Les légendes arthuriennes et son épée fichée dans la pierre ont inspiré de nombreuses œuvres artistiques. Près de l’abbaye de San Galgano, dans la région de Toscane, existe bien une épée fichée dans un rocher. Conservée sous une châsse de verre dans la chapelle de Montesiepi, elle aurait appartenu au saint ermite, Galgano Guidotti (1148-1181). Une légende raconte comment cet artéfact a pu se retrouver là.
Nous sommes en 1175. Un jeune homme à la mine troublée venant de Sienne se promène à cheval. C'est Galgano. D’ordinaire il est joyeux. C’est un bon vivant qui apprécie la bonne chère, la boisson et plus encore la compagnie des jolies femmes. Quand ce chevalier n’est pas sur un champ de bataille, il est à la taverne ou cherche querelle. Pourtant, ce jour-là, il est en quête d’un endroit calme et paisible. Celui-là même où saint Michel archange l’a invité, en songe, à se rendre. Pourquoi le messager divin est-il venu le chercher ? Lui, l’incarnation de la débauche et de l’arrogance ?
Pourtant cette invitation à tout quitter l’a saisi au cœur. Une fois à l’endroit indiqué par l’archange, il a une nouvelle vision. Galgano voit cette fois douze hommes rassemblés autour d’une table. Et derrière eux, un être de lumière dont une aura sans pareille se dégage. Il le sent, cet être est la source de tout. La vérité, l’univers entier, le souffle de vie. Il est estomaqué et tombe de sa monture. Aussitôt la vision s’estompe et une voix s’élève de nulle part.
- Renonce à tout bien et plaisir terrestre, lui ordonne-t-elle.
Galgano se redresse et ses yeux tombent sur le fourreau à sa ceinture. Cette épée qui a bu le sang de tant d'hommes est le seul bien terrestre qui lui reste. Il ferme les yeux et fait le serment d’abandonner l’armure du chevalier débauché pour prendre la bure de l’ermite repentant.
Afin de sceller cette promesse, il tire son épée de son fourreau et l’élève pour la fracasser contre une pierre à proximité. Mais au lieu de se briser, la lame s’enfonce dans le rocher, ne laissant que le manche dépasser. Devant l’exploit de cette croix improvisée, Galgano tombe à genoux et prie.
En 2001, un chercheur de l’université de Pavie, Luigi Garlaschelli, à mené une enquête sur l’authenticité de la fameuse épée. Malgré la difficulté de l’analyse, l’expert a confirmé que le style et la composition de l’épée permettaient bien de la dater du XIIe siècle. Un radar à pénétration de sol (RPS) a également révélé que sous la pierre se trouve une cavité assez grande pour être un tombeau.
Plus saisissant encore, la présence de cette épée fichée dans le roc n’est pas le seul témoin de la légende de Galgano. Dans la chapelle de Montesiepi se trouvent également deux mains momifiées par le temps. Avec une datation au carbone 14, les experts ont pu déterminer que les deux mains étaient de la même époque. Or la légende raconte également que quiconque tentait de s’emparer de l’épée... perdait ses bras.
Quand au médiéviste italien Mario Moiraghi, il estime plausible que l’épée de l’ermite ait influencé la légende arthurienne. Le nom Galgano pourrait être à l’origine de ceux des personnages de Galaad et Gauvin. Quoiqu’il en soit, il est tentant de croire que la véritable Excalibur a appartenu non pas à un roi légendaire mais à un saint ermite.