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À l’origine de la dévotion à « Marie qui défait les nœuds », il y a un tableau, peint en 1700, attribué à Johan Melchior Schmidtner, et qui est exposé dans l'église St Peter am Perlach à Ausbourg en Allemagne. L’œuvre illustre ce texte écrit par saint Irénée au IIe siècle : « Par sa désobéissance, Ève a créé le nœud qui a étranglé le genre humain. Par son obéissance, Marie l’a dénoué. Ce qu’Ève a noué par son incrédulité, la Vierge Marie l’a dénoué par sa foi » (Adversus Haereses III, 22, 4). Cette intuition est confirmée dans les années soixante par le concile Vatican II : « La foi de Marie dénoue le nœud du péché » (Lumen gentium, n. 56).
La Vierge Marie, personnage principal du tableau, reçoit des mains d’un ange un ruban encombré de toutes sortes de nœuds. Elle le fait passer à un autre ange : dans l’intervalle, par ses mains, le ruban a été complètement débarrassé des nœuds. D’autres anges regardent la scène. Au-dessus de la Vierge, une nuée lumineuse symbolise Dieu. De cette nuée se détache une colombe blanche, c’est l'Esprit Saint qui inspire la Vierge. Sous les pieds de celle-ci, un serpent (représentant le mal dans la Bible) et un croissant de lune argenté : on retrouve ici la description de Marie dans l'Apocalypse de saint Jean : « Un grand signe est apparu dans le ciel, une femme, revêtue de soleil, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. » Dans ce tableau, la Vierge Marie est située entre le ciel et la terre pour signifier sa place, entre Dieu et les hommes. Inspirée par Dieu, elle écrase le mal. Le renflement de la robe portée par la Vierge et sa couleur rouge attesteraient qu’elle est enceinte (« El libro del Papa Francisco », Gente n. 12, 19 avril 2013). Ainsi, le Père, le Fils et l’Esprit sont réunis dans ce tableau.
La partie correspondant au ruban emmêlé (à gauche de la Vierge) est plus sombre. Est-ce un symbole des difficultés des hommes en butte au péché ? Au bas du tableau, des silhouettes sortent de l’obscurité pour se diriger vers la partie plus claire, celle qui correspond au ruban délivré des nœuds qui l’encombraient. Ces silhouettes représentent l’archange Raphaël (en hébreu « Dieu guérit ») guidant Tobie, reconnaissable au poisson qu’il porte dans la main, vers une église dans laquelle l’attend Sara, sa promise. Le tableau fait explicitement référence aux liens du mariage. Au XVIIIe siècle, en Allemagne du sud, le signe des alliances échangées existait peu : le prêtre attachait avec un ruban le bras gauche de l’époux au bras droit de la mariée, représentant ainsi leur union devant Dieu. Ce tableau a d'ailleurs été commandé au peintre Schmitter par un prêtre, H.A. von Langenmantel en remerciement pour la réconciliation d’un couple.
Ce tableau est à notre connaissance le seul où la Vierge agisse matériellement, visiblement, manuellement. Maria Knotenlöserin, littéralement « Marie, celle qui défait les nœuds », est née de l’inspiration d’un prêtre qui donc très judicieusement a compris que nous avons tous des nœuds dans notre vie et qu’il nous appartient de les remettre dans les mains de la Vierge pour qu’elle agisse sur eux. Peut-être est-ce cela qui a tellement marqué le père Jorge Bergoglio, aujourd’hui pape François ?
Dans les années quatre-vingt en effet, au cours d’un séjour en Allemagne, le père Jorge Bergoglio — devenu le pape François le 13 mars 2013 — découvre le tableau qui est connu dans la région de Munich. Il en rapporte en Argentine quelques reproductions dont il fait faire des cartes pour ses correspondances et ses cadeaux. Le jour où il est ordonné évêque, c'est l'image de « Marie qui défait les nœuds » qu'il choisit de distribuer à l'assistance. En 1996, Ana-Maria Betta de Berti reçoit l’une de ces cartes. Elle est expert-comptable à l'université San Salvador de Buenos Aires dont le père Bergoglio est recteur. Peintre amateur, Ana-Maria Betta de Berti réalisera quatre grands tableaux à partir de cette petite carte, quasiment identiques à l'original. L’un de ces tableaux, accroché dans l'église San Jose de Talar (Buenos Aires), attire chaque week-end plus de 10 000 personnes venues de tout le pays (Evangelina Himitian, François un pape surprenant, Presses de la Renaissance, 2013).
En 1997, un peu forcé par un paroissien, le père Juan-Ramon Celeiro, curé de la paroisse San Juan Bautista de Buenos Aires, installe une reproduction dans son église. L'affluence des visiteurs venant prier devant le tableau est telle qu’il organise une distribution de nourriture et de boissons. Peu après, au cours d’une retraite sacerdotale, il a l’intuition qu’il doit aussi fournir une nourriture spirituelle : c’est ainsi qu’il écrit à l’intention des visiteurs, la neuvaine que nous connaissons. Devant le succès rencontré, en novembre 1998, il la fait publier en Argentine par les éditions Editorial Santa Maria de Buenos Aires. Cette neuvaine va rencontrer un succès considérable en Amérique latine.
Il restait à propager la prière dans le monde entier. Lors d'un voyage au Brésil pour le compte du mouvement de prière des Vierges pèlerines préparant le grand Jubilé de l’an 2000, je découvre la dévotion à « Marie qui défait les nœuds » ainsi qu’une version de la neuvaine. Par des rapprochements successifs, j’acquiers la conviction qu'elle est inspirée de celle du père Celeiro et dans un souci d'exactitude, je me rapproche de l’auteur d’origine, lui proposant de la diffuser hors de l’Amérique latine. Dès 2001, la neuvaine connaît en France un succès retentissant ; ce succès ne s'est jamais démenti. À ce jour, près de 900.000 exemplaires ont été diffusés en huit langues (français, anglais, allemand, néerlandais, espagnol, italien, portugais, chinois) en France et dans le monde entier ! Puis, des contrats sont signés avec des éditeurs étrangers en Slovénie, Croatie, Roumanie, Pologne, Grande-Bretagne, mais aussi aux États-Unis, en Australie, en Inde, aux Philippines, en Corée, bientôt avec l’Égypte, etc. Le livret du père Celeiro a reçu l'imprimatur de l'archevêché de Paris, caution de l'Église sur son contenu.
« Nœuds de vie personnelle, familiale, professionnelle, sociale. Tous ces nœuds, qui ne sont rien d'autre que le péché, nous affaiblissent tellement dans notre foi que la grâce de Dieu ne peut s'écouler librement à travers le ruban de notre vie » expliquait le cardinal Bergoglio. Devenu pape, il continue de s’y référer souvent. « À la miséricorde de Dieu, nous le savons, rien n’est impossible ! Même les nœuds les plus emmêlés se dénouent avec sa grâce. Et Marie, qui, par son “oui”, a ouvert la porte à Dieu pour dénouer le nœud de l’ancienne désobéissance est aussi la mère qui, avec patience et tendresse, nous conduit à Dieu, afin qu’il dénoue les nœuds de notre âme. »
Chacun de nous peut se demander : « Quels nœuds y-a-t-il dans ma vie ? » Ici, laissons encore la parole au pape François : « J’entends parfois dire : “Père, mes nœuds ne peuvent pas se dénouer !” C’est une erreur ! Tous les nœuds du cœur, tous les nœuds de la conscience peuvent être dénoués. Est-ce que je demande à Marie de m’aider à avoir confiance en la miséricorde de Dieu, pour les dénouer, pour changer ? Marie, femme de foi, nous dira sûrement : “Avance, va chez le Seigneur : lui te comprend.” Et, mère, elle nous conduit par la main vers la tendresse du Père, du Père de la miséricorde. »
Le père Celeiro a vus par centaines les attentes des fidèles et c’est pour eux qu’il a écrit la neuvaine. Ces fidèles, conscients de leurs fragilités et de leurs manquements, parfois à bout d’espérance et de souffrances, viennent prier Marie, sous son vocable de « Marie qui défait les nœuds » au pied de la reproduction accrochée dans son église. La neuvaine à « Marie qui défait les nœuds » aide chacun à formaliser à la fois son besoin, le manque qui fait souffrir, et sa confiance en Marie. Durant neuf jours, la difficulté est mise en perspective grâce au texte des prières ; la foi, la confiance et la persévérance sont développées par la récitation du chapelet. Les témoignages montrent que bien souvent le nœud ne se dénoue pas « par miracle » : la neuvaine a permis de trouver la voie vers la solution et la sérénité.
Les milliers de merveilles que l’on attribue à ce tableau sont enregistrées avec les documents correspondants, notamment à San José del Talar et à San Juan Bautista. Beaucoup ont trait à la santé : l’Institut oncologique Angel-Roffo est proche de la paroisse de San José del Talar, et ses malades vont voir « Marie qui défait les nœuds » chaque jour, notamment le mercredi, jour où la messe est dite pour eux. Les pèlerins affluent aussi chaque huit du mois et notamment le 8 décembre, jour de la fête de l'Immaculée Conception. Les responsables de la paroisse reçoivent tous les jours des témoignages de nœuds déliés, de familles réconciliées, de problèmes d'argent, de logement, de travail résolus.