Que répondre lorsque l’on vous accuse, vous ou l’Église catholique, du “crime” d’idolâtrie ?Tuer, faire du trafic de drogue, voler son prochain… tout cela n’a pas d’importance. Non, le péché qui excite le plus la fureur de nos frères musulmans c’est l’idolâtrie ! Et sur ce point, quasiment tous les catholiques ont fait l’objet de critiques dans leur vie. Mais les catholiques sont-ils vraiment des idolâtres ?
Les idoles dans la Bible
La stratégie de l’accusation est toujours la même : attraper un passage de la Bible, le tirer de son contexte et vous le lancer impitoyablement à la figure. Les plus savants de nos adversaires, bien informés, brandissent même un verset massue, à savoir Exode 20, 3-5 où Dieu dit :
Tu n’auras pas d’autres dieux en face de moi. Tu ne feras aucune idole, aucune image de ce qui est là-haut dans les cieux, ou en bas sur la terre, ou dans les eaux par-dessous la terre. Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux, pour leur rendre un culte (…).
Et c’est vrai, d’emblée le texte ne laisse aucune place au doute : rendre un culte à des images ou statues de saints, comme nous le faisons nous catholiques, serait réellement un péché gravissime… à l’époque de l’Ancien Testament ! L’interdiction était alors absolument nécessaire, mais elle a perdu son sens quand l’Ancien Testament a fait place au Nouveau.
Je m’explique : les gens qui ont vécu l’Exode étaient en grande partie idolâtres. La croyance dans le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob n’immunisait pas contre l’influence religieuse des autres. Ainsi, le culte des idoles – d’abord le veau d’or, puis Baal – constituait une source fréquente de contrariété et de déception pour le Seigneur. Donc, il y avait un grand risque que les Hébreux perçoivent le Dieu de l’Alliance comme un dieu de plus, le dieu qui était “à la mode” à ce moment-là, et non pas comme le Dieu Unique et Vrai. Yahweh avait besoin de définir clairement l’abîme qu’il y avait entre les idoles et Lui : Il n’est pas un produit de l’esprit humain et sa doctrine non plus. Il est le Dieu qui s’est révélé, Il est Celui qui Est : “Je Suis Qui Je Suis” (Ex 3, 14). Les idoles, quant à elles, étaient des objets pathétiques et impuissants en bois, en métal ou en pierre, représentant des systèmes religieux et doctrines créés par l’imagination humaine.
Il fallait donc prendre une mesure éducative : interdire aux gens de faire toute image du Seigneur, afin qu’il soit bien clair qu’Il n’était pas un dieu de plus inventé, façonné par des mains humaines. Sans compter que personne ne connaissait son visage, et aucune image ne pouvait être à la hauteur de son immense gloire :
Prenez bien garde à vous-mêmes : vous n’avez vu aucune forme le jour où le Seigneur vous a parlé à l’Horeb du milieu du feu. N’allez pas vous corrompre en vous fabriquant une idole, une statue de quelque forme que ce soit (…).
(Dt 4, 15-16)
Une fois comprise la raison de l’interdiction du culte des images, nous passons à la deuxième partie de l’Histoire…
Le miracle de Noël
Dieu pour finir nous a montré son Visage. Tout le pouvoir, l’amour, la beauté, la miséricorde et la force de Dieu sans visage et sans nom intègrent désormais le corps d’un Petit Enfant. Les yeux des hommes pouvaient enfin contempler le visage du Créateur : “Celui qui me voit voit Celui qui m’a envoyé” (Jn 12, 45).
Le nez ou les yeux pouvaient peut-être ressembler à ceux de sa Mère. Peut-être. Mais une chose est sûre : les traits du visage de Jésus ne seraient jamais oubliés ou ignorés par les chrétiens de la communauté primitive. Les murs des catacombes sont là, pour ceux qui veulent et peuvent voir : peintures de saints – y compris de Marie ! – et de personnages bibliques partout.
La Tradition de l’Église
Ainsi, on ne peut pas comprendre la Bible sans prendre en considération la Tradition de l’Église, laquelle a compris dès les premiers siècles que les icônes qui représentaient le Seigneur, Marie et les saints exprimaient légitimement la foi et l’espérance de notre peuple.
Il convient de le rappeler : l’interdiction du culte des images est directement liée à la lutte contre le culte des autres dieux. Ainsi, le commandement qui condamne l’idolâtrie ne s’applique pas dans le cas des images catholiques, puisque celles-ci nous rappellent la gloire du Christ Lui-même. Les icônes catholiques nous offrent un témoignage de la vie de personnages réels et historiques (et non imaginaires, comme les idoles), qui consacrent leur vie au Seigneur.
La relation des catholiques avec les images de Jésus et de saints est comparable à celle que l’on a avec les photographies de proches. Quand nous regardons l’image de quelqu’un qui a du prix à nos yeux, notre affection se projette ; nous conservons avec affection les photos dans notre portefeuille, nous les plaçons à l’honneur dans notre chambre, nous embrassons le papier inerte lorsque nous sommes pris de nostalgie (…). Et aucune personne, si stupide soit-elle, n’aurait idée de faire un commentaire malencontreux faisant allusion à de l’ “idolâtrie”.
En conclusion, je dirais que cet article n’est pas destiné à vous donner une arme pour que vous, les catholiques, puissiez vous justifier lorsque l’on vous critique. Pas la peine de dépenser votre salive (sauf dans les rares cas où il y a la possibilité d’un dialogue honnête et objectif). La discussion ici est vraiment pour nous aider à comprendre les racines de notre propre identité. Donc, sachant qui nous sommes et pour qui nous sommes, nous devenons davantage capables de vivre notre foi de façon joyeuse, libre et consciente.
C’est pourquoi, si quelqu’un vous accuse d’être idolâtre, ne discutez pas. Laissez courir.