Depuis le lancement de son service "Uber pour ados" le 30 octobre dernier, le géant des VTC espère bien convaincre les parents de confier à ses chauffeurs leurs enfants. En effet, avec ce service, les mineurs peuvent désormais commander eux-mêmes une course dans une douzaine de villes françaises depuis le compte d'un de leur parent. Une fonctionnalité qui répond selon l’entreprise aux demandes des parents qui passeraient en moyenne deux heures par semaine à déposer ou récupérer leurs enfants, et même quatre heures pour un tiers d'entre eux. Entre l'école, les activités sportives, les sorties entre amis, ces nombreux trajets pèseraient sur les parents, notamment sur les mères.
Cette fonctionnalité d'Uber qui existe déjà aux États-Unis et dans cinq pays européens met en avant le fait de libérer du temps aux parents. Et c'est d'ailleurs ce qu'apprécie Pauline, ravie de pouvoir laisser sa fille de 16 ans prendre un Uber lorsqu’elle rentre un peu tard d’un entraînement de tennis. Pour Florence, c’est aussi une bonne nouvelle : "Je me souviens de la fois où j’ai dû payer un taxi à mon fils de 14 ans car il devait se rendre rapidement à un rendez-vous médical à Toulouse et je ne pouvais pas l’y emmener retenue par une obligation professionnelle. Ça m’a coûté bien plus cher qu’un Uber !". Romain, 45 ans, voit aussi cette nouveauté d’un bon œil. "On confie bien nos enfants à une hôtesse dans un avion ou dans un train, alors je me dis que lorsqu'on confie son enfant à un chauffeur, il veille à ce qu’il arrive à bon port. Et maintenant qu’il y a le téléphone portable, on peut même suivre le parcours et être rassuré à l’arrivée en direct", explique-t-il. C'est une des promesses d'Uber : assurer la sécurité de tous les adolescents du début jusqu’à la fin de leur trajet tout en permettant à leurs parents d’économiser un temps précieux.
Uber offre également un suivi en temps réel des trajets. Les parents reçoivent le nom du chauffeur, les informations sur le véhicule et la destination demandée. Ils savent ainsi où va leur adolescent et qui est au volant. En outre, ils peuvent joindre à tout moment les chauffeurs. Seuls les chauffeurs les plus "expérimentés" pourront prendre en charge des adolescents. "Ils devront avoir une note d'au moins 4,85", précise à Aleteia Manon Guignard, responsable communication d'Uber France.
Une ubérisation du devoir parental ?
Ce nouveau service n’attire pas spécifiquement Edwige, mère de trois enfants. "Par les temps qui courent, je ne laisserai pas mes enfants seuls dans une voiture avec un inconnu sans aucune raison vitale. S’ils sont chez quelqu’un, soit ils y restent pour dormir, soit je viens les chercher", explique cette Boulonnaise. Si Quentin laisserait peut-être son fils de 17 ans prendre un Uber seul le soir, il n’en est pas question pour sa fille.
Mais la sécurité n'est pas le seul frein. Faut-il déléguer les trajets de ses enfants et les rendre autonomes à un âge où ils sont en pleine construction de leur personnalité ? "À Montpellier, il y a des transports en commun, Antoine s’y déplace déjà librement depuis un an, je ne vois pas pourquoi il aurait besoin d’un Uber", se demande Christophe, convaincu que c'est à lui et personne d'autre de conduire son fils à ses activités ou loisirs. Pour lui, il n'est pas question de déléguer de son rôle de parent. Il estime que c'est à lui de conduire son enfant à ses activités extra-scolaires, ses rendez-vous de médecin ou encore à ses soirées. "Et en ce qui concerne les soirées, il n’en a pas chaque semaine au point de m’épuiser à aller l’y récupérer. Je ne vois donc pas l’intérêt de télécharger l’application sur son téléphone". Quant à Christelle, si elle se dit convaincue par les mesures de sécurité mises en place par Uber, elle ne l’est pas tout autant par la maturité de son fils Gabriel, âgé de 13 ans. "On le sait, le cerveau d'un ado n'est pas encore bien constitué à cet âge. Il saura incapable de gérer une situation de crise comme un accident par exemple".
Ce nouveau service suppose que l’adolescent ait un smartphone et soit invité par un adulte titulaire d'un compte sur l'application. L'adolescent pourra ensuite commander ses courses, sans l'accord de l'adulte. "Ce dernier pourra fixer un plafond de dépenses mensuelles, s’il ne souhaite pas que son moyen de paiement, rattaché au compte du mineur, soit utilisé à outrance", précise Manon Guignard. L’adulte sera seulement notifié de la course qu'il pourra suivre en temps réel. "Pour cela, encore faut-il que ma fille ait un téléphone portable, et chez nous, les enfants n’en n’ont pas avant leurs 16 ans", lance Catherine, qui préfère elle aussi effectuer les trajets elle-même pour ses enfants. Uber assure qu'aux États-Unis, où Uber for Teens a été lancé il y a un an, les retours sur l’utilisation de ce service sont positifs. Reste à savoir si l’application séduira autant en France.