les histoires du Père Castor en DVD, lire, dessiner et faire ce qu’elle appelait ses petits bricolages. Elle a aussi complètement adhéré à l’esprit scout quand elle a rejoint les louvettes, esprit qu’elle partageait avec son père qui est resté lui-même scout dans l’âme”. Dans la famille Caron, la joie s’incarne et se vit chaque jour dans la simplicité de la vie quotidienne. “Je ne peux cependant pas tout à fait dire qu’Anne-Gabrielle était une petite fille comme les autres”, estime sa mère au regard des interrogations existentielles qui habitent sa fille depuis toute petite. “Quand on donne les clefs au bon Dieu, on ne peut que bien faire les choses, souligne Marie-Dauphine Caron. C’est alors Lui qui agit en nous : c’est exactement la même chose pour l’éducation des enfants.”

Quand on donne les clefs au bon Dieu, on ne peut que bien faire les choses. C’est alors Lui qui agit en nous : c’est exactement la même chose pour l’éducation des enfants.

À l’annonce de l’effroyable diagnostic, scandale de la souffrance dans le cœur d’un père et d’une mère qui s’apprêtent à ensevelir leur fille, Marie-Dauphine et Alexandre Caron décident “de tout mettre en œuvre pour qu’elle meure saintement”. “Bien sûr nous avons demandé un miracle, mais nous nous sommes aussi rendus compte que les enfants ne nous appartiennent pas, qu’ils nous sont confiés et que nous n’en sommes que les dépositaires”. Au terme d’un long et précieux échange, Marie-Dauphine Caron conclut, dans la lumière de cette espérance douloureuse d’une maman qui a perdu son enfant : “Les enfants, vous savez, ont parfois une approche mystique de la vie éternelle… Ils ne sont pas très loin du Ciel.”

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