Sainte Anne, messagère d’unité et de transmission

Chacun a-t-il déjà réfléchi à l'importance des grands-parents dans sa vie ? Ces figures silencieuses mais puissantes qui transmettent bien plus que des histoires ou des conseils. Sainte Anne, la grand-mère de Jésus, la mère de la Vierge Marie, est non seulement la patronne des Bretons, mais également une icône intergénérationnelle qui peut inspirer chacun de nous.

Il est important de s’arrêter quelques minutes et d’imaginer. Sainte Anne, une femme simple, élevée dans la foi et l’amour de Dieu, devient la première éducatrice de sa fille, Marie. Les représentations de saint Anne sont parlantes : la plupart du temps, elle est représentée avec un livre posé sur ces genoux, Marie enfant à ses côtés lisant ce que lui montre sa mère. Elle lui enseigne les prières, lui transmet les Écritures, tout ce qui façonnera celle qui deviendra la Mère de Dieu. Cette simplicité de cœur qui l’amènera à son fiat. La statue de sainte Anne d’Auray montre d’ailleurs Marie, et Marie montre le Ciel, c’est-à-dire Jésus.

Cette relation entre une mère et sa fille est profondément symbolique. Elle illustre à quel point chaque génération joue un rôle essentiel dans la transmission de ce qui fait notre humanité : la sagesse, l’expérience, et bien sûr, la foi. En tant que grand-mère de Jésus, sainte Anne représente donc cet ancrage familial indispensable. Elle rappelle que chaque enfant porte en lui une mission unique, qu’il appartient aux générations précédentes de guider avec amour et patience. Dans le climat actuel, où les liens familiaux peuvent parfois sembler distendus, sainte Anne apparaît comme un exemple à suivre. Elle invite à renforcer ces passerelles entre jeunes et aînés à l’image d’une communion intergénérationnelle.

En visitant la magnifique basilique de Sainte-Anne-d'Auray (Morbihan) ou le sanctuaire de Sainte Anne-la-Palud (Finistère), il est facile de comprendre à quel point saint Anne est chère aux cœurs bretons. D’autres chapelles plus ou moins anciennes dédiées à sainte Anne existent, à Brandérion ou à Cléguérec, Saint-Dolay et Quévert, à Fouesnant ou Sel-de-Bretagne.

À Sainte Anne d’Auray, sa dévotion remonte au XVIIe siècle Tout commence avec Yvon Nicolazic, modeste paysan breton. Sainte Anne lui demanda de reconstruire une chapelle sur un terrain précis. Ce lieu devint rapidement un centre de pèlerinage incontournable, attirant des milliers de fidèles. Mais si sainte Anne demande de reconstruire une chapelle, c’est qu’il en existait une auparavant. C’est ce qu’affirme sainte Anne à Nicolazic : "Avant même qu’il y ait eu aucun village, une chapelle, la première qui me fût dédiée dans le pays des Bretons. Il y a aujourd’hui neuf cent vingt-quatre ans et six mois qu’elle est ruinée. Je désire qu’elle soit rebâtie au plus tôt, et que vous preniez soin vous-même de cela. Dieu veut que je sois honorée ici."

Cette dévotion est donc bien antérieure aux apparitions. Elle se retrouve également du côté de Branderion ou à Saint-Anne-la-Palud. Pour les Bretons, sainte Anne incarne depuis des siècles bien plus qu’une figure religieuse. Ce sont les parents et les grands-parents qui forgent l’identité. Ils sont de nos racines. Sainte Anne est donc autant un phare qui éclaire la proue de l’Europe qu’une de ses racines porteuses de l’identité culturelle et spirituelle bretonne, largement transmise au monde par la somme de missionnaires qu’a donné la Bretagne. À travers la mère de Marie, se déploie la continuité entre le passé et le présent, dans l’espérance d’un avenir prometteur.

Loin d’être une figure du passé, qu’apprendre de sainte Anne aujourd’hui ? La première leçon est la valorisation des aînés. Les grands-parents, parents ou mentors ont une richesse d’expériences et une sagesse de vie à partager. Il est urgent de se mettre à l’écoute des grands-parents, pour celles et ceux qui en ont encore. Ils sont bien souvent l’expression de la solidité granitique dans un monde changeant. Ils sont comme les colonnes d’une cathédrale, des soutiens essentiels pour ceux qui viennent après eux. Ils sont comme ce chêne qui brave les tempêtes face aux roseaux qui se plient.

Sainte Anne et saint Joachim son époux peuvent donc éclairer. Quelle que soit sa situation, chacun est en capacité de créer des moments de partage avec ses proches et renforcer ainsi les liens familiaux. Durant l’épidémie de Covid19, bien des familles se sont retrouvées séparées, et les anciens souvent isolés. Beaucoup ont pu percevoir l’importance de ce lien essentiel dans une vie qui s’écoule. Or ces moments de partage sont autant d’instants de transmission. Que ce soit pour le trésor de la foi, l’amour des traditions ou simplement des valeurs d’humanité et d’amour, ce sont des ponts entre les générations et une source d’inspiration pour des jeunes qui cherchent leur chemin. Les anciens représentent donc une bénédiction à considérer.

Pour le chrétien ou celui qui est sur le parvis, la grand-mère de Jésus est avant tout une figure de transmission. Elle laisse percevoir que chaque génération a une responsabilité vis-à-vis des autres. Que ce soit en famille, dans nos communautés ou même dans nos sociétés modernes, elle encourage à prendre du temps à l’écoute mutuelle, et à se mettre à l’école de vie de nos anciens. Lors de la Troménie de Sainte Anne initiée par le diocèse de Vannes à l’occasion du Jubilé des apparitions à Yvon Nicolazic, des rendez-vous seront donnés pour une bénédiction des grands-parents. L’occasion pour chacun de vivre un moment avec et pour nos aînés, sans qui nous ne serions pas là, enveloppés dans le manteau de sainte Anne.