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Carême : faire des efforts oui, mais pas n’importe comment !

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Clément Binachon - publié le 28/02/25
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Le carême demande des efforts, c’est vrai, mais pas n’importe comment ! Auteur de "L’Entraînement et la Grâce" (Cerf), le frère dominicain Clément Binachon montre comment nos efforts peuvent faire grandir l’amour de Dieu en nous et comment l’amour de Dieu peut orienter nos efforts.

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Chaque année la liturgie du carême invite les chrétiens à l’effort. La messe du mercredi des Cendres donne le ton. On y demande au Seigneur "de savoir commencer saintement, par une journée de jeûne, notre entraînement au combat spirituel : pour que nos privations nous rendent plus forts pour lutter contre l’esprit du mal". Jeûne, entraînement, combat et privations, ce n’est pas un séjour au Club Med qui s’annonce ! Il va falloir fournir des efforts. Et pourtant il ne s’agit pas simplement de se retrousser les manches et foncer dans le tas, comme un pilier de rugby dans la mêlée, les yeux fixés sur le gazon, uniquement concentré sur l’effort de ses fessiers ! Le carême demande des efforts, c’est vrai ; mais pas n’importe comment. 

Au service de la charité

À vrai dire, l’articulation entre effort humain et travail de la grâce constitue une immense question qui remplit plusieurs rayonnages dans les bibliothèques de théologie, car les erreurs en ce domaine se paient par de graves impasses spirituelles. Heureusement, les éclairages de la Tradition balisent une ligne de crête entre l’hérésie de Pélage qui croyait conquérir sa sainteté à la force du poignet et celle des quiétistes qui espéraient l’obtenir en se tournant les pouces. 

Il est donc d’une souveraine importance de bien situer nos efforts théologiquement. Or, pour que nos exercices de carême soient authentiquement chrétiens, ils doivent être au service de la seule chose qui compte vraiment : la charité. Pour que nos efforts soient chrétiens, il faut qu’ils soient, ultimement, ordonnés à la croissance de l’amour vrai de Dieu et du prochain. 

Les efforts du jeune homme amoureux

Prendre la charité comme source et fin de nos efforts de carême, cela signifie les inscrire dans la dynamique de l’amour. Prenons l’exemple d’un jeune homme encore un peu adolescent. Il passe beaucoup de temps sur les écrans, porte ses tee-shirts — même sales — le plus longtemps possible et ne fait pas plus attention à la quantité de bières qu’il boit qu’au nombre de pizzas qu’il ingurgite. Si notre jeune homme tombe amoureux d’une princesse (une vraie princesse : vertueuse, classe et toujours élégante) et si — par miracle — la princesse tombe aussi sous le charme du jeune homme, il est inévitable que ce dernier désire réformer sa vie. Leur amour va lui faire désirer devenir meilleur. Parce qu’il aime la princesse, il veut lui plaire. Parce qu’il veut lui plaire, il va faire des efforts (c’est-à-dire lâcher ses jeux vidéo, laver ses vêtements et abandonner le régime bière-pizza). La Bible proclame à toutes les pages que Dieu veut établir une relation d’amour avec chacun de nous. Il est donc normal que cet amour suscite en nous le désir de nous convertir. Tout l’enjeu de notre carême consiste à maintenir vivant ce lien entre nos petits exercices et l’amour de Dieu en nous.

Discerner nos efforts dans la prière

Concrètement, cela signifie trois choses. Primo, porter et discerner nos efforts dans la prière. C’est dans la prière, sous le regard du Seigneur, que nous pouvons discerner si nos désirs d’effort correspondent vraiment à notre désir de mieux servir Dieu — et non pas simplement à la construction d’une meilleure image de nous-mêmes. Si nous suivons un parcours de carême, il est crucial de connecter les efforts qu’il exige avec notre relation avec le Seigneur.  

Si mon effort ne me coûte rien, il ne me fait pas grandir. Toutefois, quand la charité grandit, même si la lutte contre l’égoïsme est pénible, la joie se déploie aussi.

Secundo, tourner nos efforts vers la croissance de la charité. Inspirés par l’amour de Dieu, nos efforts doivent viser, ultimement, sa croissance. Si nous visons autre chose, ça peut être un régime diététique, du développement personnel ou ce que l’on veut, ce ne sont plus des efforts chrétiens. Évidemment, cela ne signifie pas que chacun de nos efforts va mécaniquement augmenter l’amour de Dieu en nous. En revanche, cela donne une orientation particulière à tous nos exercices de carême. Tous visent à nous disposer pour que grandisse l’amour de Dieu en nous. Directement par la prière ou par l’aumône (entendue au sens large de toute aide apportée à notre prochain) ou indirectement par un jeûne ou une privation : tous sont tendus vers cet objectif ultime. Ce que nous devons donc chercher, c’est comment intensifier notre vie chrétienne. Comment puis-je aimer plus intensément Dieu et mon prochain dans les semaines qui viennent ? Il ne faut pas craindre d’être inventif en ce domaine. Mieux aimer sa femme, ses enfants, son collègue ou son curé, ça demande de l’imagination ! Il est d’abord ici, le combat spirituel que Dieu attend nous voir mener.  

Faire grandir l’amour

Tertio, cesser de mesurer de nos efforts à leur pénibilité psychologique. Ce qui compte, ce n’est pas que mon jeûne, mon aumône ou ma prière, me soit pénible ; ce qui compte c’est que l’amour grandisse ! Bien sûr, c’est dans la nature même de l’effort d’être coûteux. Comme le dit le youtubeur Tibo In Shape — qui n’est pas un père de l’Église : "No pain, no gain." Si mon effort ne me coûte rien, il ne me fait pas grandir. Toutefois, quand la charité grandit, même si la lutte contre l’égoïsme est pénible, la joie se déploie aussi. Faire un détour pour acheter des fleurs à son épouse en rentrant, cela prend un peu de temps, un peu d’argent mais ça apporte aussi de la joie, et cela fait grandir l’amour. Se focaliser sur le coût, c’est regarder dans la mauvaise direction. Il vaut mieux regarder devant avec saint Paul, poursuivre notre course, droit de l’avant, tendu de tout notre être vers le but que Dieu nous appelle à recevoir dans le Christ : la charité, qui jamais ne passera. 

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