Nous voici confinés depuis quinze jours. La fragilité de notre existence nous revient alors en pleine figure. Nous n’étions pas prêts… Nous ne savions pas que nous n’étions que des humains. Justement… Comment vivre cette épreuve en tant qu’humain et croyant à la fois ?
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Nous voici confinés depuis plus de quinze jours. Temps étrange, extraordinaire. Pour la première fois de notre vie, nous vivons une réclusion presque complète, à laquelle s’ajoute l’angoisse pour nos proches ou pour nous-mêmes. La liste des amis atteints par le virus s’allonge chaque jour ou presque, et celle, plus tragique, de ceux qui sont décédés. La fragilité de notre existence, notre mortalité, l’incertitude de l’avenir, l’effondrement de l’économie mondiale, tout cela nous revient en pleine figure. Nous n’étions pas prêts. Nous ne savions pas que cela pouvait arriver. Nous ne savions pas que nous n’étions que des humains.
«Il y aura un après à cette épidémie, au confinement, à cette épreuve. Nous aurons alors à réinventer notre avenir commun, (…) en ajustant beaucoup de choses dans notre façon d’habiter cette planète et notre vie commune, nos liens sociaux…»
Nous nous précipitons sur les réseaux sociaux, sur les sites d’information, sur les émissions à la télévision. Nous accumulons tout ce qui peut nous cacher notre réclusion, tout ce qui peut colmater ce vide relationnel où nous avons été enfermés. Et cela ne fait qu’ajouter à l’angoisse, à l’inquiétude. Difficile de trouver autre chose que les informations alarmantes sur la propagation de l’épidémie. Difficile de penser enfin à autre chose. Et le cercle infernal continue : plus la peur et l’inquiétude nous envahissent et plus nous les nourrissons en partant à la recherche de nouvelles raisons de nous angoisser.
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Ce désarroi est tout à fait normal. À la sidération ou à l’hébétude initiales quand nous avons commencé à comprendre la gravité de la situation, a fait suite une inquiétude plus profonde, des questions sérieuses qui ne sont pas infondées : que va-t-il devenir des institutions politiques, sociales ? de la vie économique ? du lien social ? de l’Union européenne ? Ces interrogations graves ne sont pas un simple reflet de notre angoisse mais elles demandent des réponses.
Simplement, ce n’est sans doute pas encore le temps de donner des réponses. Car même si c’est difficile à croire quand l’angoisse nous saisit, il y aura un après à cette épidémie, au confinement, à cette épreuve. Nous aurons alors à réinventer notre avenir commun, sans forcément relancer à l’identique ce qui était « avant », mais sans doute en ajustant beaucoup de choses dans notre façon d’habiter cette planète et notre vie commune, nos liens sociaux…
«Aujourd’hui, c’est de cela qu’il s’agit : vivre dans la force et l’honneur d’être homme.»
Aujourd’hui, il faut tenter de vivre notre aujourd’hui, justement. André Malraux, dans son livre Les voix du silence, achevait son dernier chapitre en rappelant le geste de l’homme de Lascaux qui commence à dessiner sur la paroi rocheuse. « Et cette main, dont les millénaires accompagnent le tremblement dans le crépuscule, tremble d’une des formes les plus secrètes, et les plus hautes, de la force et de l’honneur d’être homme. » Aujourd’hui, c’est de cela qu’il s’agit : vivre dans la force et l’honneur d’être homme. Ne pas fuir cet aujourd’hui et son angoisse, ni pour se réfugier dans le passé aimable où il n’y avait pas encore le virus, ni pour se projeter dans l’avenir et y retrouver nos questions. Mais vivre, tout simplement, aujourd’hui, en homme, en femme.
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Vivre sans s’enivrer dans la consultation des informations, dans l’épluchage des messages sur les réseaux sociaux, dans l’évasion fallacieuse qu’ils promettent. Vivre l’épaisseur de l’inquiétude, vivre le silence du confinement. En un mot, vivre l’épreuve. En la nommant. Épreuve. Épreuve plus difficile pour ceux qui luttent contre la maladie, pour ceux qui les soignent, et pour leurs proches. Épreuve souvent plus douce pour ceux qui sont passés à côté… Mais épreuve pour tous.
Chacun de nous peut choisir comment vivre l’épreuve. Tous, nous sommes appelés à la vivre dans la force et l’honneur d’être homme, dans le refus de la désespérance, dans le choix de la fraternité.
Pour le croyant, l’épreuve est toujours épreuve de la foi, de l’espérance, de la charité. Elle le place devant le choix de la suite du Christ, ou de sa trahison. Pour le croyant, victorieux de l’épreuve ou non, il y a les bras du Père, toujours ouverts, qui l’attendent. Pour le croyant, victorieux de l’épreuve ou non, il y a les pas du Christ, compagnon de sa route. Pour le croyant victorieux de l’épreuve ou non, il y a la paix de l’Esprit Saint.