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Ordonner des “viri probati”, où est la difficulté ?

PRIEST HANDS
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Thomas Michelet, op - publié le 29/10/19
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L’assemblée spéciale du synode sur l’Amazonie a évoqué la possibilité de revenir localement à l’ordination des “viri probati”. Les raisons de l’abandon de cette pratique par l’Église latine au XIIe siècle sont mal connues. Professeur de théologie à l’université pontificale St-Thomas-d’Aquin, le Fr. Thomas Michelet explique qu’il ne s’agissait pas d’une simple question de convenance.Ordonner des viri probati — des hommes mariés d’âge mûr — l’Église le faisait jusqu’au XIIe siècle. Où est alors la difficulté ? Au moment de l’ordination, ces viri probati s’engageaient en présence de leur épouse à vivre désormais avec elle en frère et sœur, c’est-à-dire dans la continence parfaite. Raison pour laquelle il s’agissait d’hommes d’âge mûr : ils avaient passé l’âge d’avoir des enfants et n’en avaient plus à charge. 

Une règle des apôtres

À l’époque, l’Église enseignait qu’elle tenait cette règle des apôtres. C’est pour cela qu’elle a toujours tenu à la faire observer, malgré de fortes oppositions et de grandes difficultés pratiques. Les hommes d’alors n’étaient pas plus enclin au célibat que ceux d’aujourd’hui, la nature reprenant souvent le dessus. Nous avons des témoignages d’évêques se remettant à vivre avec leur épouse (pourtant légitime) et qui ont été déposés de leur charge pour cette raison, les deux finissant leurs jours en pénitence dans un monastère. 



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Le célibat a toujours été quelque chose de difficile à faire respecter et l’Église n’a pu l’imposer que parce qu’elle le recevait comme une règle qui s’imposait à elle. Autrement, cela fait longtemps qu’elle l’aurait fait disparaître. Et c’est pour cela qu’au XIIe siècle, l’Église a décidé de le protéger d’une manière plus radicale en n’appelant désormais que des candidats célibataires. Loin de faire disparaître la règle du célibat, elle a donc voulu la renforcer.

Deux types de célibat

La difficulté est que depuis, la règle du célibat (célibat relatif, célibat second ou conséquent : celui d’hommes mariés s’engageant au célibat lors de leur ordination) a été incluse dans ce nouveau régime du célibat (célibat absolu, célibat premier ou antécédent : celui d’hommes n’ayant jamais été mariés). Cela a eu deux conséquences. 

D’une part, on a fini par oublier le régime antique et confondre les deux types de célibat, ce d’autant plus facilement que l’on parlait de célibat dans les deux cas, alors que les régimes étaient différents. D’autre part, comme ce second régime était simplement d’institution ecclésiale récente, on a fini par présenter le célibat ecclésiastique lui-même (en confondant les deux) comme une simple question de discipline, comme quelque chose que l’Église avait décidé et pouvait donc changer. Ce qui a fini par devenir insupportable : au nom de quoi l’Église peut-elle l’imposer et pourquoi refuse-t-elle de le changer ? 

Le célibat comme une nécessité

En oubliant le premier régime, l’Église a aussi oublié que jusque-là elle ne présentait pas le célibat comme une option ou un simple choix spirituel (lui laissant la possibilité d’un autre choix), mais comme une règle venant des apôtres et s’imposant à elle. Certes, il y avait une grande convenance entre ce célibat (second régime) et le sacerdoce, mais une simple convenance et non pas une nécessité. Ce faisant, on a oublié que la règle du célibat s’imposait aux hommes mariés lors de leur ordination, non pas comme une convenance mais comme une nécessité. C’est en tout cas ce qu’enseignait l’Église depuis l’Antiquité.


jeune prêtre
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D’une manière paradoxale et regrettable, ce qui a été décidé au XIIe siècle, pour protéger le célibat en le renforçant, a plutôt fini par le fragiliser par une sorte de perte de mémoire. Si l’on veut à présent revenir en arrière en faisant référence à la tradition des viri probati, alors il faut le faire jusqu’au bout, et donc rappeler cette règle du célibat qu’ils devaient embrasser au moment de leur ordination. Autrement, ce serait une rupture dans la tradition, et donc une pure innovation. Ce serait renoncer à quelque chose que l’Église latine a toujours tenu depuis l’origine. Ce ne serait plus l’Église fondée sur les apôtres : « Le véritable fondement de la vie du prêtre, disait Benoît XVI, le sol de son existence, la terre de sa vie est Dieu lui-même […]. Le célibat, qui vaut pour les évêques dans toute l’Église orientale et occidentale, et, selon une tradition qui remonte à une époque proche de celle des apôtres, pour les prêtres en général dans l’Église latine, ne peut être compris et vécu en définitive que sur la base de ce fondement. » 

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