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Le chemin de croix du bienheureux Oscar Romero

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Philippe Oswald - publié le 16/02/16
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Assassiné en mars 1980 alors qu’il célébrait la messe, l’archevêque de San Salvador s’attendait à subir le martyre. Une biographie très complète retrace cette vie offerte à l’exemple du Christ.Il était 18 h 25 ce 24 mars 1980, lundi de la dernière semaine de Carême, quand Mgr Romero s’effondra sur l’autel de la chapelle de l’hôpital de la Divine Providence à San Salvador, foudroyé par une balle explosive en plein cœur.  Il venait d’achever l’homélie par ces mots : “Que ce corps immolé et ce sang sacrifié pour les hommes nous aide à offrir notre corps et notre sang à la souffrance et à la douleur, comme le Christ, non pas pour soi mais pour apporter les fruits de la justice et de la paix à notre peuple”.

“Un grand témoin de la foi”

Le pape Benoît XVI avait confié qu’il souhaitait la béatification de ce “grand témoin de la foi”. C’est à son successeur François, le premier Pape venu d’Amérique latine, qu’il revint de reconnaître Oscar Romero (1917-1980) comme “martyr de la foi”, ouvrant la voie à sa béatification, célébrée le 23 mai 2015, à San Salvador. Il aura fallu 35 ans d’une longue enquête donnant lieu à de nombreuses clarifications pour que le vrai visage de Mgr Oscar Romero apparaisse comme une lumière donnée à toute l’Église, spécialement en Amérique latine, loin de toutes les récupérations politiques. Heureusement traduite en français, la minutieuse mais passionnante biographie que lui a consacrée Roberto Morozzo della Rocca, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Rome 3, permet de suivre pas à pas l’inexorable montée au Calvaire d’Oscar Romero, et de corriger les visions partiales véhiculées par ses ennemis comme par certains de ses amis.

Un gêneur pour les deux camps

L’archevêque de San Salvador fut certes l’une des victimes de l’atroce guerre civile qui fit 80 000 morts entre la fin des années 70 et le début des années 90 dans ce petit pays de 4 millions d’habitants. Mais le primat fut un symbole. Son indépendance et ses critiques à l’égard de l’oligarchie d’extrême droite et de la junte militaire qui la servait comme son refus d’épouser la cause de la guérilla marxiste qui séduisit malheureusement des religieux et des prêtres, en faisaient un gêneur de premier plan dans les deux camps. Mais le plus poignant, sans doute, dans son martyre, vient des trahisons et des calomnies qu’il endura dans son pays et à Rome, de la part de frères dans l’épiscopat jaloux de sa nomination par Paul VI comme archevêque de la capitale, et de l’ascendant de ses interventions et homélies sur le peuple.  Il était devenu la “voz de los sin voz”, la voix de ceux qui, pris entre le marteau et l’enclume, n’avaient jamais la parole.

“Il m’en coûte d’accepter une mort violente”

Ses propos n’avaient rien de révolutionnaires ou plutôt, si, ils l’étaient, mais selon la seule révolution qui vaille, celle de l’Évangile. Mgr Romero n’était pas un théologien, encore moins un idéologue, mais un pasteur pieux, clairvoyant et aimant, souffrant avec son peuple, et refusant de se taire face aux injustices criantes et à la terreur destinée à les perpétuer. Il n’avait pas non plus l’étoffe d’un superman défiant les dangers et bravant la mort : “Il m’en coûte d’accepter une mort violente”, avait-il noté dans son journal intime. En visite à Rome quelques mois avant son assassinat, il avait confié au secrétaire (et futur préfet) de la Congrégation des évêques, le brésilien Moreira Neves, qu’il pensait être prochainement assassiné et qu’il ne savait pas si ce serait par la droite ou par la gauche.

C’est sa fidélité au Christ et à l’Église, ainsi que son attachement indéfectible au Pape, qui le conduisirent pas à pas à s’offrir lui-même en oblation au prix d’une douloureuse agonie. Comment ne pas être saisi par sa configuration au Christ du jardin des Oliviers dont témoignent les derniers mois de sa vie ?

Mgr Oscar Romero par Roberto Morozzo della Rocca, préface de Jean-Dominique Durand, professeur d’Histoire contemporaine à l’université de Lyon, traduit de l’italien par Chrystèle Francillon, éditions Desclée de Brouwer, 456 pages, 23 euros.

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