Paris, 1529. En cette belle journée d’avril, dans une chambre d’étudiant du collège Sainte-Barbe, le jeune François contemple le ciel. Ses yeux mélancoliques sont encore rouges. Il a appris il y a peu de temps la mort de sa chère et tendre mère.
Pierre Favre, son ami savoyard et compagnon de chambre, ne sait que dire pour le réconforter. Mais il reste à proximité, au cas où son ami aurait besoin de lui.
Puis, au milieu de ce silence inconfortable, on toque délicatement à la porte. Les deux étudiants se regardent avant que Pierre ne se décide à aller ouvrir. De l’autre côté de la porte, se trouve un homme d’une quarantaine d'années. Il est mal coiffé et rasé. Ses vêtements sont dans un état pitoyable. Clairement boiteux, il s’aide d’un bâton pour se déplacer. Il a tout d’un mendiant.
Pourtant, un sourire radieux orne son visage et une douceur indéniable émane de ses yeux. Mais cela, François ne le voit pas. Il se lève pour chasser l’intrus. Mais l’intrus en question parle le premier.
Il faut quelques instants aux jeunes hommes pour comprendre. Cet homme qui a le double de leur âge est étudiant ? François le toise avec dédain. Jamais il n’oserait se présenter ainsi devant qui que ce soit.
Le sang de François ne fait qu’un tour. Ce nom ne lui est pas inconnu. Ses frères ont combattu l’armée du duc de Najera à Pampelune en 1521. Un certain Loyola s’opposait à eux. Soldat accompli avec des ambitions de chevalerie, un boulet l’aurait terrassé.
Dans les mois qui suivent, François ne manque pas d’être désagréable avec Ignace. Il le traite de boiteux, d’illuminé. Mais aucune de ses moqueries peu subtiles ne semblent atteindre Ignace, qui se contente de sourire et de répondre toujours avec bienveillance. Ce qui a le don d’agacer encore plus l’ambitieux François.
À l’extérieur, Ignace fait l’éloge des capacités intellectuelles de François. Ainsi, ce dernier reçoit de nouveaux élèves ce qui lui permet de financer ses études. Cet élan de bonté non-méritée trouble François. Il décide alors de l’ignorer et de se concentrer sur ses études.
Mais Ignace et son petit livre des Exercices spirituels se font rapidement connaître. Il ramène beaucoup d’étudiants à la foi, et en convainc même certain de tout quitter pour le Christ. Le grand choc pour François, c’est le jour où son ami Pierre lui annonce qu’il a décidé de suivre Ignace, lui aussi.
Une phrase revient souvent dans les enseignements d’Ignace et refuse de quitter l’esprit de François. "À quoi sert à l’homme de gagner l’univers s’il vient à perdre son âme ?" Elle lui fait remettre en question ses ambitions. Il pense à l’essentiel.
Alors que Pierre retourne en Savoie pour dire adieu à ses parents, François se retrouve seul avec l’humble Ignace. Il n’y a personne d’autre à qui s’adresser. Alors ils parlent. De leurs griefs ? Peut-être. De la foi ? Sans doute. De quoi exactement ? Nul ne le sait sinon les deux hommes présents.
Quand Pierre revient un mois plus tard, François est transformé. Il veut lui aussi tout donner à Dieu, servir les autres et évangéliser aux quatre coins du monde. Les conseils d’Ignace ont pris racine en lui et allumés un feu qui jamais ne s’éteindra.
Plus tard, Ignace avouera que François fut "la plus rude pâte qu’il ait manié". Et pourtant, François Xavier deviendra le saint patron des missions.