Trop souvent minimisée, la violence verbale est un traumatisme chez les enfants et les adultes en devenir. Pour la première fois en France, une campagne sensibilise le grand public sur les répercussions de certains mots à l’égard des enfants.
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« Non mais t’es débile ou quoi ? ». La phrase semble anodine. Répétée jour après jour à un enfant, elle est d’une violence inouïe et insidieuse. Ces mots marquent l’individu pendant ses premières années et plus tard dans sa vie d’adulte. La campagne diffusée à partir du 15 septembre 2017 à la télévision et sur internet « Les mots qui font mal », lancée par les deux associations Stop VEO – Enfance sans violences et l’Observatoire de la violence éducative ordinaire (OVEO), secoue les mentalités et pointe la violence verbale infligée aux enfants.
Ces mots qui font mal
Verbale, physique ou psychologique, les atteintes envers les enfants font souvent référence à la violence éducative ordinaire (plus connu sous le sigle VEO), une certaine banalisation des châtiments utilisés à titre éducatif et admis par habitude. La violence éducative ordinaire se traduit à travers des claques, fessées, tapes mais aussi des humiliations, chantages affectifs, etc. Loin d’être un faux problème, la violence verbale est au coeur des préoccupations.
Plus difficile à analyser et à quantifier, c’est pourtant un fléau qui touche de nombreuses familles. « Tu l’as pas volée celle-là ! », « Qu’est ce que j’ai fait pour avoir un fils comme toi ? » ou « Tu as toujours été plus lent que ton frère » sont des mots qui font mal et pour longtemps.
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Une campagne pour faire réagir
Moins visible que la violence physique (2 enfants meurent chaque jour sous les coups de leurs parents en France), la violence verbale est pourtant un problème lourd de conséquences. Nombre de gens la pense encore normale. Afin de faire évoluer les mentalités, les deux associations (Stop VEO – Enfances sans violences et l’OVEO) ont souhaité orienter leur travail sur les mots et leurs traumatismes.
« Pour avoir un résultat, nous avons besoin de cibler, souligne Olivier Maurel, fondateur de l’OVEO. La violence verbale est l’une des plus fréquentes. Elle marque profondément l’enfant qui n’a pas d’outil pour se défendre, il a une grande confiance en ses parents et prend très au sérieux ses propos. Quelques mots peuvent ruiner son estime de soi et lui laisser un fardeau à l’esprit. » Ce n’est pas anodin si le clip vidéo ne montre pas d’enfant. Les cinq personnes témoignent d’un souvenir d’enfance. Sans l’évoquer, le spectateur comprend par lui-même le traumatisme enfoui depuis de nombreuses années.
Le respect de l’enfant pour devenir un adulte épanoui
En étant enfant, la violence verbale entraîne le plus souvent une perte de l’estime de soi, avec une souffrance terrible, une incapacité à être heureux. « Ces mots… Deux secondes pour les sortir de la bouche, une vie pour les réparer », témoigne une internaute sur la page Facebook de l’association Stop VEO – Enfances sans violences. Ils paraissent même souvent anodins pour les parents. « Quand j’étais petite, ma mère me disait tout le temps en rentrant à la maison « Laisse moi tranquille ! J’ai besoin de souffler », se rappelle Camille. Rien de bien méchant mais ce refrain quotidien m’a fait grandir sur la pointe des pieds, avec le souci de ne jamais déranger. Un poids presque invisible qui s’est ancré en moi au fil des années. »
Les mentalités commencent à évoluer avec une considération de l’enfant. Une étape nécessaire pour le faire grandir de façon équilibrée. Depuis ces dernières décennies, des recherches s’orientent vers la prise de conscience de l’enfant en qualité d’individu. « Alors qu’on le sous-estimait en le traitant de « mioche », « morveux » et même « chiard », l’enfant est un animal social avec un cerveau programmé pour vivre en société grâce à toutes ses capacités relationnelles, décrypte Olivier Maurel de l’OVEO. Il possède en lui, de façon inné, l’attachement qui est la base de l’amour, l’imitation pour l’apprentissage, l’empathie pour ressentir les émotions des autres et mettre un frein à la violence, et l’altruisme. Tous ces atouts ont besoin d’être respectés, pas mutilés. Toutes ces petites vexations et humiliations nous coupent notre enfance. »
L’adulte a besoin de faire lui-même une analyse de son passé. « Une prise de conscience est nécessaire pour renouer avec l’enfant que nous avons été, poursuit Olivier Maurel. Les images de la campagne tendent à interpeller les gens pour qu’ils se rendent compte des violences qu’ils ont subi. » Le parent doit revoir son enfance, se remettre en mémoire ses propres blessures pour comprendre l’importance du traumatisme. Une première étape nécessaire pour éviter de reproduire la violence verbale d’une génération à l’autre. Un premier pas vers l’écoute des émotions de son enfant. « Sans intégrer ses propres difficultés, on ne peut pas entendre les besoins de l’enfant, appuie Olivier Maurel. Or il est essentiel pour lui de mettre des mots sur ses maux. »
En savoir plus : Stop VEO – Enfances sans violences sur stopveo.org et OVEO sur www.oveo.org
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