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L’homme biblique face aux défis du transhumanisme

ARTIFICIAL INTELLIGENCE
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Denis Planche - publié le 26/04/18
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Comment l’anthropologie chrétienne aide à penser les défis du transhumanisme et de l’intelligence artificielle ? Les réponses du docteur Denis Planche, médecin neurophysiologiste et ancien professeur de la faculté de médecine de Marseille, qui interviendra aux Rencontres de Montligeon des 28-29 avril 2018.Devant le vertige de l’évolution biotechnique actuelle, d’allure exponentielle, le temps de la réflexion s’accélère et nos sociétés complexes et contradictoires sont désorientées. La science d’aujourd’hui nous oblige à réfléchir à ce qui nous fonde en tant qu’humain, en quoi notre identité peut être en danger par les modifications apportées au corps et par l’irruption des machines intelligentes dans le quotidien de la vie. Quel est l’espace de jeu entre intelligence artificielle et intelligence naturelle ? Entre vie réelle, réalité augmentée et vie artificielle ? Entre intelligence artificielle et subjectivité, entre chosification de l’humain et humanisation de la machine ?


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Les demandes techniques, scientifiques, financières, sociétales actuelles se résument à une seule revendication : « plus de libertés » pour une disponibilité généralisée de l’homme, de son corps, de sa vie, de sa mort, de ses moyens… Cette logique d’autonomie radicale est en opposition totale avec la logique de solidarité résumée par Fabrice Hadjadj par la formule : « Je suis par l’autre et pour l’autre ». Cette logique réductionniste est celle de Protagoras, le chef de file des sophistes : « l’homme est la mesure de toutes choses », face à celle de la grandeur humaine de Pascal, « l’homme passe l’homme, infiniment ».

L’autonomie sans limite

L’idéologie transhumaniste fait un absolu de ce principe d’autonomie et va même au-delà par son utopie technique, et en plus elle s’en donne les moyens et nous fait passer du mythe ou de la fiction à la réalité.  Pour les libertariens qui portent cette idéologie, les idées de communauté et d’égalité semblent étrangères, le concept de « classe » améliorée ne pose pas de problème, eux qui imaginent la séparation du genre humain en plusieurs branches, ceux semblables à ceux d’aujourd’hui, ceux modifiés génétiquement, ceux augmentés techniquement, ceux hybrides de diverses formes, etc., et ceux qui seront partis à la conquête d’autres planètes pour former une civilisation intergalactique permise grâce aux capacités nouvelles de leurs corps modifiés et de leurs esprits immortels.



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Le danger de ces moyens techniques c’est l’hubris, la démesure dont les Grecs nous avaient prévenus et qui pose la question des limites.

Quelles sont ces limites ? Il y en a deux catégories : celles franchissables pour faire progresser la connaissance et améliorer le bien-être de la condition humaine ; ce sont celles de la science dont le principe est de toujours chercher au-delà de la limite. Et il y a celles à ne pas franchir en considérant que toute découverte, tout résultat, toute avancée technique pose une question éthique qui renvoie vers l’homme qui ne doit pas être amputé dans sa dignité de sujet en le réduisant à un objet.

La réponse biblique

Le transhumanisme nous incite à la transgression permanente . Il doit être pensé avec la plus grande attention et le choix des critères concerne chacun de nous. Les critères sur lesquelles fonder nos réponses se trouve dans l’anthropologie chrétienne car la Bible, si elle est une théologie, est également une anthropologie.

Par trois fois Dieu impose le corps : par la genèse, par la nativité, par la résurrection.



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Si le corps est créé, si le corps est divinisé, si le corps est tiré de la mort, si les plaies du corps sont pansées avec l’onguent, si les imperfections sont atténuées ou gommées par les soins quotidiens, si les guérisons miraculeuses existent, c’est qu’il est certainement assez bon de vivre sur terre avec son corps. Ce sont autant de témoignages de la primauté de la vie sur la mort.

Mais au-delà, chaque étape biblique nous apporte des éléments de réflexion. Tout d’abord, la Genèse instaure la dignité absolue de l’être, et par là l’indisponibilité du corps et l’inviolabilité de la personne, en faisant l’homme à l’image et à la ressemblance de Dieu. Elle fait de nous des êtres d’obligation pour le don de la vie et sa protection. La Nativité dévoile, ensuite, la vulnérabilité, l’importance de la non-puissance. Elle nous incite à une éthique de la fragilité. Aimer les âmes en peine, tout en combattant les peines de ces âmes, pour paraphraser Éric Fiat (La Croix, 30 mars 2018). Enfin, la Résurrection manifeste une présence inattendue et institutionnalise l’espérance. « Toute présence est une espérance ». Avec elle, l’action prend un sens nouveau qui n’est plus uniquement instrumental mais d’abord comportementale par une recherche d’absolu qui transcende les buts et les valeurs de l’action. Le Ressuscité n’est pas une idole mais un chemin.

La prééminence de la chair

Nous devons donc réaffirmer la prééminence de la chair en se souvenant que le Rédempteur est d’abord Créateur.

Et, comme nous incite Paul Tillich, ayons « le courage d’être, en acceptant, comme créature, d’être accepté par le Créateur en dépit de l’inacceptable de notre nature pècheresse ».

Et faisons nôtre, une belle injonction donnée aux « paralytiques » que nous sommes : « Lève-toi, prends ton brancard et marche ! »

Rencontres de Montligeon, 28-29 avril 2018 « Un travail au service de tout homme et de tout l’homme ». Renseignements et inscription : reception@montligeon.org

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