Répandues dans le Nord de l’Italie, à San Marin et en Corse, les Strozzapreti auraient une origine à faire froid dans le dos selon une légende anticléricale.
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L’étymologie ne souffre aucune ambiguïté. En italien, “strozzapreti” signifie “étrangleuse de prêtre” ou “étouffeuse de prêtre”. Une dénomination bien peu engageante pour une pâte traditionnelle et savoureuse, que l’on consommait souvent dans les régions pauvres. Oblongue et courte, sa section présente la forme caractéristique d’un “S”. Certains y reconnaissent aussi la forme d’un tire-bouchon, voire d’un nœud de pendu…
L’histoire des “strozzapreti” est incertaine, mais selon plusieurs sources, ces pâtes trouveraient leurs origines au XVIe siècle, lorsque de pauvres femmes du centre de la péninsule auraient voulu jeter une malédiction sur des prêtres gloutons qui vivaient grassement des rentes et prérogatives dont ils jouissaient du temps où la région était placée sous la souveraineté de Vatican.
Le récit a tout de la légende anticléricale. On raconte ainsi qu’à cette époque, les régions détenues par le Pape étaient sillonnées par des prêtres bedonnants et prédateurs qui s’invitaient sans vergogne dans les auberges, les tavernes et chez les particuliers pour faire ripaille et dormir dans un lit douillet. Impossible de refuser quoi que ce soit à ce clergé vorace, au risque d’encourir sinon une sanction sévère.
Malédiction, gratitude ou symbole meurtrier ?
La seule résistance possible était donc le recours aux sorts et à la malédiction. Pendant qu’elles préparaient les fameuses pâtes, à chaque torsion pratiquée sur le tronçon pour lui donner la forme voulue, les cuisinières répétaient des invocations pour provoquer l’étouffement des prêtres. “Qu’ils soient maudits, qu’ils soient maudits”, telle était la sinistre litanie qui résonnait au dessus des fourneaux et des casseroles. Les incantations se seraient révélées efficaces dans certains cas : plusieurs hommes d’Église seraient tombés raides étouffés, la face dans leur assiette débordant de sauce tomate.
Il existe un autre récit, sans doute plus conforme à la réalité : celle d’un État pontifical certes puissant, mais dans lequel vivait aussi un clergé rural modeste, qui partageait le quotidien des paysans et manœuvres. Et précisément, c’est pour marquer leur reconnaissance et leur affection envers ces curés, que les villageoises avaient à cœur de leur préparer ces délicieuses pâtes dont ils raffolaient, quitte à passer parfois à deux doigts de l’étouffement ou de l’apoplexie.
Une autre interprétation fait remonter les strozzapreti au XIXe siècle et à la grande vague anticléricale qui a traversé l’Italie alors. Les pâtes auraient alors été baptisées ainsi car leur forme évoquait très nettement celle des nœuds de cuir utilisés par les nervis et bandits pour étrangler de leurs mains les prêtres qu’ils pourchassaient sur les grands chemins.
Sans doute ne saura-t-on finalement jamais quelle est l’origine véritable de cette dénomination. Mais par principe de précaution, on ne saurait que trop recommander aux gourmands qui auront la chance de les goûter sur les tables italiennes de prendre le temps de bien les mâcher avant de les avaler.