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Conflits intérieurs ou guerres internationales, la paix est vraiment l’affaire de tous

Paix Guerre Diplomatie

Image d'illustration.

Jean-Baptiste Noé - publié le 27/06/24
Publiée en 1963, consacrée à la paix, l’encyclique "Pacem in terris" peut sembler obsolète en 2024 tant le monde a changé. Pourtant, plusieurs principes évoqués par Jean XXIII peuvent toujours servir de guide pour la résolution des guerres en cours mais aussi des conflits politiques intérieurs.

C’était au temps de la Guerre froide, du tiers-monde et de l’affrontement des blocs. En octobre 1962, le monde avait failli sombrer dans la guerre nucléaire lors de la crise des missiles de Cuba. Six mois plus tard, Jean XXIII, qui avait joué un rôle essentiel dans les négociations entre Américains et Soviétiques, publiait une encyclique majeure, Pacem in terris, consacrée à la paix dans le monde. S’il évoque les grands problèmes de son temps, notamment la guerre nucléaire, l’indépendance des nouveaux États issus de la colonisation, l’affrontement idéologique entre l’Est et l’Ouest, le pape Jean s’appuie sur les principes de la Doctrine sociale de l’Église, ce qui donne à son texte un intérêt qui dépasse le simple cadre des circonstances de l’année 1963. Relire aujourd'hui l’encyclique permet de dégager quelques pistes qui peuvent éclairer les conflits en cours et la responsabilité de chacun. 

La paix et le respect des peuples

Tout au long de son texte, Jean XXIII évoque à plusieurs reprises la question du "peuple", terme beaucoup plus usité, vingt-six fois, que "nation" (cinq fois) et "État" (six fois). Un peuple qui espère, dans la justice, la paix et l’ordre dans sa société contre les idéologies qui sont facteurs de désordre et de dissolution. Quelques années après les indépendances, le pape évoquait l’aide que les pays développés apportaient aux pays pauvres, une aide qui ne devait pas aller à l’encontre des cultures nationales et des particularismes locaux, mais répondre au devoir de justice des pays avancés à l’égard des plus faibles : 

"Certaines communautés politiques peuvent se trouver en avance sur d'autres dans le domaine des sciences, de la culture, du développement économique. Bien loin d'autoriser une domination injuste sur les peuples moins favorisés, cette supériorité oblige à contribuer plus largement au progrès général" (n. 88).

La colonisation idéologique

Une idée reprise par les autres papes, jusqu’à aujourd'hui, quand François s’est exprimé à plusieurs reprises contre la colonisation idéologique, qui consiste à subordonner des aides internationales à l’adoption de lois et de mesures en faveur de de l’avortement ou de l’extension des droits des personnes LGBT. Or les États ont le devoir de respecter les libertés de chaque peuple et de chaque État, ainsi que leurs particularismes :

"L'organisation internationale doit respecter la liberté. Ce principe interdit aux nations toute ingérence dans les affaires internes des autres comme toute action oppressive à leur égard. À chacune, au contraire, de favoriser chez les autres l'épanouissement du sens des responsabilités, d'encourager leurs bonnes initiatives et de les aider à promouvoir elles-mêmes leur développement dans tous les secteurs" (n. 120).

Pour conclure plus loin :

"Mais, soulignons-le avec insistance, l’aide apportée à ces peuples ne peut s'accompagner d'aucun empiètement sur leur indépendance. Ils doivent d'ailleurs se sentir les principaux artisans et les premiers responsables de leur progrès économique et social" (n. 123).

Opposition à la paix armée

Jean XXIII s’oppose également à l’idée d’une paix armée qui serait fondée sur l’équilibre de la terreur. S’armer pour décourager l’attaque d’un tiers, se doter de l’arme nucléaire pour se protéger du feu adverse, ce que les stratégistes nomment "l’équilibre de la terreur" et ce que Jean XXIII a toujours refusé, estimant que la paix ne pouvait venir que du désarmement. Là aussi, il y a une très nette unité de pensée avec François qui a sans cesse combattu la possession d’armes nucléaires, notamment lors de son voyage au Japon, estimant par ailleurs que l’argent dépensé pour l’acquisition de ces armes devait servir à la contribution des pays les plus pauvres.

Le devoir de participer à la vie publique 

Face à la guerre et donc à la nécessité de construire la paix, Jean XXIII encourage la participation active des catholiques dans la vie politique :

"Une fois de plus, Nous invitons Nos fils à participer activement à la gestion des affaires publiques et Nous leur demandons de contribuer à promouvoir le bien commun de toute la famille humaine ainsi que de leur propre pays" (n. 146).

Cette participation peut passer par différents moyens : engagement associatif, entrepreneurial, électif, etc. Jusqu’en 1929 et les accords du Latran, les papes avaient interdit aux Italiens de participer à la vie politique de leur pays en protestation à l’invasion et l’occupation du Vatican. Après la Seconde Guerre mondiale, Pie XII avait au contraire vivement encouragé l’action politique, notamment en soutenant la démocratie chrétienne contre le Parti communiste italien, alors l’un des plus puissants d’Europe. Jean XXIII reprend cette idée en rappelant aux catholiques que non seulement ils ne vivent pas hors du monde, mais aussi qu’ils ne doivent pas tout attendre des structures politiques. Bien au contraire, c’est à eux de s’engager pour, là où ils le peuvent, contribuer à établir la paix et à œuvrer pour le bien commun. 

En rappelant aux catholiques qu’ils ont tous une part de responsabilité dans l’édification de la paix — paix civile et paix entre les nations —, et que cela ne repose pas seulement sur les dirigeants et les chefs d’État, Jean XXIII tient à rappeler la confiance qu’il porte dans chaque personne et la responsabilité personnelle qui incombe à chaque chrétien. Soixante ans plus tard, si certains passages de l’encyclique sont marqués par leur temps et leur époque, les grands principes restent pleinement valides.

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