De l’Évangile de Matthieu à l’exhumation de trois squelettes par sainte Hélène au IVe siècle et leur arrivée à Cologne après un détour par Milan, découvrez l’histoire des reliques des rois mages.
La châsse contenant les reliques des rois mages de Cologne, est conservée dans la cathédrale de Cologne, la deuxième plus haute église d’Allemagne et du monde, où affluent des pèlerins du monde entier pour la vénérer. Réalisée entre 1181 et 1230 par un des plus fameux orfèvres médiévaux, Nicolas de Verdun, et ses successeurs, cette châsse occupe une place importante dans le culte rendu aux rois mages dont seul l’Évangile de Matthieu (Mt 1, 11) fait pourtant référence, parlant de “mages d’Orient” ayant appris la naissance du Christ, venus “l’adorer” et lui offrir de l’or, de l’encens et de la myrrhe. On ne connaît ni leur nombre, ni leurs noms, ni s’ils sont rois…
De simples sages à “rois”
Depuis leur visite d’adoration et l’arrivée de leurs “saintes dépouilles” à Cologne, plusieurs interprétations et traditions se sont développées au fil des siècles, attribuant à cette châsse un rôle fondamental dans le culte rendu à ces trois rois, présentés par l’Église comme les premiers d’une longue procession de ceux qui, “tout au long de l’histoire, ont reconnu le signe de l’étoile et suivi les voies de l’Écriture pour rencontrer celui qui malgré son apparente fragilité offre au cœur de l’homme la plus haute félicité”, selon les paroles de Benoît XVI en leur rendant hommage le jour de l’Épiphanie.
Lire aussi :
Pourquoi les reliques de sainte Thérèse voyagent-elles sans cesse ?
Dès le IIe siècle l’importance de ces personnages n’a cessé de grandir — Origène nous apprend qu’ils sont trois ; le siècle suivant Tertullien les élève au rang de royauté, reconnue par la liturgie et l’iconographie sept siècles plus tard ; au VIe siècle ils sont popularisés sous les noms de Gaspard, Melchior et Balthazar – entrant alors assez vite dans le cercle des personnages traditionnels des récits de la Nativité, pour ensuite se développer dans l’art chrétien.
De Jérusalem à Milan
Quand leurs reliques arrivent à Cologne, les rois mages sont des personnages légendaires, et en même temps presque vivants qui représentent l’humanité entière. Les trois squelettes réputés, le plus sérieusement du monde, comme étant ceux des visiteurs orientaux de la crèche de Bethléem. Selon L’histoire des rois mages rapportée par le religieux Jean de Hildesheim (1315-1375), c’est Hélène de Constantinople – mère de Constantin et épouse de l’empereur romain Constance Chlore et future sainte Hélène – qui a fait exhumé les corps et les a ramenés la première fois, à l’occasion d’un pèlerinage à Jérusalem, au milieu d’autres reliques. Nous sommes au IVe siècle. Les reliques sont alors déposées dans la Grande Église (Megalo Ecclesia), là où sera construite quelques siècles plus tard la célèbre basilique Sainte-Sophie.
Lire aussi :
La localisation des vraies reliques de saint Nicolas fait débat
Mais leur permanence est très brève car voilà que son fils, l’empereur Constantin, les offre à Eustorgius Ier, élu évêque de Milan, qui les emporte à Milan où elles resteront environ huit siècles. Aujourd’hui encore, dans la basilique Sant’Eustorgio construite pour l’abriter, et devenue un important lieu de pèlerinage, on peut y voir le sarcophage et, au sommet du campanile, une étoile à huit branches…
À Cologne, proclamée quatrième ville sainte
C’est en 1164 que les reliques passent de Milan à Cologne, après la mise à sac de la ville par les troupes impériales de Frédéric Barberousse, furieux d’avoir été excommunié par le Pape. Celui-ci fait don alors des trois squelettes à Renaud de Dassel, l’archevêque de Cologne – figurant dans le programme iconographique de la châsse — qui les ramène en Allemagne et les dépose dans la cathédrale où elles se trouvent aujourd’hui. Depuis, les pèlerins n’ont cessé d’affluer. Et dès le XIIe siècle, Cologne est devenue la quatrième ville sainte du christianisme, aux côtés de Jérusalem, Rome et Constantinople.
Le pape Benoît XVI y a célébré les Journées mondiales de la jeunesse en 2005, déclarant dans son homélie :
“La ville de Cologne ne serait pas ce qu’elle est sans les Rois Mages, qui ont tant de poids dans son histoire, dans sa culture et dans sa foi. Ici, l’Église célèbre toute l’année, en un sens, la fête de l’Épiphanie (…) Se déplaçant à travers l’Europe, les reliques des Mages ont laissé des traces évidentes, qui subsistent encore aujourd’hui dans les noms de lieu et dans la dévotion populaire. Pour les Rois Mages, Cologne a fait fabriquer le reliquaire le plus précieux de tout le monde chrétien et a élevé au-dessus de lui un reliquaire encore plus grand : la cathédrale de Cologne. Avec Jérusalem, la “Ville Sainte”, avec Rome, la “Ville éternelle”, avec Saint-Jacques-de-Compostelle en Espagne, Cologne, grâce aux Mages, est devenu au fil des siècles un des lieux de pèlerinage les plus importants de l’Occident chrétien”.