Le dimanche 6 décembre 1932, dans la petite église Saint-Nicolas à Bielsko-Biala, au sud de la Pologne, un garçon de douze ans reste immobile alors qu’il se dresse juste derrière un cercueil. Entouré par son père Karol et sa tante Stefania, il est abîmé dans la douleur. Le drame qui le frappe si brutalement, c’est la perte d’Edmund, son grand frère adoré. Âgé seulement de 26 ans, il est mort subitement deux jours auparavant. L’église est bondée, tout le personnel de l’hôpital où Edmund travaillait comme médecin est présent pour lui rendre le dernier hommage. Quelques semaines auparavant, une jeune femme, Rozalia a été amenée à son hôpital. Le docteur Wojtyla, spécialiste des maladies infectieuses, lui a diagnostiqué la scarlatine. Il avait alors décidé de s’en occuper personnellement. Comme le décrit Milena Kindziuk dans son livre biographique Edmund Wojtyla, brat swietego Jana Pawla II (Edmund Wojtyla, le frère du saint Jean Paul II), Edmund avait veillé sur elle jour et nuit, en lui administrant lui-même des médicaments et les injections.
Hélas, les symptômes n’avaient qu'empiré. Le matin du 25 novembre, la jeune femme n’avait pas survécu. Quelques jours plus tard, Edmund avait contracté la même maladie. Le 4 décembre, il mourait à son tour après avoir reçu le sacrement de l’onction des
malades.
Edmund, le frère qui a façonné le futur saint
La mort d’Edmund a affecté profondément le jeune Karol, peut-être plus que celle de sa mère, à la fois "en raison des circonstances tragiques" et aussi en raison de sa "plus grande maturité à l'époque". C’est ce qu’il a expliqué des années plus tard, dans un entretien avec André Frossard. Cette confidence dévoile à quel point le lien fraternel qui unissait Edmund et Karol était fort, sans doute, de façon assez exceptionnelle. L’auteur de la biographie d’Edmund, révèle que c’est lui qui a emmené le petit Karol à sa première randonnée en montagne. C’est aussi lui qui l'a emmené aux spectacles de son groupe de théâtre dans lesquels il jouait. C’est enfin lui qui a emmené son frère cadet sur le terrain de football : Edmund jouait avec ses amis, il confiait à Karol le poste de gardien de but, l'endroit le plus sûr.
Jean Paul II a évoqué plusieurs fois son admiration pour son grand frère. Il a souligné qu’Edmund l’impressionnait par sa grande foi, celle grâce à laquelle, il prit des risques pour sa propre vie.
Après la mort de leur mère, Edmund s'était senti tellement responsable de son frère qu'il avait reporté son propre mariage pour pouvoir s'en occuper encore quelque temps. Et quand, jeune médecin, il a commencé à travailler à l’hôpital de Bielsko-Biala, Karol, accompagné de son père, lui rendait visite tous les dimanches. Des années plus tard, Jean Paul II a évoqué plusieurs fois tous ces souvenirs comme les moments les plus heureux de sa vie. Il a aussi souligné qu’Edmund l’impressionnait par sa grande foi, celle grâce à laquelle, il prit des risques pour sa vie. C’est peut-être la plus belle leçon que le jeune garçon a reçu de son grand frère : celle du don de sa propre vie pour sauver la jeune Rozalia malade.
Une manière simple de vivre la vocation à la sainteté qui a sans doute influencé le futur pape Jean Paul II, celui qui, au cours de son pontificat, a canonisé des saints ordinaires en grand nombre.