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Le pape François présente ses excuses aux sœurs de Pontcalec

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I.Media - publié le 29/01/22
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Dans une lettre envoyée aux sœurs dominicaines du Saint-Esprit le 23 décembre 2021, le pape François assure avoir suivi de "très près" la situation de l’Institut qui connaît de vives tensions depuis 2013. Il présente par ailleurs ses excuses pour les "défaillances" dans l’accompagnement de la communauté par la Curie romaine.

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Six mois après la polémique suscitée par le rejet de la supplique d’une sœur de Pontcalec (Morbihan), mère Marie Ferréol, et son renvoi définitif de la vie religieuse, le pape François a pris la plume pour clarifier un certain nombre d’éléments concernant cet institut traditionaliste fondé à Pontcalec en 1943, qui compte aujourd’hui une centaine de sœurs et qui dirige cinq établissements scolaires hors-contrat en France. 

Sa lettre, que l’agence I.Media a pu consulter et qui a été lue aux sœurs dans la soirée du 28 janvier 2022, vient conclure une visite apostolique confiée en juin 2020 au cardinal Marc Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques, et effectuée par deux visiteurs apostoliques.

Dès les premières lignes, le pontife assure avoir suivi de "très près" la visite en question, "prenant personnellement les décisions qui s’imposaient".  S’il ne fait aucune mention du cas de l’ex-mère Marie Féréol, la formulation de la lettre apparaît sans équivoque. Le Pape assume implicitement le renvoi définitif de la vie religieuse de cette sœur.

Par ailleurs, il réitère sa confiance au cardinal Ouellet qui continuera de veiller, avec le Frère dominicain Henry Donneaud – nommé assistant apostolique en septembre 2021 –, à la mise en œuvre des orientations données à l’issue de la visite apostolique. Un geste fort, alors que l’autorité du Préfet de la Congrégation pour les évêques avait été remise en cause par certains après que ce dernier ait signé le décret renvoyant la religieuse, en avril 2021. 

Une série de défaillances

Dans une formule peu commune, le pape François en vient alors à présenter des excuses à l’Institut pour un ensemble de "défaillances" subies lors de l’accompagnement par le Saint-Siège de la communauté. Celles-ci ayant eu lieu sous son pontificat, il en assume la responsabilité. Sans la nommer directement, c’est la commission Ecclesia Dei, chargée de l’accompagnement des instituts traditionalistes depuis 1988, que le pape semble viser. Supprimée en 2019 par le pontife, elle était en charge du suivi de l’Institut depuis 2013.

Les "défaillances" pointées du doigt par le pape François regroupent trois domaines. "Le pape s’attriste d’abord que certaines décisions qui ont été prises par Rome aient manifesté une méconnaissance de la vie religieuse", explique le frère Henry Donneaud. En 2016, Ecclesia Dei a par exemple nommé une prieure, mère Marie Pia, sans qu’elle puisse former un Conseil sur lequel s’appuyer pour prendre ses décisions. "Dans la vie consacrée, cela ne se fait pas", souligne le dominicain.

Il revient par ailleurs sur la façon dont s’est achevée la mission du dominicain Benoît-Dominique de la Soujeole, dépêché en 2013 comme commissaire pontifical pour aider l’Institut. "On l’a brusquement déjugé comme un malpropre, en 2016, pour d’obscures raisons", raconte l’actuel visiteur apostolique. "Le Saint-Siège ne traite pas d’ordinaire de la sorte ceux qui travaillent à son service".

Deuxième défaillance soulevée par le pape dans la lettre : l’accompagnement des personnes "victimes d’abus" qui a été déficient. Une référence possible aux quelques sœurs psychologiquement atteintes après des exorcismes illégitimes qui auraient été pratiqués au début des années 2010 par l’ancien aumônier de la communauté – un prêtre contre lequel des procédures étatiques et canoniques sont actuellement en cours. 

Ces sœurs, qui ont toutes quitté la communauté, n’auraient alors pas été accompagnées par Ecclesia Dei. Dans un communiqué de l’Institut publié le 29 janvier, il est précisé que "les démarches adaptées de soutien n’ont pas été engagées". Ce n’est qu’après la visite apostolique de 2020-2021 que les victimes ont pu bénéficier d’un accompagnement. 

La troisième défaillance évoquée par le pape François concerne la manière dont a été traitée la question du fondateur de l’Institut, le Père Victor-Alain Berto (1900-1968). Au moment de la crise de 2012-2013, certaines voix s’étaient élevées pour accuser notamment le prêtre breton d’avoir abusé sexuellement des mineurs. 

Envoyé par Rome pour remettre de l’ordre dans l’Institut, le commissaire pontifical de l’époque, le père de la Soujeole, avait confié à deux spécialistes la tâche de mener une enquête sur le fondateur. Le rapport concluait qu’aucun fait de pédocriminalité n’était remonté. Sur la base de déclarations de sœurs, il estimait toutefois que le fondateur avait pu avoir, vis-à-vis de certaines religieuses, des gestes équivoques.

Or, reprenant les résultats de l’enquête, "la commission Ecclesia Dei a conclu que le Père Berto était lavé de tout soupçon", rapporte le Frère Donneaud qui résume : "Il était dès lors pleinement réhabilité". Le Pape, dans sa lettre, revient sur cet aspect et tient à préciser que la "réhabilitation" dont le fondateur a fait l’objet "ne peut pas être maintenue sans nuances", comme le signalait la conclusion des deux experts.

« Cette lettre est une vraie surprise »

Au final, au regard de l’ensemble des manquements énoncés, le Pape "souhaite que les moyens soient pris pour soulager et permettre la reconstruction des personnes qui en ont besoin". Dans leur communiqué, les dominicaines du Saint-Esprit écrivent avoir "le cœur rempli de gratitude filiale" à l’égard du pape François pour cette lettre "unique" qui "marque une étape pour elles et ouvre un nouveau chemin".

"Cette lettre est une vraie surprise", confie à I.Media sœur Marie Magdeleine, responsable de la communication de l’Institut qui compte aujourd’hui 99 religieuses, dont 7 novices. "Nous ne représentons pas grand chose dans l’Église universelle… Et pourtant le Pape, comme un père, prend la peine de nous écrire pour présenter des excuses et nous encourager… Cela nous remplit d’émotion", témoigne-t-elle. La lettre du Pape concourra-t-elle à apaiser les tensions d’un Institut en crise depuis plus de 10 ans ? "Je l’espère", poursuit la religieuse entrée dans la communauté en 2004 ; "elle va participer à notre relecture des événements".

Pour l’assistant apostolique, cette lettre personnelle du Pape "clarifie les choses". "Dans une communauté blessée, qui a été marquée par une sorte de guerre des clans, le pape, en assumant la responsabilité des erreurs commises par ses propres services, pose un acte très fort et donne un cap qui doit permettre à l’Institut de repartir de l’avant", estime le frère Donneaud.

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