La chrétienté occidentale doit beaucoup à ce jeune roi pieux qui régna sur la France pendant plus de 44 ans. Louis IX (1214-1270) est un roi réformateur influencé par les ordres mendiants – franciscains, dominicains – qui sont sous son règne en expansion. Il s'inspire volontiers des valeurs du christianisme pour faire évoluer la France d'une monarchie féodale à une monarchie moderne. À l'apogée de son règne, sa réputation de souverain juste et équitable dépasse les frontières du royaume, sollicité comme arbitre par les différentes monarchies d'Europe.
"Il vit comme un moine, il jeûne régulièrement et il se confesse chaque semaine… comme notre roi a changé !", commentent ses familiers au château de Vincennes, en 1253. Louis gouverne depuis 18 ans. Il a reçu une éducation très stricte et très pieuse de sa mère Blanche de Castille, qui assurait la régence du royaume, depuis la mort de son époux Louis VIII (1226) et le sacre de son fils, âgé alors de 12 ans, à la cathédrale Notre-Dame de Reims.
À 25 ans, le jeune Louis est déjà tout entier tendu vers la sainteté. Il fonde des églises, des abbayes et des hospices, instaure la notion de bien commun, donne des aumônes et soigne les lépreux, punit le blasphème, les jeux d’argent, le duel judiciaire, convaincu d’être le serviteur de la royauté de Dieu. Il crée en 1254 un Parlement qui devient une cour de justice et un conseil politique, et n'hésite pas à s'impliquer dans certaines décisions de justice. Il met fin au jugement de Dieu en ordonnant des enquêtes et des recherches de preuves avec auditions de témoins.
Mais un des plus beaux jours de sa vie est celui où, les yeux baignés de larmes, il va au-devant des religieux qui apportent d'Orient la sainte Couronne d'épines, acquise auprès de l’empereur latin de Constantinople, Baudouin II, qui manquait alors cruellement d’argent. Il la porte dans sa capitale, pieds nus, en pèlerin, en pénitent, comme un pauvre, priant et méditant pour son peuple tout au long du chemin, suivi de prélats, de clercs, de religieux et de chevaliers, eux aussi pieds nus.
Pour la précieuse relique, et autres reliques de la Passion acquises dans la foulée, il a fait construire la Sainte-Chapelle, sur l’Île de la Cité, inaugurée le 26 avril 1248, à laquelle il attache un collège de chanoines chargé d’assurer leur garde et la célébration du culte.
Non, il n’existe pas qu’une seule Sainte-Chapelle en France ! Retrouvez ci-dessous, onze autres édifices en France, qualifiés également de Sainte-Chapelle.
Des saints à la même table…
La France, sous son règne, connaît un formidable essor culturel, intellectuel et théologique. Saint Louis aime recevoir à sa table les futurs docteurs de l’Eglise, le franciscain saint Bonaventure, et le dominicain saint Thomas d’Aquin. Il suit avec attention l'achèvement de la cathédrale Notre-Dame, face à la sainte-Chapelle, surtout les grandes rosaces (1255), considérées l'un des plus grands chefs-d'œuvre de la Chrétienté. Enfin, avec le théologien Rober de Sorbon, qu’il avait choisi comme chapelain et peut-être comme confesseur, il fonde la Sorbonne en 1257 qui fera de la capitale du royaume de France, la cité la plus importante de l'occident pour les sciences, la philosophie…
Un modèle de pur amour conjugal
Saint Louis, marié très jeune à Marguerite, est également vu par son peuple comme un modèle du pur amour conjugal. Il a fait graver sur son anneau la devise "Dieu, France et Marguerite ", scellant une union avec Marguerite de Provence considérée comme l’une des plus heureuses et des plus illustres par les historiens de France. Respectée et chérie par son saint roi, la jeune femme a assisté à ses conseils, s’est instruit à sa vertu et à sa piété.
On raconte que saint Louis passa ses trois premières nuits de jeune marié à prier, respectant ainsi les trois "nuits de Tobie" recommandées par l’Eglise, pour s’unir à Dieu avant de consommer leur union, selon les paroles de Tobie à son épouse Sara, la nuit de leurs noces :
"C’est à Dieu que nous sommes unis, et quand la troisième nuit sera passée, nous consommerons notre union. Nous sommes les descendants d’un peuple de saints, et nous ne pouvons pas nous unir comme des païens qui ne connaissent pas Dieu".
Et si saint Louis a été à l’initiative de croisades - deux contre les Musulmans et une contre les albigeois - celles-ci sont le résultat d’un vœu fait un jour de décembre 1244 alors qu’il est gravement malade et semble aux portes de la mort. Le souverain fait vœu de se croiser s’il guérit. Dans tout le Royaume, des campagnes de quêtes, de prières et de processions solennelles sont organisées et on fait apporter auprès de lui les reliques de la chapelle royale. Sa guérison, quelques semaines plus tard, est perçue comme un miracle.
Il reçoit alors la croix des mains de l’évêque et part pour l’Egypte. Cette croisade est un échec - il est parti avec 25 000 hommes dont une grande partie sont morts de maladies - qu’il perçoit comme une sanction de ses péchés et de ceux de son peuple. Certains iront jusqu’à dire qu’après cela, il a voulu renoncer à la couronne pour devenir moine, et que seuls ses confesseurs ont réussi à l’en dissuader. En 1267, il fait de nouveau vœu de croisade et fixe le départ à l’année 1270. Mais cette fois-ci pour convertir les infidèles et non les chasser de Terre Sainte. Il y meurt de Typhus à Carthage, le 25 août 1270, après 44 ans de règne.
Un des premiers laïcs canonisés
Un beau monument s'élève sur les lieux de sa mort (cathédrale Saint-Louis de Carthage), mais ses ossements sont ramenés en France et ensevelis en l’abbatiale de Saint-Denis après un service à Notre-Dame de Paris. Tout au long du trajet, rapportent les historiens auteurs du Livre des Merveilles, plusieurs miracles se produisent. Et le tombeau devient immédiatement un lieu de pèlerinage où de nombreux miracles sont constatés. Le procès en canonisation se prépare dès 1272 à la demande de Grégoire X. Le roi de France est proclamé saint par le pape Boniface VIII en 1297. Il est l'un des premiers laïcs à être canonisé, l'Église ayant jusque-là canonisé seulement des religieux.