La conférence épiscopale va se réunir en assemblée plénière à Lourdes. Cet événement régulier prend cet automne une tonalité toute particulière. Bien évidemment, le rapport Sauvé et la lumière crue qu’il jette sur le désastre humain et ecclésial de la pédocriminalité dans l’Église seront dans tous les esprits. Cela ne saurait suffire. Voilà maintenant plusieurs semaines que l’immense cortège des victimes mais aussi les terrifiants décomptes des criminels et de leurs complices nous hantent. Il ne semble pas que l’heure soit, comme si Lourdes était le lieu d’une catharsis, à une nouvelle expression de l’émotion mais bien à une action résolue, vitale pour l’Église de France.
La pénitence et la prière
D’abord, la pénitence et la prière. Présenter au Christ et aux victimes, qui en sont l’image, nos âmes contrites et humiliées par les péchés de nos pères dans la foi, de nos frères et de nous-mêmes, implorer la miséricorde de Dieu par l’intercession de Notre-Dame-de-Lourdes, invoquer le Saint-Esprit pour qu’il aide les évêques et nous tous à discerner : voilà la toute première urgence. Loin de la stérile opposition entre la conversion et la réforme, s’engager dans la voie de cette dernière dans l’esprit d’un sincère retour à Dieu est une nécessité pour tout son Peuple. Les laïcs attendent les évêques pour s’engager avec eux dans une authentique démarche pénitentielle et spirituelle déployée dans tous les diocèses du pays.
Il en va de même des réformes attendues. Sans opposer le clergé et les laïcs mais en embrassant tout le Peuple de Dieu dans la diversité de ses ministères et de ses charismes, il convient que tous y aient part. Plusieurs voix se sont fait entendre bruyamment, tantôt maximalistes, tantôt plus proches de ce qu’il faut bien nommer un déni. Nos évêques ne peuvent faire comme si ces expressions de colère et d’espérance n’existaient pas.
Se réformer en retrouvant le don du Christ
Les catholiques attendent une mise en route concrète de réformes de gouvernance et sont prêts, pour une large part, à donner de leur temps et de leur énergie dans cette dynamique. Ceux qui redoutent que cet élan aboutisse à des reniements doctrinaux auront aussi, plus qu’à leur habitude, les yeux tournés vers les évêques. Aux « surveillants » de l’intégrité de la foi, comme le manifeste l’étymologie de leur titre, d’indiquer que l’Église, semper reformanda selon la tradition augustinienne, doit en se réformant non pas s’égarer mais au contraire retrouver la forme que le Christ lui a donnée.
Les catholiques français espèrent beaucoup de Lourdes. Cela ne sera pourtant qu’une partie du chemin. Nous ne pourrons le continuer sans ceux qui ont alerté depuis longtemps sur de graves déséquilibres et manquements dans le gouvernement de l’Église, sans ceux qui, comme le Fr. Pavel Syssoev o.p, et dom Dysmas de Lassus o.cart., ont réfléchi très profondément sur les figures paternelles dans l’Église et leurs dévoiements et enfin sans les innombrables saints qui ont appelé leurs frères baptisés, les prêtres, les évêques et le Pape lui-même, à la conversion et au courage.