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À Bahreïn, le Pape retrouve ses “frères” al-Tayeb et Bartholomée

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Hugues Lefèvre - publié le 04/11/22
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Le Royaume de Bahreïn a été le lieu vendredi 4 novembre de retrouvailles entre le pape François et deux responsables religieux qui comptent particulièrement dans le pontificat de l'Argentin : le patriarche œcuménique de Constantinople, Bartholomée, et le grand imam d'al-Azhar, Amed el-Tayeb ; deux personnalités qui incarnent la réussite du rapprochement entre l'Eglise catholique et une partie du monde orthodoxe et musulman.

"Tu as été courageux aujourd'hui lorsque tu as parlé de dialogue entre les musulmans". Dans la résidence papale du palais royal d'al-Sakhir, au cœur de Bahreïn, le pape François a retrouvé son "frère" al-Tayeb pour la sixième fois en cinq ans, à l'occasion d'un échange privé dont ont filtré quelques bribes. Un peu plus tôt dans la matinée, le leader sunnite avait pris la parole lors du Forum de Bahreïn pour appeler ses "frères chiites" à mettre de côté "les conflits anciens et modernes" et entamer un "dialogue pour la fraternité islamique".

Entre le Pape et l'imam, une relation d'estime et de confiance s'est nouée ces dernières années. Loin d'avoir été un point d'arrivée, la fameuse déclaration d'Abou Dabi sur la Fraternité humaine signée en 2019 aux Emirats arabes unis continue de porter des fruits. Dans son discours prononcé en fin d'après-midi sur le seuil de la mosquée d'al-Sakhir, le pape a d'ailleurs confié que les rencontres et le dialogue étaient un "oxygène" dont les responsables religieux devaient abuser afin que les fidèles de diverses religions puissent à leur tour "coexister, s’accueillir et s’estimer mutuellement".

C'est en 2016 que les deux hommes se sont rencontrés la première fois, au Vatican, grâce notamment à l'intermédiaire de la communauté Sant’Egidio, organisation laïque catholique engagée dans le dialogue interreligieux et la diplomatie. Dans une décennie marquée par le terrorisme islamique et le risque d'un choc entre islam et christianisme, les deux "frères" ont pris le parti de s'unir en affirmant que Dieu est incompatible avec la violence et qu'il n'est dès lors pas possible de l'instrumentaliser.

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"Dieu a placé ces deux hommes épris de paix à la tête des deux plus grandes institutions religieuses du monde", écrit le juge Muhammad Abdulsalam, le bras droit de l'imam, dans un livre* récent sur l'histoire de leur relation. Un ouvrage qui rappelle par ailleurs qu'un des fruits concret de ce rapprochement historique entre un pape et un des plus hauts dignitaires de l'islam fut la rédaction de l'encyclique Fratelli tutti'. "Je me suis particulièrement senti encouragé par le grand imam Ahmad al-Tayyeb", peut-on ainsi lire dès les premières lignes du Pape.

Une prière oecuménique

Quelques minutes après avoir quitté l'imam al-Tayyeb sur le seuil de la mosquée d'al-Sakhir, le pape François a rejoint un autre "frère". Dans la toute nouvelle cathédrale Notre-Dame d'Arabie, construite sur un terrain cédé par le roi de Bahreïn et inaugurée l'an passé, le pape a été accueilli par des centaines de chrétiens pour une rencontre œcuménique et de prière pour la paix.

Dans le chœur de la deuxième plus grande église de la Péninsule arabique l'attendaient plusieurs chefs d'Églises chrétiennes, dont le patriarche œcuménique de Constantinople, Bartholomée. Sous des applaudissements nourris des fidèles, le pape François a salué le responsable orthodoxe en embrassant sa croix pectorale. A son tour, le patriarche de 82 ans a embrassé celle portée par le Pape. Sans doute a-t-il alors remarqué que le pontife avait fait le choix de porter spécialement une croix pectorale qu'il lui avait offerte lors d'une précédente rencontre ; le signe d'une relation fraternelle étroite.

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Depuis son élection sur le trône de Pierre en 2013, François a rencontré une quinzaine de fois le patriarche orthodoxe. Et si l'imam al-Tayeb a inspiré Fratelli tutti' au pape, ce dernier doit beaucoup à son frère orthodoxe pour la rédaction de Laudato Si, son encyclique sur l'environnement, un thème sur lequel le patriarche "a attiré l’attention sur les racines éthiques et spirituelles des problèmes", peut-on y lire.

Actuellement en rupture avec le patriarche de Moscou notamment en raison de la guerre en Ukraine, le patriarche de Constantinople est contesté dans le monde orthodoxe et il n’exerce sa juridiction que sur un troupeau symbolique de quelques milliers de fidèles, essentiellement des membres de la communauté grecque de Turquie. Mais son amitié avec le “pape de Rome” garde une dimension prophétique qui manifeste le lien indéfectible entre Orient et Occident, les deux poumons du christianisme.

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*  Il papa e il grande imam, Il percorso spinoso, Mohammad Abdulsalam, préfaces du pape François et du professeur Ahmad al-Tayyeb, San Paolo, 2021.

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