Le 25 janvier 1959, à la fin de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, le pape Jean XXIII annonce aux cardinaux la réunion d’un "concile œcuménique pour l’Église universelle". Ainsi allait naître le concile Vatican II, sous le signe de l’aggiornamento. Ce mot traduisait une volonté de proximité plus grande avec la population, dans un but apostolique. Le pape Roncalli l’avait déjà employé avant d’être élu à Rome, comme archevêque patriarche de Venise, en 1957, lors d’un synode diocésain. Il l’utilisa ensuite comme pape pour expliquer sa démarche conciliaire essentiellement pastorale.
Comme le remarque le diplomate helvétique Pierre-Yves Fux, ancien ambassadeur au Vatican, dans son Petit Dictionnaire des mots du Saint-Siège paru au Cerf, à la fois précis, rigoureux et savoureux, "aggiornamento ne suggère aucun bouleversement mais ne pose pas de limite". À l’inverse, estime-t-il sur un ton résolument humble, spirituel et pacificateur, "parler de “réforme” ou de “modernisation” (termes connotés par le protestantisme et par le “modernisme”) aurait suscité des crispations, et préjugé de l’issue d’une réunion solennelle où l’on doit se laisser guider par l’Esprit saint".
Un dépassement en profondeur
D’après ce petit dictionnaire, Paul VI, le successeur immédiat de Jean XXIII, a fait du mot aggiornamento l’idée maîtresse de son propre pontificat et y voyait la "ligne directrice du concile". Encore récemment, Benoît XVI s’est dit persuadé que "l’intuition du bienheureux Jean XXIII résumée par ce mot a été et est encore exacte". Car, selon le pape Ratzinger, "le christianisme est un arbre qui est, pour ainsi dire, dans une aurore “permanente”, qui est toujours jeune.
Et cette actualité, cet aggiornamento, ne signifie pas rupture avec la tradition, mais il en exprime la vitalité continuelle". Le théologien français Yves Congar proposait de percevoir l’aggiornamento comme un "ressourcement", en s’appuyant sur une définition donnée par Charles Péguy de ce mot français un peu savant : "un appel d’une tradition moins parfaite à une tradition plus parfaite, un appel d’une tradition moins profonde à une tradition plus profonde", et donc "un dépassement en profondeur, une recherche à des sources plus profondes".
Dans son dictionnaire, le diplomate de la Confédération helvétique observe qu’aujourd’hui le mot aggiornamento, lié au contexte de Vatican II, "rassure" autant les "conservateurs prudents" que les gens qui aspirent à des changements profonds. L’important n’est-il pas de procéder à ce perfectionnement, comme le voulait le "bon Pape Jean", dans un esprit de sanctification ?
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