Et comment aider nos proches à traverser ces périodes douloureuses ?Quand Nicole s’est mariée à 36 ans, cela faisait déjà un moment qu’elle songeait à la maternité. Lorsqu’elle découvrit quelques mois seulement après le mariage qu’elle était enceinte, son mari Bertrand et elle furent remplis de joie. Ils passèrent des semaines à faire des plans pour l’avenir et à chérir la petite vie qui grandissait en elle. En janvier, juste avant d’entamer le 2e trimestre, elle se mit à avoir des saignements. Les causes des saignements sont nombreuses et variées, mais elle quitta son médecin sur un diagnostic sans appel et ses pires craintes confirmées : plus de battements cardiaques, elle avait perdu le bébé.
Sophie et son mari avaient déjà un enfant – un garçon – mais ils rêvaient d’agrandir la famille. Chaque mois, l’espoir s’amenuisait. Pendant deux ans et demi, il ne se passa rien. Durant cette longue période, Sophie voyait tous les amis de son entourage continuer à accueillir des enfants et sa douleur se faisait plus vive.
Le soutien des proches est primordial
Il est probable que vous connaissiez vous aussi une Nicole, une Sophie ou un Bertrand. D’ailleurs il est probable que vous en connaissiez un certain nombre. Quand on commence à parler de fausses couches ou d’infertilité, que ce soit avec des gens ayant des enfants ou non, bien souvent les témoignages affluent. Mais, comme pour tout type de deuil, de peine ou de souffrance, il peut être difficile de savoir comment soutenir ces personnes, même si elles nous sont proches. Sophie, Bertrand et Nicole nous font bénéficier de leurs expériences.
“J’ai l’impression que parfois, les gens ont tellement peur d’être maladroits qu’ils préfèrent ne rien dire”, avance Nicole. “Prenez le risque d’offrir un soutien, même si tout ne sort pas correctement.”
On a vite fait de ressentir une forme de pression dans ces situations : vais-je trouver les mots justes ? Vais-je faire ce qu’il faut ? Bertrand suggère de passer outre ces interrogations car il est très important de ne pas perdre le contact avec la personne en deuil. “Quand on est dans une telle souffrance, cette distance pourrait être prise pour de l’insensibilité à notre égard. Or tout ce dont on a besoin, c’est de gens qui n’ont pas peur de partager notre deuil et de le vivre avec nous.”
Pour Nicole, ce soutien s’est manifesté de différentes manières : des personnes qui lui apportaient à manger, qui prêtaient une oreille attentive quand elle avait besoin de parler, ou qui passaient simplement du temps avec elle à faire des choses normales. “J’ai eu l’impression qu’à travers ces attentions, les gens essayaient d’alléger mon fardeau.”
Apprendre à se déculpabiliser
Sophie et son mari ont fait part de leurs difficultés à un petit cercle d’amis. L’un des conseils les plus précieux est venu de leur acuponctrice : “Elle m’a dit “La fertilité dépend d’un certain nombre de facteurs. Imaginez-vous un filet. Votre corps n’est qu’une maille du filet. On essaie de travailler au niveau de cette maille, mais on sait qu’on ne peut pas influencer les autres.” Cette image fut pour moi à la fois belle et libératrice. Car elle m’a permis de me dire “Ce n’est pas uniquement de ma faute.” Cette image forte du filet est venue remplacer celle de mon utérus défaillant. Cela m’a apporté un grand réconfort.”
Suite à sa fausse couche, Nicole ne se sentait pas vraiment en mesure de s’occuper d’elle. “Je pense que j’étais vraiment fâchée contre mon corps qui m’avait lâchée. Je me disais : “Voilà, c’étaient tes grands débuts dans la maternité, et tu as échoué, tu n’as pas su protéger ce bébé.” Pendant cette période, il était important que chaque membre du couple puisse se reposer sur l’autre. “C’est difficile d’imaginer traverser ça seule ou avec quelqu’un se sentant moins concerné. Nous avons beaucoup pleuré ensemble. Bertrand n’a jamais essayé de minimiser ce qui était arrivé. Et il ne m’a jamais mis la pression pour que j’aille mieux plus vite ou qu’on réessaye d’avoir un enfant rapidement.”
Nicole a parlé de sa fausse couche à quelques amis, mais elle admet que c’était difficile. Elle ne savait pas comment aborder le sujet. “Qu’est-ce qu’on dit dans ces cas-là ? J’ai perdu le bébé et mon rêve s’est effondré ?” Elle et son mari sont reconnaissants envers ceux qui leur ont tendu la main, ont pris des nouvelles, leur ont rendu service et ont tout fait pour les soutenir. Désormais, Charlie se sent instinctivement plus proche des personnes qui vivent ce genre de deuil. “Il peut être très difficile de demander, ou même de savoir ce dont on a besoin dans ces périodes-là. Je pense que depuis, j’essaie de sentir quand les gens ont simplement besoin de rester un peu dans cette phase de “torpeur” et d’entendre “Ça a l’air vraiment difficile, tout ce que tu traverses, tu veux en parler ?””
L’essentiel, c’est l’accompagnement
Il y a bien eu quelques remarques douloureuses, mais elles furent peu nombreuses. Nicole se souvient de commentaires concernant son corps qui “avait besoin de s’entraîner”, et de phrases comme “vous aurez d’autres chances”, qui la laissaient de marbre. Sophie et elle ont été blessées par la rapidité avec laquelle certains dégainaient des remarques toutes faites comme “Rien n’arrive par hasard.”
“Quand quelqu’un invoque des raisons théologiques pour expliquer ces situations, c’est trop souvent par peur”, fait remarquer Sophie. “Un simple “Je t’aime, tu comptes pour nous”, c’est merveilleux.”
Nicole, Sophie et Bertrand s’accordent tous les trois pour dire que la meilleure façon de soutenir des proches traversant des épreuves douloureuses telles qu’une fausse couche ou l’infertilité est tout simplement d’être présent et à l’écoute. “On est toujours reconnaissants d’avoir des amis dans sa vie”, constate Nicole. “Mais c’est dans des périodes comme celles-ci qu’on se rend vraiment compte de leur valeur inestimable.”